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LES 13 marins du Vendée Globe sont de l’autre côté de la Terre. Le dernier, Alessandro di Benedetto, navigue à la longitude de Perth, au sud-ouest de l’Australie, tandis que la tête de flotte affronte actuellement le désert liquide du Pacifique. Au milieu de cet océan « papier de verre », comme le surnomment les marins, les concurrents sont à 2 200 milles de la première terre (4 000 km), soit une semaine de navigation.
Après les dangers de la mer croisée et des tempêtes de l’Océan Indien, le Pacifique fait souvent figure d’océan plus clément bien qu’il soit le plus grand de ce tour du monde. Pourtant, ce dernier a réservé en seconde partie de semaine une embûche aux deux leaders, Armel Le Cleac’h (Banque Populaire) et François Gabart (Macif) avec une zone de calmes générée par un petit centre dépressionnaire en formation sur leur route directe. Les deux concurrents ont choisi de la contourner par le Sud, une route plus courte mais avec peu de vent, au risque de voir réduire leur écart sur leurs deux poursuivants, Jean-Pierre Dick (Virbac Paprec 3) et Alex Thomson (Hugo Boss).
Le Cléac’h et Gabart espéraient toucher vendredi matin un solide vent de 30 nœuds, issu de la dépression qui s’est formée dans leur tableau arrière. « Sauf en cas d’imprévu, nous allons sûrement rester assez proches avec François, constatait Armel Le Cleac’h lors de la vacation de jeudi. Le Cap Horn sera la difficulté de notre fin de semaine prochaine ».
Le demi-tour du monde commence aussi à se faire sentir sur les bateaux. Dimanche, l’un des fidèles du peloton de tête, Bernard Stamm (Cheminées Poujoulat), a dû mettre la course entre parenthèses pour réparer ses fixations d’hydrogénérateurs. Ces systèmes, qui fournissent l’énergie du bord, connaissaient des défaillances depuis le large du Portugal. Le skipper suisse s’est d’abord abrité au nord de l’île d’Auckland à l’endroit même où Marc Guillemot (Safran) avait dû faire escale lors de la dernière édition. Cette île a le mérite d’être sur la route des marins mais est encore très exposée aux forts vents du Grand Sud. Cette fois-ci, elle n’a pas été le meilleur des abris. Malmené par des conditions difficiles, le mouillage de Cheminées Poujoulat a dérapé et obligé le skipper à s’amarrer à son voisin de baie, un navire scientifique russe. L’équipage du navire a alors mis à l’eau un semi-rigide pour porter assistance au marin, enfreignant ainsi la règle qui veut que les concurrents du Vendée Globe ne puissent recevoir aucune aide extérieure. Informé des événements, le comité de course a porté réclamation pour suspicion d’assistance extérieure. De son côté, Bernard Stamm a fait une seconde escale dans la baie de Kaikai en Nouvelle-Zélande pour terminer ses réparations.
Un peu plus loin, c’est Javier Sanso (Acciona) qui a dû lever le pied en raison d’une avarie sur le chariot de la drisse de grand-voile. Mercredi, à la tombée de la nuit, le concurrent a donc dû faire de la gymnastique en haut de son mât. « Cette réparation m’a fait perdre du temps mais m’a aussi totalement détaché de la course, regrettait-il jeudi dans un message envoyé à terre. Cette situation est assez frustrante mais, au moins, je vais dans la bonne direction et je pourrai vite naviguer de nouveau. »