Jean Le Cam : « L'avance des premiers devient insolente pour nous »

Course au large
Par Figaro Nautisme, Le

«Je n'en reviens pas, j'ai dormi cinq heures!» C'est la sonnerie du téléphone du bord qui a réveillé Jean Le Cam jeudi après-midi, lorsque Le Figaro l'a appelé. Une pause salvatrice pour le marin fatigué qui a «tutoyé la connerie faute de sommeil», selon sa propre expression. Jeudi, Jean Le Cam affrontait 6 mètres de houle au nord d'une dépression australe qu'il surnomme «la Grosse Bertha». Le skipper de SynerCiel naviguait en cinquième position, à un peu plus de 1 900 milles de la tête de flotte.

©La Chaîne Météo

«Je n'en reviens pas, j'ai dormi cinq heures!» C'est la sonnerie du téléphone du bord qui a réveillé Jean Le Cam jeudi après-midi, lorsque Le Figaro l'a appelé. Une pause salvatrice pour le marin fatigué qui a «tutoyé la connerie faute de sommeil», selon sa propre expression. Jeudi, Jean Le Cam affrontait 6 mètres de houle au nord d'une dépression australe qu'il surnomme «la Grosse Bertha». Le skipper de SynerCiel naviguait en cinquième position, à un peu plus de 1 900 milles de la tête de flotte.


FIGARO NAUTISME - Juste avant d'aller rejoindre Morphée, vous avez confié avoir un gros déficit de sommeil à combler. Comment cela se manifestait-il?

Jean LE CAM. - Quand tu es complètement crevé, tu fais des bêtises. Ta capacité d'analyse de la situation n'est pas forcément très bonne et tu oublies de faire des choses. Par exemple, tu ne penses pas à ouvrir l'eau pour le liquide de refroidissement du moteur (le moteur en débrayé sert à produire de l'électricité à bord, NDLR). À ce moment-là, le sommeil devient prioritaire. Quand je me suis mis dans mon duvet, j'ai eu peur de ne pas m'endormir... Et voilà que je me réveille près de cinq heures plus tard!

Vous venez de passer l'antiméridien. Jusque-là, vous vous éloigniez de France, et maintenant vous vous en rapprochez. Que représente ce passage?

C'est la seconde moitié de la course, maintenant. Le décompte s'inverse, et c'est un peu comme un compte à rebours vers Les Sables-d'Olonne. Je trouve que c'est significatif de basculer comme ça d'est en ouest. C'est quand même l'opposé! J'aime bien ce moment...

Vous considérez-vous toujours comme un chasseur à l'affût derrière le peloton de tête?

Le peloton est tellement loin qu'on n'est plus dans la même course. Je dois dire que leur course est assez incroyable. Mais, honnêtement, quand je vois cela, je me demande ce que je suis venu faire ici. J'ai l'impression d'aller à une compétition, mais de m'être trompé. Les mecs, ils sont 2 000 milles devant nous! L'avance des premiers en devient insolente, et, pour nous, c'est dégoûtant. C'est incroyable! Cela dépend, bien sûr, de la préparation et du choix du bateau, comme de la professionnalisation et des qualités des skippers... Après, le classement est ce qu'il est, et je suis assez content de moi pour cette première partie de Vendée Globe. Le bateau est en bon état et je prends du plaisir avec notre trio (Dominique Wavre et Mike Golding), même si, là, je suis un peu isolé de mes deux compères. Un Vendée Globe, c'est toujours une course pour soi. Chaque skipper a son histoire et sa stratégie.

Quel est le plus dur dans les mers du Sud?

C'est l'état de la mer! Le plus dur, c'est d'aller vite dans une mer désorganisée. Ce n'est vraiment pas facile... Là, les routages me disaient de passer par le sud des îles Auckland, mais les routages ne sont qu'un modèle mathématique qui donne l'optimisation de la route à suivre. Ils ne sont pas sur le bateau! Moi, je dois prendre en considération l'état de la mer et la sécurité du bateau pour définir une stratégie (Jean Le Cam a finalement choisi de passer au nord de la dépression australe).

Comment gérez-vous le bruit à bord?

Ça fait partie du quotidien. Tout le monde parle du bruit, mais ce n'est pas vraiment un problème pour moi. Après, l'oreille, c'est le détecteur numéro un du moindre souci, c'est clair. Par exemple, quand on entend une écoute qui claque contre la coque, on est capable de repérer au bruit l'écoute concernée pour aller régler le problème

Est-ce que les fêtes de fin d'année représentent un moment particulier en mer?

Pour moi, le temps des fêtes, cela se vit à terre, car c'est un moment fort de convivialité. Ça peut faire un coup au moral de les passer en solitaire en mer, mais on a aussi beaucoup de choses à faire sur le bateau, donc on n'est pas dans l'esprit de Noël. Là, par exemple, je me réveille, je constate que le vent n'a pas bougé - c'est bien -, mais il a un peu molli, donc je vais tout de suite choisir les voiles pour les heures à venir. Il faut toujours être dans l'anticipation, à bord.

Quelle est l'heure affichée à votre montre, à bord?

Je fonctionne en temps universel, soit une heure de moins que la France. Au quotidien, je ne fais pas trop attention au décalage entre le soleil et l'heure de bord, mais, aujourd'hui, je me suis naturellement endormi la nuit. Et là, le soleil se lève, je me réveille et j'ai faim!

L'équipe
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Jean-Christophe Guillaumin
Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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METEO CONSULT est un bureau d'études météorologiques opérationnel, qui assiste ses clients depuis plus de 30 ans. Les services de METEO CONSULT reposent sur une équipe scientifique de haut niveau et des moyens techniques de pointe. Son expertise en météo marine est reconnue et ses prévisionnistes accompagnent les plaisanciers, les capitaines de port et les organisateurs de courses au large depuis ses origines : Route du Rhum, Transat en double, Solitaire du Figaro…