
Après deux étapes qui auront généré de gros écarts au sein de la flotte et permis à Yoann Richomme (HelloWork-Groupe Télégramme) de s’offrir un joli matelas d’avance sur ses poursuivants, la troisième s’est élancée ce dimanche en Baie de Morlaix dans un vent de sud-ouest d’une quinzaine de nœuds. Après quatre jours à Roscoff, les 46 marins étaient visiblement pressés d’en découdre, trop nombreux au-delà de la ligne au coup de canon à 14h, obligeant le comité de course à ordonner un rappel général. Le deuxième départ, à 14h11, a été le bon, la flotte s’étant élancée tribord amure, grand-voile haute et génois à l’avant, pour un parcours côtier de 10 milles.
Un parcours idéalement attaqué par le deuxième au général, Pierre Leboucher, passé le premier à la bouée spectacle, mouillée au pied de la pointe Sainte-Barbe, puis à la bouée Radio France, dernière marque de ce côtier, devant Fabien Delahaye (Loubsol) et Loïs Berrehar (Bretagne CMB Performance).
Les raseurs de cailloux et les gars du large...
La brise de Sud-Ouest s’est lentement écroulée avant la nuit devant les Héaux de Bréhat, provoquant une scission de la flotte en deux camps : les raseurs de cailloux emmenés par Adrien Hardy (Sans nature, pas de futur) et Pierre Leboucher (Guyot Environnement) et les gars du large aux côtés de Corentin Douguet (NF Habitat) et Clément Commagnac (Grain de sable). Avec la marée descendante, c’était près de trois nœuds de courant contraire à affronter, or avec moins de cinq nœuds de vent, difficile de progresser vers le but. Ce pit-stop à l’entrée de la baie de Saint Brieuc entraînait alors une compression de la flotte à l’avantage des retardataires qui purent ainsi, comme les deux Klaxoon, recoller au peloton.

Les douze coups de minuit
Et ce ne fut que vers minuit que le vent daigna se lever en même temps que le ciel se dégageait, éclairé par une lune quasi pleine. Les partisans du bord à terre purent alors piquer vers Granville, toujours sous spinnaker, mais avec une pression suffisante pour se libérer des rochers patinés de Bréhat : Gildas Mahé (Breizh Cola-Equi’Thé) et Benjamin Schwartz (Action contre la faim) furent les mieux placés pour glisser vers la bouée Le Videcoq en accélérant progressivement jusqu’à huit nœuds et plus, poussés par un courant de marée montante de plus en plus favorable. De fait, une nuée de lucioles vertes, rouges et blanches déferlait sous le plateau des Minquiers vers 3h30, puis vers Granville pour contourner la première marque de ce parcours de 460 milles. Et le classement à l’empannage révélait une nouvelle hiérarchie avec Alexis Loison (Région Normandie) comme meneur de meute, et les écarts commençaient à être conséquents à l’issue de cette première nuit de mer, alors que la brise dégraissait...
Toujours sous grand spinnaker, mais cette fois bâbord amures cap au Nord, le petit train se formait pour éviter les dangers de l’archipel de Chausey en remontant le long des côtes du Cotentin, partant pour laisser Jersey sur la gauche et la pointe d’Agon à la dextre. C’est par là-bas, après le lever du jour, que les choses vont se complexifier : le vent devrait s’étioler petit à petit et la marée se renverser avec un jusant défavorable à partir de 9h00. Alors comment atteindre cette île d’Aurigny avec tous ses facteurs contraires ? Et n’est-ce pas là que les écarts vont réellement se creuser et les échappées se créer ? Car s’il faut mouiller par trente mètres de fond voire plus, aux abords du raz Blanchard, cela va se compter en heures de décalage quand il faudra négocier (par l’Est ou par le Sud ?) le Dispositif de Séparation du Trafic des Casquets…