ARKEA ULTIM CHALLENGE - Tom Laperche : « faire parfois preuve d'insouciance »

Par Figaronautisme.com
carte de la course Arkea Ultim en direct

PAROLES DE SKIPPER (1/6). Jusqu’au départ, les skippers dévoilent un à un leur état d’esprit, leurs motivations et leur façon d’aborder ce défi de géant. Pour débuter cette série, un skipper de 26 ans, formé par François Gabart, dont le sang-froid, la sérénité et la lucidité n’ont pas fini d’impressionner. Tom Laperche aborde son premier tour du monde avec une forme de sagesse fascinante. Même les réparations conséquentes effectuées sur SVR-Lazartigue, qui devrait faire son arrivée à Brest vendredi prochain, ne semblent pas vraiment le faire douter. « Ça fera partie de notre histoire », confie Tom avec le sourire. Après avoir signé des autographes et s’être rendu chez le coiffeur à Brest samedi, il a pris le temps de se confier au téléphone, sans cacher une sacrée détermination.

Tu as pu constater la ferveur du public brestois lors de la présentation samedi midi. Qu’as-tu ressenti ?

C’est toujours sympa de profiter de ces moments-là. On voit qu’il y a du monde à Brest et dans la région qui suit la course au large. Ça leur parle, ce sont des gens qui sont tournés vers la mer. C’est vraiment sympa de percevoir cet enthousiasme.

Fin novembre, SVR Lazartigue a annoncé avoir détecté cette avarie structurelle sur le bras avant. Peux-tu refaire le fil de ce qui s’est passé ?

Lors de notre retour à l’issue du convoyage, pendant le check complet du bateau, on a découvert une fissure dans le bras avant. Ce n’est pas quelque chose que l’on peut percevoir de l’extérieur. Dans la foulée, il a fallu comprendre comment s’est arrivé, trouver une solution, mettre en œuvre la réparation afin que ça soit plus robuste et fiable. Ensuite, il y a eu une très bonne synergie entre les architectes, les constructeurs, les calculateurs et le bureau d’étude de MerConcept. Parvenir à réparer en si peu de temps, avec cette qualité de réparation, c’est une sacrée prouesse.

Tu as douté de ta capacité à être au départ ?

Oui forcément quand on a contrôlé le bras, on s’est dit que ça pouvait être compromis. Après, je n’ai jamais voulu croire qu’on n’y arriverait pas, qu’on ne serait pas là le 7 janvier. Ce sera notre rythme, notre histoire. Nous retiendrons ça de notre préparation de tour du monde un peu particulière. Là on doit encore finir de préparer le bateau, le mettre à l’eau et passer par Brest seulement quelques jours. On se sera préparé de cette façon-là mais ce qu’il faut retenir, c’est l’énergie mise par toutes les personnes impliquées. Et on sait bien qu’on aura tous notre lot de soucis et que la ligne d’arrivée est bien loin !

À écouter les prises de parole des six marins, on a l’impression que cette course a une dimension supplémentaire, quelque chose en plus…

Ça reste une course de voile avec un parcours à effectuer et l’idée d’aller le plus vite possible. Après, il faut prendre en compte la capacité à gérer tous les aléas techniques, à ménager son bateau. Le côté extraordinaire, c’est que ce tour du monde a très peu été fait, qu’il y a pas mal d’incertitudes sur la durée, la façon de gérer le bateau, le parcours... On va aller dans des endroits où ces bateaux vont peu, notamment dans les mers du Sud. Il y a du questionnement et c’est légitime.

Avec la difficulté de cette course, on peut penser que tous ceux qui arriveront au bout seront « en mode dégradé », avec un bateau qui n’est pas au maximum de ses capacités. Tu partages cette idée-là ?

 

Déjà, il faut rappeler qu’en 50 ans, la vitesse des bateaux a été multipliée par quatre, ce qu’aucun sport mécanique n’est parvenu à réaliser. Les contreparties, ce sont les doutes qui subsistent à l’échelle du tour du monde. J’ai confiance dans mon équipe, dans nos systèmes, dans notre bateau. Il y aura des imprévus, des choses que l’on maîtrise moins même si on essaie de limiter les risques. Mais ça fait partie de la course au large : le fait de jouer dans les éléments rend difficile la capacité à tout appréhender, comme si tu modélises une course d’une heure sur du bitume. Il n’y aura pas d’équation simple, tu peux casser, t’arrêter, réparer du petit truc à la grosse bricole... Il faudra être fort et motivé pour garder l’envie d’aller au bout. Et les vitesses théoriques de la plateforme même endommagée restent encourageantes.

Tu as grandi au sein du team SVR-Lazartigue. Que t’as appris le fait de côtoyer François Gabart au quotidien ?

C’est tellement dur de répondre à cette question. Déjà, c’est devenu un ami. Il m’a apporté beaucoup sur la technique, les astuces, les manœuvres mais aussi dans la relation avec l’équipe, l’aspect mental, le fait d’être seul à bord. Il a eu un rôle primordial avec moi depuis que je suis arrivé dans l’équipe et il aura toujours un rôle très important… C’est même un très bel atout à avoir dans les semaines qui viennent.

François aime te décrire comme ayant beaucoup de sang-froid… Est-ce que ça aide à ne pas avoir peur à l’idée de disputer cette course ?

Oui, je suis plutôt de sang-froid et plutôt calme. Après ce n’est pas de la peur. C’est moi qui ai choisi de faire ce tour du monde, il y a beaucoup d’envie surtout et une part d’appréhension. Mais la part d’inconnu contribue à cette envie, à l’attirance pour cette course.

Est-ce que c’est un avantage d’être bizuth ?

Je crois qu’il n’y a que Thomas (Coville) qui n’est pas bizuth d’un tour du monde en solo et en multicoque. Être bizuth, ça a des inconvénients – l’expérience qui te permet de mieux anticiper – et des avantages. Il y aura des moments où on aura besoin de déconnecter, de faire parfois preuve d’insouciance et quand tu as moins d’a priori, ça peut être facile. Après, je reste quelqu’un de réfléchi, je ne suis pas du tout du genre à me lancer tout schuss sans rien savoir. J’essaierai d’avoir les meilleures informations possibles et de faire les bons choix. Les inconvénients, c’est l’expérience : ça permet de mieux anticiper, d’avoir une vision sur ce qui arrive.

Quel est ton objectif à l’ARKEA ULTIM CHALLENGE – Brest ?

L’objectif lointain, c’est de gagner le tour du monde. Après, il y a plein d’objectifs au fur et à mesure du parcours. Ça a déjà commencé puisque réparer, être sur la ligne de départ, ça en fait partie. Après, j’en ai plein en tête dans ma façon de gérer cette course pour aller au bout. Mais comme je l’ai déjà dit, la ligne d’arrivée est encore très loin. »

Diaporama
Vincent Olivaud
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Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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