Anne Bonny, femme, pirate et légende
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Naissance et enfance
Née sous le nom d’Anne Cormac en 1702, à Cork, Irlande, elle est la fille illégitime de l’avocat William Cormac, et de Mary, servante. L'affaire finit par être révélée et il s'exile alors avec sa fille à Charleston en Caroline du Sud (USA), où il l'élève comme un garçon et l'appelle même Andy. Une fois établi, il exerce ses talents d’avocat qui lui permettent de posséder une belle bâtisse ainsi qu’un champ. Il fait fortune.
Début des déboires
La mère d’Anne décède à ses douze ans. C’est à partir de treize ans que la belle et intelligente rouquine se fait remarquer par son tempérament, très fier. Dans la maison familiale, une servante est retrouvée poignardée, crime imputée à la jeune adolescente. Elle se rapproche également d'un dénommé James Bonny, un navigateur de seconde zone et pirate à ses heures perdues. Ce dernier espère secrètement récupérer les terres du père d’Anne. Cette dernière se trouve déshéritée toutefois en raison du pauvre parti qu’elle choisit, condamnant la promesse d’une richesse acquise sans effort.
Une rumeur court selon laquelle Anne, ou Andy, aurait brûlé les plantations de son père en rébellion. Légende ou réalité, les papiers ne tranchent pas, tout comme le meurtre de la servante. Toutefois, Anne et son mari se seraient éclipsés pendant quatre années, de 1714 à 1718 dans un sanctuaire connu sous le nom de la République des Pirates, New Providence (à Nassau). De nombreuses histoires circulent au sujet d'Anne, notamment qu’elle aurait "soulagé" un pirate de sa dernière oreille d’un coup de feu, ou qu’elle aurait déshabillé son maître d’armes à l’épée, bouton par bouton. De ce temps néanmoins, de nombreux habitants reçoivent la grâce du roi ou échappent à la loi. A noter également l’arrivée d’un certain gouverneur, pour lequel James Bonny devient informateur sur la piraterie en 1718. Être pirate devenait de plus en plus difficile.
La piraterie commence...
Probablement déçue par cette alliance, Anne Bonny se sépare de James, éclusant les tavernes à coup d’alcool et de bagarres. Suite à l’effondrement du mariage, elle trouve un homme puissant dont elle devient la maîtresse. Il lui donne une certaine protection. Elle commence dans la foulée sa carrière de pirate avec Pierre Bousquet, gérant d’une taverne, par le fait d'arme que voici.
Les deux compagnons savent qu'un navire marchand français est de passage aux abords de la côte. L'idée est de le dépouiller. Pour se faire, ils remettent en état le navire Revenge, afin qu’il puisse presque naviguer. Ils accostent le navire marchand à l’aide d’un subterfuge horrifique : ils se font passer pour un vaisseau fantôme ensanglanté et Anne Bonny se trouve sur la poupe avec une hâche recouverte de sang de tortue, stupéfiant de peur l'équipage français qui refuse le combat et fuit. Bonny et Pierre Bousquet récupère le butin, sans faire une seule victime.
Le gouverneur de l’époque, souhaitant anéantir la piraterie, gracie autant que possible les pirates qui souhaitent se retirer de la vie de contrebandier. Anne Bonny, tout comme Pierre et un nouvel acolyte farouche du nom de Rackham, refusent de se soumettre et force le blocus imposé sur l’île à coup de ruse et à bord du Seahorse. La ruse aurait voulu qu’Anne Bonny, seins nus, ait hypnotisé le blocus. Cette version est toutefois difficile à soutenir, étant donné qu’Anne Bonny ne dévoilait pas sa féminité et se faisait passer pour Andy dans le but de faire partie de l’équipage.
D’autres versions disent qu’Anne serait devenue l’amant de Rackham. Ce dernier aurait proposé à James Bonny de l’argent pour qu’il se soulage de cette alliance. Il refuse et avertit le gouverneur qui condamne au fouet Anne. Même si les motifs de la fuite restent flous, Anne et Rackham quittent l'île New Providence.
Anne Bonny et Mary Read, femmes pirates
Bien qu'ils aient fui, les deux compères font souvent escale sur la même île. Anne Bonny y rencontre une femme pirate, elle-même déguisée en homme et se faisant passer pour Willy, Mary Read. Elles se lient alors d'amitié, et dépouillent les navires marchands qu'elles croisent, avec l'équipage et le navire de Rackham. Ils deviennent un trio extrêmement craint dans les mers bordant la Jamaïque.
Mais le trio, aussi amoureux (Rackham-Anne-Mary), déclenche des querelles au sein du Revenge. Rackham découvre la relation d'Anne avec Mary, et du coup le sexe de Mary Read. A partir de ce moment, il tolère la relation et les deux femmes apparaissent au grand jour, s’habillant selon leur désir en homme ou en femme (bien qu’il soit relaté que lors des abordages, elles se travestissaient).
L’équipage dépouille plusieurs navires marchands aux abords de la Jamaïque, et jouit de nombreuses richesses. Ce qui leur vaut une notoriété qui, in fine, ne leur rend pas service. En effet, le gouverneur des îles Bahamas ordonne l’arrestation de l’audacieux équipage. Se sachant traqué, l’équipage enchaîne les gros coups et se joue des autorités.
Le Revenge s'illustre lors de l'abordage d'un navire de la flotte, un coup d'éclat et d'ingénuosité. Le Royal Queen est proche de la capture de l’équipage et d’une lutte canonnière sans merci. Anne Bonny reconnaît un ancien amant, propriétaire du bateau : Chidley Bayard. Elle se fait alors passer pour une repentie voulant fuir la piraterie. Puis elle séduit et drogue le capitaine Hudson. Ensuite, elle mouille les mèches du canon afin que ces derniers soient dans l’incapacité de faire feu. Elle retourne à son navire en pleine nuit et le lendemain, le Revenge aborde le navire sans défense. Il n’y a qu’un mort, le capitaine Hudson, victime de la jalousie de Mary Read.
La fin
En octobre de la même année 1720, un commandant et ancien pirate, Barnet, prend d’assaut le Revenge tandis que l’équipage s’enivre pour célébrer une victoire. Tout l’équipage, hormis Mary et Anne, se rend sans opposer de résistance. Les deux femmes, excédées par le comportement lâche de leurs acolytes, s'en prennent à eux également. C’est au terme d’un combat acharné que les deux femmes pirates déposent les lames, emportant avec elles deux vies et blessant plusieurs hommes, dont Rackham.
Une fois l'équipage mis aux arrêts, l’affaire devient publique et passionne les foules. Des femmes pirates, aux succès retentissants, cela ne se voit pas tous les jours. Hier comme aujourd’hui. Tout l’équipage est jugé, pendu, hormis les deux femmes qui se prétendent alors enceintes. En accord avec les lois de l’Eglise, elles ne sont pas exécutées mais sont envoyées en prison.
Mary Read décède de la fièvre jaune, tandis qu’Anne Bonny disparaît purement et simplement de la prison et des registres administratifs. On sait que le gouverneur la gracie la veille de noël 1720. Les hypothèses varient quant à comment cela s’est produit.
Ensuite, sa trace se perd. La plus belle des légendes raconte qu’elle se serait remariée en Caroline du Sud sous un autre nom, serait morte à 80 ans en ayant une descendance généreuse. D’autres disent qu’elle serait retournée à la piraterie…