L’ombre d'une marée noire plane sur l'Arctique
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Plusieurs centaines de bateaux tentent chaque été de raccourcir leur chemin en passant par l’extrême nord. Mais la crainte d’une marée noire plane sur cette nouvelle route maritime.
Le passage par l’Arctique permet d’économiser jusqu'à 20% de carburant par rapport aux routes commerciales traditionnelles entre la Chine et l’Europe. Ainsi, sur un trajet Shanghai / Rotterdam, un cargo parcourt 25.000 kilomètres en empruntant le détroit de Panama, 19.000 kilomètres en transitant par Suez et 16.000 kilomètres en choisissant le Grand Nord. L’intérêt commercial, particulièrement fort, a donc poussé cet été un cargo géant de 225 mètres, le Nordic Orion, à emprunter cette route parsemée de glace, entre l’ouest canadien et la Finlande, avec sa cargaison de charbon. Une première mondiale. Mais les eaux arctiques sont loin de se laisser dompter. Cet été 2013 a ainsi surpris les acteurs maritimes avec un hiver plus froid que ce que laissait craindre la fonte record de la banquise en 2012. De nombreux bateaux se sont donc fait surprendre par le retour de la banquise hivernale. De plus la glace est mouvante et les conditions météo restent très surprenantes avec de fréquents brouillards en été et le danger des glaces dérivantes, poussées par des vents violents.
Inquiétude canadienne
Le Canada a donc exhorté le Conseil de l’Arctique, dont il assure la présidence pour deux ans, à accroitre les mesures de sécurité pour anticiper une marée noire. Une volonté partagée par l'organisation maritime internationale qui prépare un code polaire. « Une marée noire occasionnée par l’un des nombreux navires qui va bientôt se frayer un chemin dans les eaux de l'Arctique, alors que la période de navigation s'allonge, pourrait avoir des conséquences graves pour l'environnement et les emplois des populations nordiques», a alerté la ministre canadienne de la Santé d'origine inuit, Leona Aglukkaq. La réunion qui doit se terminer ce mercredi soir rassemble les pays riverains de l’Arctique – Canada, Danemark, Etats-Unis, Finlande, Norvège, Russie et Suède – mais aussi les observateurs permanents comme la Chine ou la France. Le Canada est d’autant plus inquiet que la route dite du passage du Nord-Ouest passe au nord de son territoire, par un dédale d’îles. Or la flotte de bateaux brise-glace canadienne est vieillissante et Ottawa ne dispose pas des moyens d’intervention adaptés à un éventuel accident. La ministre a donc attiré l’attention des membres du Conseil sur le trafic grandissant de navires marchands mais aussi de bateaux de croisière, en plein développement dans les eaux septentrionales. Cet été, le premier navire de tourisme français, le Soléal, a ainsi franchi le passage du Nord-Ouest, sur les traces de l’explorateur Amundsen. Une prochaine croisière est déjà prévue pour l’été 2014. « L’un de nos adhérents, la compagnie du Ponant, a effectivement ouvert la voie cet été, commente Armateurs de France ce mercredi. Nous préférons que ce secteur soit investi par des petits navires répondant à un cahier des charges assez drastique pour un meilleur contrôle. » Le Canada prévoit la rédaction de directives pour réguler le tourisme arctique.
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