
Six anciens vainqueurs bataillent sur l'Atlantique pour la Transat AG2R La Mondiale: Michel Desjoyeaux, Jean Le Cam, Roland Jourdain, Kito de Pavant, Laurent Pellecuer et Fabien Delahaye. Ils étaient même huit sur la ligne de départ avec Charlie Dalin et Gildas Morvan, contraints à l'abandon. Pourquoi reviennent-ils ? Ont-ils tous les mêmes ambitions ? Eléments de réponse.
Evidemment, lorsque l’on pose la question « mais pourquoi reviennent-ils pointer leurs étraves sur l’AG2R », une réponse fuse : « c’est parce que tous ont la ferme intention de réaliser un doublé qui les ferait entrer dans l'histoire de la Transat ». Et pour cause, le pari est audacieux et a de quoi motiver puisque jusqu’ici, seul Armel Le Cleac’h l’a réussi. Alors certes, c’est sans aucun doute la principale raison de leur retour dans les rangs de la course. Mais est-ce bien la seule explication ? Pas si sûr…
L’envie tout simplement
« Dans notre sport, ce qui est bien, c’est que l’on peut zapper d’un bateau à l’autre. Je ressens vraiment une grande envie d’y aller. J’aime la navigation en double et revenir sur un Figaro où les problèmes sont simples. Petits bateaux, petits soucis », analyse Jean Le Cam, qui participe cette année à sa septième transat en double et à armes égales. Un sentiment partagé par Michel Desjoyeaux, qui revient sur cette épreuve après 16 ans d’absence : « C’est un ensemble de faits qui font que je suis là : j’ai toujours envie, ça me plaît d’apporter des choses à Corentin Horeau et qu’il m’en apporte. On est dans une logique de gagnant – gagnant. » Cependant, il ne faut pas non plus se tromper. En ces temps de crise, pas facile de trouver des budgets même quand on a pour surnom « le professeur ».
« Le projet Team France pour la Coupe de l’America n’avance pas aussi vite qu’on le souhaiterait mais je ne veux pas rester sur mon canapé à attendre que ça me tombe tout cuit dans la bouche et je n’ai pas envie d’arrêter de naviguer puisque je continue de m’amuser et d’apprendre des choses. Ce serait se cacher derrière son petit doigt de dire que j’avais plein de projets et j’ai tout annulé pour venir là », a expliqué le co-skipper de Bretagne Crédit Mutuel Performance. En clair, un marin n’est pas fait pour rester à terre, il préfère être en mer. Quitte à endosser les cirés d’équipier de luxe auprès de jeunes avides de consolider leur expérience et leur connaissance du large. « Avec Martin Le Pape, nous avons notre génération de décalage mais il y a un vrai parfum d’aventure », s’enthousiasme Roland Jourdain, qui concède néanmoins que si la Krys en MOD70 avait eu lieu, il n’aurait pas été là.
L’expérience et les échanges aussi
Idem pour Le Cam, qui avoue que la transat tombe bien dans son calendrier. Reste qu’il apprécie la formule : « j’aime cette course en double. Elle ouvre les possibilités. Les spécialistes de courses en solitaire peuvent former des couples aux horizons différents. Ça permet d’échanger et de s’enrichir ». Même sur un support où ils n’ont plus rien à prouver pour avoir tout raflé ou presque.
« Le circuit Figaro est, pour moi, ce qui se fait de plus difficile en matière sportive. Les gens ont du mal à comprendre qu’un bateau plus petit soit plus difficile. Et que ce n’est pas parce que tu as gagné le Vendée Globe que tu vas gagner en revenant en Figaro » lâche Michel Desjoyeaux. Ils ont beau afficher la cinquantaine ou presque, leur motivation est intacte. Identique à celle que peut montrer Fabien Delahaye (Skipper Macif), qui s'est déjà imposé à Gustavia, avant ses 30 ans. Voilà pourquoi, en ce qui le concerne, la question se pose totalement différemment. Pour l’heure, l’essentiel pour lui et de continuent de fourbir ses armes sur le circuit monotype. L'objectif sur cette AG2R, au delà du doublé, est d’engranger un maximum d’expérience avant de faire le grand saut en 60 pieds ou plus. Pour Charlie Dalin (Cercle Vert) malheureusement, l’aventure s’est arrêtée un peu brutalement, hier, à la suite d’un démâtage. Ni lui ni Gildas Morvan, les tenants du titre, ne réaliseront donc cette année leur rêve d’inscrire leur nom deux fois au palmarès de la course. Dommage parce que l’histoire aurait été belle. Reste à voir si l’un des six autres anciens vainqueurs toujours en course va y parvenir. Verdict dans vingt jours.