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Le duel des leaders de tête pourrait tourner au trio pour la remontée de l’Atlantique : Jean-Pierre Dick bénéficie d’un effet d’élastique qui lui est cette fois-ci favorable. De son côté, Bernard Stamm a pu reprendre le large ce vendredi matin après la réparation de ses hydrogénérateurs.
L’Etat de la flotte
Au classement de midi, ce vendredi, la tête de flotte est toujours occupée par Armel Le Cleac’h (Banque Populaire), à seulement 2.1 NM de son dauphin, François Gabart (Macif). Les deux leaders sont englués dans les calmes d’une zone de transition météorologique et avancent au ralenti, respectivement 12.4 et 11.9 nœuds. Au classement de 9 heures, ils ont été flashés à 9.5 et 9.1 nœuds.
Christopher Pratt, joker de Banque Populaire sur ce Vendée Globe, admire leur performance : « Ce sont quand même deux skippers qui ont un mental hors du commun. Ils ont un niveau de performance hyper linéaire avec un moral égal, même s’il y a une part de bluff lors des vacations, alors que le commun des mortels subit naturellement des fluctuations de moral. » Christopher Pratt mène actuellement une étude sur la motivation des skippers pendant la course. Quatre concurrents répondent tous les dix jours à des questionnaires sur la motivation (qui ne seront dévoilés qu’après la course), il s’agit des deux de tête, de Bernard Stamm et de Tanguy de Lamotte.
Pour différencier les deux leaders, Christopher Pratt avance tout d’abord qu’Armel Le Cleac’h a parcouru entre 600 et 700 NM de moins que son dauphin. « Avec ses trajectoires météo parfaites, il sollicite moins le bateau et cela finira peut-être par payer, explique-t-il. Je dirais qu’Armel Le Cleac’h a déjà une expérience de Vendée Globe, aussi il est plus sage, plus conservateur. François Gabart est un peu plus jeune fou, sans que cela soit péjoratif. Ses vitesses sur l’eau sont impressionnantes ! » Ces différences se remarquent également au niveau de leurs bateaux, quasi-identiques à quelques différences près. « L’équipe de François Gabart est allée un peu loin dans le développement du bateau qui est plus léger, plus extrême, remarque Christopher Pratt. Ils ont fait des choix de voile plus osés comme la grand-voile plus légère mais qui risque aussi de se déchirer plus facilement. Je crois qu’il y a 12/13 kilos de différences entre les deux bateaux. »
Christopher Pratt envisage maintenant la remontée de Jean-Pierre Dick (Virbac-Paprec) qui est dans un flux bien établi. « Avec les routages de jeudi matin, je tablais sur 3 heures d’écart au Cap Horn et l’après-midi, les routages montrait dix heures d’écart. Au final, je pense que Jean-Pierre Dick et les deux premiers passeront le Cap Horn dans la même demi-journée. Il devrait donc y avoir une bataille à trois. » Avant le départ, Christopher Pratt avait parié sur Jean-Pierre Dick, Armel Le Cleac’h, Vincent Riou (abandon sur avarie) et François Gabart. Un pronostic dans le désordre.
Derrière les trois de tête, on retrouve Alex Thomson (Hugo Boss) à 832.9 NM du leader. Le premier des tontons flingueurs est à 1842 NM d’Armel Le Cleac’h. « Le peloton est tellement loin qu'on n'est plus dans la même course », nous confiait Jean Le Cam jeudi soir. Le dernier de la flotte, Alessandro di Benedetto, est à un peu moins de 5000 NM du leader, sous l’Australie.
Notre analyse météo
Pas de chance pour Macif et Banque Populaire, une dépression secondaire a décidé de passer au nord de leur route. Se retrouvant entre la dépression principale dans leur lointain sud-ouest et cette secondaire qui les dépasse par le nord, ils subissent des vents faibles. Avec un vent de nord parfois inférieur à 10 nœuds, évoluant lentement vers l’ouest, leur progression sera relativement lente vers la dernière porte qu’ils doivent toucher dans leur NE. La progression vers le Cap Horn ne va donc pas être très efficace.
C’est beaucoup mieux pour Virbac-Paprec. A l’arrière de cette dépression secondaire, il bénéficie de vent de NW force 6 pour faire route rapide sur un cap efficace. Avec sa position beaucoup plus nord, laisser la dernière porte à tribord n’est pas une trop grosse contrainte.
Tout va bien aussi pour Hugo Boss qui va pouvoir aussi faire route directe et rapide vers la dernière porte.
En remontant la flotte vers l’ouest, ce n’est pas moins de quatre dépressions qui se suivent pour offrir à chacun du vent le plus souvent soutenu, NW à l’avant de la dépression, SW à l’arrière. La circulation est rapide. Même Cheminées Poujoulat (actuellement en 10e position, à 2888.9 NM du leader) devrait regagner les 50e en profitant d’un bon vent de nord, avant qu’un anticyclone ne vienne imposer ses vents faibles sur le SW de la Nouvelle Zélande.
Samedi 29
La situation s’éclaircit pour les deux leaders qui pourront toucher leur porte vers 18hTU et aussitôt empanner pour replonger au sud dans des vents d’ouest de force 6 à 7. Virbac-Paprec et Hugo Boss continueront leur route rapide et leur cap efficace dans le vent de NW auquel ils resteront accrochés.
Le peloton des trois (SynerCiel, Gamesa, Mirabaud) glissera toujours sur le tapis roulant mais ça se compliquera probablement pour les poursuivants, une peu lâchés par leur dépression moteur qui risque d’être trop rapide pour eux.
Dimanche 30
Les deux prétendants molliront de nouveau sur une dorsale entre deux dépressions. Ils devraient forcer leurs routes au sud en attendant que le NW annonciateur d’une nouvelle dépression ne vienne les cueillir. Derrière, déjà dans ce NW, les conditions continueront à être plus favorables pour les deux rattrapants.
Lundi 31
Toujours du NW médium pour les quatre premiers. Pas de tempête à redouter mais des icebergs signalés au large du Cap Horn. Derrière ça fluctue plus, mais dans des proportions raisonnables. Ce sont les derniers qui seront les plus exposés à des risques de fort coup de vent.
Mardi 1
Bonne nouvelle, les deux leaders devraient passer le Cap Horn de jour, à deux, et dans des conditions très maniables. Cela devrait être un bon premier janvier pour Macif et Banque Populaire. Juste derrière eux, Virbac-Paprec sera heureux de n’avoir plus que 18 heures de retard au passage de cette porte naturelle qui annonce un nouveau terrain de jeu, beaucoup plus ouvert.
Nos pronostics
Passage du Cap Horn le 1er janvier avec Armel Le Cleac’h et François Gabart toujours en tête, rattrapés par un Jean-Pierre Dick, favorisé par un bel effet d’élastique, et qui viendra batailler avec eux pour la remontée de l’Atlantique.
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