Explorer une épave "quasi unique", en immersion avec les archéologues, c'est ce que propose le documentaire "Opération Lune", du nom d'un trois-mâts amiral de la flotte de Louis XIV coulé au large de Toulon en 1664.
Ce film de 90 mn, qui sera diffusé le dimanche 23 juin à 20h45 sur Arte, retrace cinq jours d'exploration archéologique, à 90 mètres sous la mer, de l'épave de la "Lune". Une campagne dirigée par Michel L'Hour, directeur du Département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines (Drassm).
"C'est une aventure humaine, scientifique et cinématographique", a indiqué Pascal Guérin, réalisateur, lors de sa présentation en avant-première dans les locaux de Dassault Systèmes à Vélizy-Villacoublay (Yvelines). Car l'épopée historique se double pour la première fois d'une expérience 3D appliquée à l'archéologie des profondeurs.
"Opération Lune, l'épave cachée du Roi Soleil" est donc une double plongée dans le XVIIe siècle et dans le futur de l'archéologie sous-marine.
L'histoire est tragique. "La lune", un navire déjà âgé, est envoyé en renfort par le jeune Roi Soleil pour ravitailler le corps expéditionnaire qui se bat contre des pirates barbaresques en Afrique du Nord. L'affrontement tourne à la débâcle et La Lune, en mauvais état et surchargé, traverse à nouveau la Méditerranée, avec près d'un millier d'hommes à son bord, la plupart blessés ou malades. Quand il parvient par miracle à l'entrée du port de Toulon, les autorités, pour dissimuler le fiasco, prétextent un risque de peste et lui refusent l'entrée, l'envoyant mouiller aux îles d'Hyères.
Ce sera le voyage de trop. Le 6 novembre 1664, le trois-mâts, "qui faisait de l'eau de toutes parts", essuie "une tempête géante" et "coule comme du marbre", raconte Michel L'Hour. Il n'y aura qu'une vingtaine à une quarantaine de survivants.
Un chantier laboratoire
C'est le spécialiste du Titanic, Paul Henri-Nargeolet, qui découvre l'épave en 1993, reposant à 90 mètres de profondeur. Mais à l'époque, les techniques de fouilles sous-marines ne permettent pas un chantier archéologique approfondi. Vingt ans plus tard, le site devient "un chantier laboratoire", permettant d'expérimenter de nouvelles techniques de fouille, explique Michel L'Hour.
Trois bateaux sont sur zone : l'"André Malraux", le nouveau navire de recherche de la Drassm, le "Jason", remorqueur affrété par la Marine nationale, et le Minibex, navire de la Comex qui opère le "Remora 2000", un sous-marin équipé d'un prototype de caméra permettant de filmer la "Lune" en relief. Il travaillera au fond avec deux autres engins, le Rov, robot contrôlé à distance, et le très étonnant "Newtsuit", un scaphandre impressionnant où se glisse un homme, protégé de toute pression extérieure jusqu'à 300 mètres de profondeur.
Le documentaire, auquel Lambert Wilson prête sa voix, relate jour après jour les aventures de cette armada sous-marine, les casses, les premières remontées d'objets, …
"C'est une fenêtre ouverte sur la vie du XVIIe siècle", résume l'archéologue qui prévoit deux années supplémentaires d'étude du navire. Mais ce sont aussi de nouvelles perspectives d'exploration d'épaves gisant bien plus profondément, là où l'homme ne descendra jamais, qui se dessinent.