Vendée Globe : entre tactiques imparables et ennemis glacés

Par Figaronautisme.com

Les marins du Vendée Globe continuent leur incroyable chevauchée sur les océans, transformant la planète en un gigantesque terrain de jeu… à haut risque. En tête, les deux leaders, après un virement de bord crucial, crapahutent désormais vers le Nord. Leur prochain objectif : l’équateur, escortés par des alizés qui se renforcent doucement. Entre eux, c’est une guerre de nerfs, où chaque mille est disputé avec une intensité qui ferait pâlir un tournoi de poker à Las Vegas. Bluff, stratégie et un soupçon de chance : tout est bon pour prendre l’avantage. Derrière, le long des côtes argentines, les poursuivants sont plongés dans un casse-tête redoutable. Chaque décision exige une tactique affinée, où la moindre erreur peut bouleverser les plans les plus solides. Et tandis que cette bataille s’intensifie, à l’autre bout du globe, dans le Pacifique, un autre groupe de solitaires fait face à des adversaires d’un tout autre genre : les icebergs. Ces colosses glacés, toutefois modélisés avec soin par CLS, flottent tels des spectres, menaçant quiconque ose s’approcher trop près. Au-delà des classements et des rivalités, la véritable essence de la course se dessine ici : une aventure humaine unique, où chaque marin repousse ses limites dans un face-à-face mémorable avec l’imprévisible.

En tête du Vendée Globe, Charlie Dalin (MACIF Santé Prévoyance) et Yoann Richomme (PAPREC ARKÉA) continuent leur duel serré, un véritable mano a mano qui ressemble plus à une partie de chat-perché nautique qu’à une simple course. Chaque fois que l’un croit avoir pris un peu d’avance, l’autre surgit comme un diable sorti de sa boîte. Ils naviguent tous les deux avec une précision mécanique, mais quand l’écart se resserre ou s’efface, leur sang-froid vacille. Et pour cause ! Imaginez : vous passez des jours à lutter contre les éléments, et votre rival, au lieu de se perdre dans l’horizon, décide de vous coller comme une mouette affamée derrière un bateau de pêche. « Ce qui est impressionnant, c’est la vitesse à laquelle on peut se faire prendre et reprendre des milles. On peut perdre 100 milles dans une journée puis en regagner 70 le lendemain. C’est un peu déphasant. Il faut rester assez calme dans sa tête, ce qui n’est pas toujours évident », a avoué Yoann. Pour lui, comme pour son rival, chaque avancée est une satisfaction fugace, chaque recul, une frustration mordante. Dans ce contexte, la psychologie devient un élément clé. Le but du jeu ? Ignorer la pression, et ne pas se laisser (trop) dévorer par l’incertitude. « J’admets que quand on a passé la dépression, Charlie s’est barré un peu et j’ai cru que j’allais rester coincé longtemps dedans. Je me suis un peu fait peur », a ajouté Yoann, faisant la preuve que même les meilleurs doutent parfois, ce qui est, finalement, presque rassurant. Parce qu’entre nous, qui peut prétendre prendre chaque décision comme un GPS sans jamais se tromper ?

Un pas vers les alizés

« Si je peux contenir un écart modéré, c’est une bonne chose. Ce serait bien de faire la transition dans l’anticyclone avec pas trop d’écart. Ça peut être top pour garder un peu de suspense pour l’arrivée mais je ne suis pas sûr que Charlie soit du même avis ! », a ajouté, non sans humour, le double vainqueur de la Solitaire du Figaro. Revenu à moins de trente milles de son rival, il a effectué un virement important ces dernières heures, et progresse désormais en direction du Nord. « Ça fait du bien d’être sorti du merdier dans lequel on était », a-t-il assuré. Ces derniers jours, tout comme le skipper de MACIF Santé Prévoyance, il s’est arraché les méninges à force de jongler avec des conditions météorologiques imprévisibles, où chaque décision semblait aussi aléatoire qu’un lancer de dé. Mais enfin, le décor change. Les vents se stabilisent peu à peu, offrant une accalmie bienvenue, presque un avant-goût des alizés. Pourtant, ce n’est qu’un prélude. Demain, ces vents réguliers tant attendus devraient enfin se renforcer, lui permettant de filer à bon rythme vers l’hémisphère Nord. Dans l’immédiat, il savoure ce répit, un peu comme un marathonien qui aperçoit le ravitaillement au loin : c’est encore loin d’être gagné, mais ça fait du bien au moral !

Spectacle sublime, menace silencieuse

Alors qu’il prévoit de franchir l’équateur d’ici trois ou quatre jours, profitant de la chaleur pour refaire le plein de vitamine D, ses concurrents en arrière connaissent une ambiance bien différente, notamment ceux évoluant entre le sud de la Nouvelle-Zélande et le mythique point Némo. Ces derniers doivent composer avec un adversaire imposant : les icebergs. Ces géants glacés surgissent sur leur route, semant la zizanie dans des esprits déjà tendus par des conditions polaires. Chaque mille parcouru devient un exercice de vigilance redoublée. « Impressionnants, majestueux, ils apportent une dose de magie à la course… mais aussi une bonne pincée de stress. Imaginer de voir un de ces géants givrés à l’horizon, c’est à la fois fascinant et un peu flippant. Parce que, soyons honnêtes, autant c’est beau de loin, autant on n’a pas vraiment envie de leur faire un câlin de trop près », a commenté Antoine Cornic par ailleurs surpris de devoir composer avec des conditions anticycloniques, ce qui ne l’emballe pas vraiment, lui qui s’était presque habitué aux secousses intenses du Grand Sud.

Redoubler de prudence

Pour Conrad Colman (MS Amlin), Sébastien Marsset (FOUSSIER) et Éric Bellion (Stand as One / Altavia), "de très près" n’est pas une expression exagérée. Leurs témoignages, partagés, oscillent ainsi entre le frisson et l’humour noir. Les autres marins, qui n’ont pas encore croisé ces sentinelles gelées, scrutent nerveusement leurs instruments, espérant que les modèles météo et les alertes de la Direction de course leur permettront de rester à une distance respectable.

« Voir un de ces colosses blancs, ce serait comme une cerise sur un gâteau mais une cerise possiblement un peu piquante », a rappelé le skipper de Human Immobilier bien conscient qu’un mastodonte glacé, c’est comme un feu d’artifice : magnifique à contempler… mais à bonne distance ! Reste que dans cette partie de l’océan, rien n’est jamais totalement prévisible. Mais c’est justement dans ces instants, où la beauté flirte avec le danger, que ces marins dévoilent toute leur grandeur. Ici, la nature impose ses règles, mais eux prouvent qu’avec un mélange de talent, de courage, et d’une bonne dose de folie, ils transforment l’impossible en routine quotidienne.

Retrouvez chaque jour notre analyse météo de la course avec METEO CONSULT Marine dans notre dossier spécial Vendée Globe et suivez les skippers en direct grâce à la cartographie.

L'équipe
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Jean-Christophe Guillaumin
Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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