Les plus belles plages en voie de disparition

Derrière les cartes postales, une réalité préoccupante se dessine. Les plages reculent. Partout. Selon une étude publiée dans Nature Climate Change, jusqu'à 50 % des plages de sable dans le monde pourraient avoir disparu d'ici 2100 si aucune politique de protection n'est mise en place. Ce recul ne touche pas uniquement des zones inhabitées, mais des lieux mondialement célèbres, visités chaque année par des millions de voyageurs. L’érosion n’est pas un phénomène uniforme : elle dépend de la géologie locale, de l’intensité des tempêtes, de la montée des eaux et, surtout, de l’impact des infrastructures humaines sur les flux sédimentaires.
Bondi Beach (Australie) : la carte postale en péril
À Sydney, Bondi Beach n’est pas seulement une plage, c’est une icône nationale. Pourtant, elle perd en moyenne 0,5 mètre de sable par an à certains endroits. En cause : l’urbanisation massive du littoral, la réduction des apports en sédiments et la fréquence accrue des tempêtes extratropicales. Des études de l'Université de New South Wales estiment que Bondi pourrait perdre 15 à 25 % de sa largeur d'ici la fin du siècle si les tendances actuelles se poursuivent. Au-delà de la perte esthétique, c’est aussi toute l’industrie touristique locale qui pourrait en souffrir, avec une fréquentation en baisse et des investissements d’entretien de plus en plus coûteux.
Waikiki (Hawaï) : le sable disparaît... et on le remplace
À Hawaï, Waikiki Beach a déjà perdu 25 % de sa largeur depuis les années 1950. Un projet de rechargement en sable a été mené à plusieurs reprises, mais le coût est élevé et les résultats temporaires. Le Département des Ressources Naturelles hawaïen estime que 70 % des plages de l’archipel sont en recul, et qu’au rythme actuel, certaines sections de Waikiki pourraient ne plus exister d’ici 2050. Les tempêtes tropicales, la surfréquentation et la baisse des apports fluviaux en sable naturel aggravent le phénomène. De nombreux hôtels bordant le rivage investissent dans des dispositifs de protection individuels, ce qui a pour effet secondaire d’accélérer l’érosion des plages voisines.
Grand-Bassam (Côte d’Ivoire) : l’érosion dévore le passé
Classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, la plage de Grand-Bassam est désormais l’un des symboles de la vulnérabilité de l’Afrique de l’Ouest. Chaque année, ce littoral perd jusqu'à 3 mètres de sable, selon les estimations du Centre ivoirien de recherche océanologique. En cause : la montée du niveau de la mer, mais aussi la construction du port d’Abidjan qui a bouleversé les courants côtiers. Plusieurs quartiers historiques sont aujourd’hui directement exposés à l’océan, et des projets de relocalisation sont à l’étude. Des barrages à sables ont été installés, mais leur efficacité reste limitée sans une approche régionale coordonnée.
Cox’s Bazar (Bangladesh) : la plus longue plage du monde menacée
S’étendant sur plus de 120 kilomètres, Cox’s Bazar est l’une des plus longues plages naturelles du globe. Mais ce joyau est menacé par l’érosion côtière qui avance à une vitesse de 1,8 mètre par an. Le Bangladesh, particulièrement vulnérable à la montée des eaux, subit de plein fouet les effets du changement climatique, aggravés par la pression démographique et la déforestation en amont des fleuves. La disparition progressive de la plage entraîne aussi une salinisation des terres et des répercussions sur l’agriculture locale. Le gouvernement envisage des mesures d’adaptation, mais le coût humain reste élevé.
Varadero (Cuba) : le tourisme face aux reculs du trait de côte
À Cuba, la plage de Varadero attire plus d’un million de touristes chaque année. Mais depuis les années 1980, le rivage a reculé de près de 30 mètres par endroits. Le gouvernement cubain a lancé une vaste campagne de rechargement des plages, injectant du sable artificiel, mais la montée du niveau marin - évaluée à 3,2 mm/an par les relevés satellites - continue d’éroder les efforts. Les hôtels les plus exposés commencent à envisager une stratégie de repli, alors que la fréquentation reste étroitement liée à la qualité du littoral.
Plage de Châtelaillon (France) : une lutte permanente
Sur la façade atlantique française, la plage de Châtelaillon est un laboratoire de la gestion côtière. Depuis 1989, la commune investit massivement dans la reconstitution de son cordon dunaire. Sans ces aménagements, plus de 15 hectares auraient déjà disparu sous les eaux. En moyenne, sans intervention, le trait de côte y recule de 80 centimètres par an. Les tempêtes hivernales ont mis à rude épreuve les dispositifs, nécessitant des rechargements annuels. La commune a dû revoir ses plans d’urbanisme pour tenir compte de la vulnérabilité de certaines zones.
El Zonte (Salvador) : entre tourisme et destruction
Au Salvador, El Zonte est connue pour ces vagues qui en font le parfait spot de surf. Pourtant, cette plage volcanique est l’une des plus menacées d’Amérique centrale. Le recul de la côte y atteint par endroits 2 mètres par an, selon des relevés menés par l’Université d’El Salvador. Le manque de végétation côtière, l’urbanisation sauvage et l’absence de politique environnementale aggravent la situation. Plusieurs ONG plaident pour une zone de protection marine afin de freiner les dégâts, mais la pression foncière reste très forte.
Plage de Leblon (Brésil) : la perle de Rio se fragilise
Si Copacabana bénéficie de protections renforcées, la plage voisine de Leblon à Rio de Janeiro est en sursis. Des épisodes de forte houle associés à des crues de la rivière Visconde de Albuquerque emportent chaque année une partie du sable. En 2022, le recul a atteint 2,5 mètres, forçant la ville à renforcer les digues de protection. Les océanographes de l’Universidade Federal Fluminense alertent sur une accélération du phénomène si les rivières de décharge continuent d’être canalisées et les zones humides asséchées.
Fuvahmulah (Maldives) : l’île qui disparaît
Aux Maldives, certaines îles comme Fuvahmulah, au sud de l’archipel, enregistrent une perte côtière pouvant atteindre 10 mètres lors d’épisodes de mousson. Des études du Programme des Nations unies pour l’environnement estiment que 80 % des 1 200 îles des Maldives pourraient être inhabitables d’ici la fin du siècle. La plage de Fuvahmulah, célèbre pour ses requins-tigres, est désormais grignotée des deux côtés. Des murs de protection ont été construits dans l’urgence, sans toujours tenir compte de l’équilibre écologique local.
Une urgence à l’échelle globale
L’érosion n’est pas uniquement une affaire de beauté naturelle ou de tourisme. Elle touche des habitats, des infrastructures et des modes de vie. Dans certaines zones du monde comme le delta du Nil, le delta du Mékong ou les littoraux indonésiens, ce phénomène devient une question de sécurité alimentaire et de migration climatique. Sur tous les continents, les littoraux fragiles deviennent les premières lignes du front contre le changement climatique.
Certaines plages peuvent être préservées si les bonnes stratégies sont adoptées : limitation de l’urbanisation, rechargement en sable contrôlé, réhabilitation des écosystèmes côtiers comme les mangroves ou les herbiers sous-marins. Mais ces solutions nécessitent des moyens importants, une volonté politique, et parfois... de faire un pas en arrière, au sens propre : laisser l’océan reprendre l’espace perdu.
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