L'enseigne de vaisseau, nommé Windy Marty, scrute l'horizon à l'aide de jumelles. Quelques navires sont en vue, mais aucun ne risque de croiser la route de la toute nouvelle frégate multimissions Aquitaine, dont la particularité est un équipage réduit à 94 marins, contre 250 à 300 dans des bâtiments plus anciens.
"Nous disposons de nombreux équipements qui nous permettent un accès facilité à l'information de navigation, ce qui simplifie le quart", affirme la jeune femme, qui assure pendant quatre heures les fonctions de chef de quart à bord du bâtiment aux lignes épurées naviguant par mer agitée au large de Lorient.
Grâce à un haut niveau d'automatisation et à une technologie de pointe, seuls quatre marins sont nécessaires à la passerelle -où les écrans plats ont chassé les cartes papier- contre six ou sept dans les navires plus anciens.
L'Aquitaine est la première des Frégates européennes multimissions (FREMM) -programme mené par la France en coopération avec l'Italie- a avoir été réceptionnée par la Marine. Elle lui a été livrée depuis peu par le groupe naval et de défense DCNS. Les FREMM, onze au total, visent à renouveler la flotte des frégates de lutte anti-sous-marine et anti-aérienne, pour un coût total de plus de 7 milliards d'euros.
"Par rapport aux frégates plus anciennes, on a réduit quasiment au tiers l'équipage", explique le vice-amiral d'escadre Xavier Magne, commandant de la force d'action navale. "C'est un peu comme si on me demandait de courir un Paris/Dakar avec une voiture toute neuve dont on a rempli le réservoir d'huile au niveau bas... ça va nous demander beaucoup, beaucoup de vigilance".
"Si on est 94, on ne peut pas avoir un maillon faible à bord", juge le commandant du navire, le capitaine de vaisseau Benoît Rouvière, 46 ans, soulignant le rôle primordial de la structure à terre composée d'une trentaine de personnes capables de remplacer au pied levé un marin défaillant.
Cette optimisation des effectifs répond à une nécessité de réduction des coûts, mais également à la volonté de réduire le nombre des marins exposés au feu ennemi, explique le vice-amiral Magne.
La frégate basée à Brest avance à la vitesse de 10 noeuds par vent de nord-ouest. Mais sa vitesse maximale est de 27 noeuds, soit 50 kmh. Longue de 142 mètres, elle dispose d'un canon de 76 mm, de huit missiles mer-mer exocet d'une portée de 180 km, de 19 torpilles légères et surtout d'un sonar très basse fréquence.
"Sur un radar adverse, l'écho de la frégate a plutôt la taille d'un navire de pêche que celle d'une frégate de 6.000 tonnes", assure le lieutenant de vaisseau Pierre Montané, ajoutant que le bâtiment est capable de détecter la présence d'un sous-marin à "des centaines de kilomètres".
Un hélicoptère Caïman-NH90 est embarqué à bord avec son détachement de 14 militaires. Mais le navire est aussi un centre opérationnel, d'où une éventuelle guerre serait commandée, moderne et spacieux et doté de nombreux écrans plats, ainsi que de cabines confortables où l'on ne dort plus qu'à quatre maximum contre des "dortoirs" de plusieurs dizaines de marins dans les frégates plus anciennes.