
Ce phénomène saisonnier n’a rien d’anecdotique : en 2022, l’emploi dans les services de loisirs nautiques a été multiplié par quatre en haute saison par rapport à l’hiver. Ce pic témoigne du poids croissant de cette filière dans l’économie estivale littorale.
Une demande de main-d’oeuvre en forte croissance chaque été
La saisonnalité de l’activité nautique se traduit par une variation marquée des effectifs selon les périodes de l’année. En Corse, la filière emploie en moyenne 930 équivalents temps plein (ETP) sur l’année. Mais en plein été, ce chiffre dépasse les 4 700 ETP, selon les données de l’INSEE. Soit une multiplication par 4,5 des effectifs pour répondre à la hausse de la fréquentation touristique.
Ce besoin de main-d’oeuvre ne se limite pas aux seules zones insulaires : de la Bretagne à la Côte d’Azur, en passant par les côtes atlantiques ou les rives de l’étang de Thau, la demande de personnel qualifié ou formé sur le tas s’intensifie chaque été. Ports de plaisance, centres nautiques, entreprises de location de voiliers ou de bateaux à moteur, prestataires d’activités encadrées... Tous cherchent à étoffer leurs équipes, souvent dans l’urgence, pour absorber les pics de fréquentation concentrés sur quelques semaines.
En 2024, la filière a généré 5,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Des chiffres solides qui traduisent un secteur structuré, mais qui masquent l’intensité et la brièveté des périodes d’embauche. La majorité des contrats sont en CDD, souvent de deux mois, et les recrutements se renouvellent à chaque saison, posant la question de la fidélisation des saisonniers.

Des métiers concrets, exigeants, et au contact direct du public
Les emplois saisonniers dans le nautisme sont aussi divers que les activités proposées. Mais ils partagent des caractéristiques communes : ils s’exercent presque toujours en extérieur, impliquent un contact direct avec les usagers et requièrent une certaine endurance physique. Accueillir les plaisanciers dans les ports, gérer la location de bateaux, assurer leur nettoyage ou leur avitaillement, encadrer des séances de voile, de kayak ou de plongée, surveiller les zones de baignade... les missions varient mais demandent toutes polyvalence, autonomie et réactivité.
La certification BNSSA (Brevet National de Sécurité et de Sauvetage Aquatique) est requise pour les postes de surveillance. Mais dans bien d’autres cas, l’accès au poste ne nécessite aucun diplôme spécifique. En revanche, un bon relationnel, de la ponctualité, un esprit d’équipe et une capacité à garder son calme face aux imprévus sont vivement recherchés. Ce sont souvent des postes de terrain, parfois exposés aux caprices de la météo, où il faut savoir s’adapter en permanence.
Ces emplois permettent aussi de découvrir les coulisses d’un secteur que l’on ne connaît souvent qu’en tant que vacancier : la logistique des bases nautiques, les règles de sécurité en mer, les contraintes liées à la maintenance des bateaux ou encore les enjeux environnementaux liés à la fréquentation des zones littorales.

Une première expérience professionnelle aux multiples enseignements
Pour beaucoup de jeunes, ces jobs estivaux représentent un premier contact avec le monde professionnel. C’est souvent la première fois qu’ils travaillent sous contrainte horaire, qu’ils doivent gérer des responsabilités concrètes ou assurer des tâches essentielles au bon fonctionnement d’un service. Travailler tôt le matin ou tard le soir, gérer l’afflux de vacanciers, assurer la sécurité des équipements ou l’accueil des usagers... Autant de situations qui exigent des qualités humaines rarement enseignées, mais très valorisées : sens du service, esprit d’initiative, gestion du stress, capacité à travailler en équipe.
Cependant, la nature temporaire de ces contrats freine parfois la fidélisation. Une étude récente consacrée à l’emploi dans les stations balnéaires montre que cette forte rotation des effectifs empêche les employeurs de capitaliser sur l’expérience acquise. Chaque été, il faut donc recommencer à former de nouvelles recrues, avec les aléas que cela implique.
Mais ces expériences ne restent pas sans suite. En fin de saison, certains employeurs identifient des profils prometteurs et leur proposent de poursuivre en alternance, en contrat long ou en formation. C’est notamment l’objectif de l’opération « L’Équipe Nautique Recrute », portée par la Fédération des Industries Nautiques (FIN), qui vise à repérer chaque année 1 500 saisonniers à fort potentiel. Ces jeunes peuvent ainsi s’orienter vers des formations diplômantes ou intégrer durablement la filière.

Un secteur structurant pour les territoires littoraux
L’impact du nautisme sur l’emploi saisonnier ne se limite pas à l’individu. C’est tout un pan de l’économie littorale qui repose sur ce renouvellement annuel de main-d’oeuvre. Dans certaines communes du littoral, les activités liées au nautisme représentent une part importante des emplois estivaux. Leur développement favorise la vitalité économique des territoires, encourage le maintien de services ouverts à l’année, et renforce le lien entre les populations locales et le tissu touristique.
Dans ce contexte, le « job d’été nautique » ne se résume pas à un simple emploi passager. Il joue un rôle clé dans l’animation des territoires, dans la transition vers la vie active et dans la découverte d’un secteur aux multiples débouchés, qu’il s’agisse de tourisme, de services portuaires, de maintenance ou de sécurité.