Nous venons de vivre une séquence tempétueuse exceptionnelle avec pas moins de six tempêtes en février et un dernier coup de canon conséquent prénommé Ulla. Retour sur cet hiver hors-norme.
Nous venons de vivre une séquence tempétueuse exceptionnelle avec trois tempêtes en décembre, deux en janvier, pas moins de six tempêtes en février et un dernier coup de canon conséquent prénommé Ulla. « Nous sommes restés dans un flux d’ouest pendant trois mois, explique Pierre Huat, prévisionniste pour Météo Consult. Comme pour l’hiver 1990, c’est cette persistance qui constitue un record. » Ce flux d’ouest était nourri par un vortex polaire solidement ancré sur l’Arctique, des vagues de froid américaines qui ont creusé les dépressions sur l’Atlantique et un Jet Stream, ce courant d’altitude qui pousse les dépressions, puissant et rectiligne. Ce flux d’ouest a été si fort qu’il a repoussé toute descente de l’anticyclone russe, pourtant gonflé d’air froid arctique. Aucune vague de froid n’a réussi à s’imposer sur l’Europe de l’Ouest au-delà de l’Allemagne.
En revanche, la France n’a pas connu cet hiver de record d’intensité. Seul le cœur de la tempête Qumeira est passé au-dessus de notre territoire. Les autres centres dépressionnaires ont évolué sur les îles britanniques et ont donc essentiellement impacté les côtes bretonnes et la Grande Bretagne qui connaît une crise naturelle exceptionnelle. Les rafales ont balayé les côtes, avec plus de 160 km/h, comme les terres, avec plus de 110 km/h à Londres, et la Tamise a battu des records de crue datant de 60 ans. 5.800 habitations ont été inondées depuis décembre.
Un hiver les pieds dans l’eau
« D’un point de vue météo, on retiendra que le défilé des tempêtes a été accompagné de deux faits remarquables : des précipitations hors normes sur la façade ouest, mais aussi sur le sud-est, et des submersions récurrentes en raison de la conjonction des grandes marées et d’une forte houle. » A la mi-février, on relevait déjà plus d’un mois et demi de précipitations sur le Finistère et le Morbihan et pour la seule journée de jeudi, il est tombé jusqu’à 40 mm sur la région de Quimper et ses cours d’eau déjà surchargés. Sur la pointe bretonne, cet hiver devrait donc se classer comme le plus arrosé depuis au moins 34 ans. En revanche, plus à l’est, les perturbations n’ont pas apporté beaucoup d’eau. En Ile-de-France, par exemple, on pourrait ne pas atteindre les normales de saison. « Les perturbations ont perdu une grande partie de leur activité après avoir traversé la partie ouest du pays », explique Pierre Huat.
La situation est encore plus inégale sur le sud-est où la région Paca et l'est du Languedoc ont connu des pluies exceptionnellement abondantes - Nice a déjà battu son record de pluviométrie hivernal avec 553 mm de précipitations entre le début de la saison et la mi-février - alors que le Roussillon connaît actuellement un déficit pluviométrique. « Cette situation s'explique par le creusement de plusieurs dépressions entre les Baléares et la Corse qui ont fait remonter de l'air doux humide et instable sur la région PACA tandis que de l'air beaucoup plus froid circulait en altitude », précise Pierre Huat. Le spécialiste météo souligne également la grande douceur apportée par ce flux d’ouest persistant. La Corse a ainsi largement battu son record de douceur pour un mois de février. Le mercure est passé au-dessus de la barre des 23°C ce dimanche alors que la valeur maximum jamais enregistrée (depuis le début des relevés) était jusque-là de 19.7°C, en 1980.