Un ancien businessman s'attaque à l’Arctique à la rame
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Charles Hedrich s’est élancé ce mardi à la conquête d’une première mondiale : rejoindre le Groenland à la rame par le passage du Nord-Ouest, soit 7000 kilomètres de parcours.
Jusqu’en 2001, Charles Hedrich était à la tête d’une entreprise côtée en bourse, passant d’avion en avion pour développer son affaire. Puis il a décidé de tout arrêter pour se consacrer à l’aventure. Désormais ses périples aux quatre coins du monde se font à pied, à la voile ou à la rame. Et l’aventurier ne manque pas d’énergie: moins de six mois séparent son aller-retour à la rame sur l’Atlantique et son nouveau périple arctique. « C’est assez naturel, assure Charles Hedrich. J’aurais pu tenter plus d’aventures si j’avais eu les moyens financiers. Cette fois-ci, je les ai donc je ne me suis pas posé la question et je me suis préparé pour ce nouveau défi. » Ce lundi à 18h30 soit 4h30 ce mardi, heure de Paris, Charles Hedrich a donc donné son premier coup de rame à la conquête du passage du Nord-Ouest.
Une course contre la montre
Depuis 12 jours, la pression montait pour l’aventurier qui attendait les conditions adéquates face au détroit qui sépare l’Alaska et la Russie. « Je sais que je ne dois pas attendre la fenêtre météo parfaite pour ne pas traîner en chemin, nous confiait-il alors. Je dois partir au plus vite pour ne pas me faire piéger par le retour des glaces hivernales. Fin septembre, ce sera mort. » En 2010, à bord du bateau désormais mené par Charles Hedrich, un autre Français, Thomas Bonnier, avait été pris de vitesse par l'arrivée de l'hiver et du gel lors de sa tentative sur le passage du Nord-Ouest. La course contre la montre de trois mois et demi – le temps de l’été arctique - est donc de nouveau enclenchée.
Une traversée périlleuse
Dans le Grand Nord, l’aventurier qui a déjà parcouru ces contrées extrêmes à la voile, ne craint pas grand-chose. Sauf peut-être les ours blancs, redoutables prédateurs qui ne lui laisseront aucune chance en cas de rencontre. "C’est un réel danger, donc je suis armé. Il y en a beaucoup lors de la fonte de la banquise, car les phoques sont plus faciles à attraper pour eux. Il y aussi les orques, le danger est moindre mais il existe". Des munitions ont donc été embarquées à bord de son rameur des glaces, en kevlar et carbone. Son embarcation, plus légère que celle avec laquelle il a bouclé une double traversée de l’Atlantique à l’hiver dernier, est pensée pour se hisser sur la glace et dépasser ainsi les obstacles. Charles Hedrich ne l’a pas chargée en nourriture, bien décidé à s’approvisionner dans les villages rencontrés en chemin. La viande séchée à tous les repas ne lui fait pas peur ! Lors de ces haltes dans les villages arctiques, il rejoindra parfois un équipier pour l’aider à traverser les passages les plus périlleux. L’aventurier s’est entraîné à ramer 16 heures d’affilée avec des pointes de vitesse à trois nœuds pour ses longues journées en solitaire. Il sait qu’il devra affronter des courants difficiles à anticiper. "En ce qui concerne la banquise et le vent, les prévisions sont assez fiables, pour les courants, c’est très mal maitrisé et c’est assez aléatoire, a-t-il précisé. Ainsi, la veine d’un courant peut faire de quelques mètres à plusieurs kilomètres. Or à la rame, il suffit d’avoir un courant de 3 ou 4 km/h face à soi pour que ça devienne extrêmement gênant".
Charles Hedrich ne concède qu’une mauvaise surprise lors de la préparation de son périple : son rameur ne se retourne pas facilement en cas de chavirage. « Mon embarcation pour l’Atlantique revenait seule et vite à l’endroit, explique-t-il. C’était un impératif pour cette double transatlantique. Celle-ci reste plus ou moins sur la tranche et je dois sortir du bateau pour la remettre à l’endroit. Mais en principe, je ne devrais pas rencontrer de grosse dépression et sinon je me mettrai à l’abri à terre. » A 55 ans, Charles Hedrich a préparé cette aventure avec la sérénité de l’habitué. Sa carrière de globe-trotteur l’a déjà conduit d'un Paris-Dakar en 2003 au sommet de l'Everest, en 2006, puis sur la ligne d'arrivée du triathlon ironman de Nice et de l'ultra trail du Mont-Blanc en 2011.