
L’expédition Nagalaqa imaginée par Sébastien Roubinet et soutenue par le Fonds Odysseus se gagne mètre par mètre. Avec ses deux comparses, Eric André et Jimmy Hery, l’aventurier est en train de réaliser un parcours exceptionnel.
Partis il y a un peu plus de deux mois de Sachs Harbour sur l’île de Banks, les trois hommes ouvrent une voie dans l’une des régions les plus reculées au monde. Dans des conditions extrêmes, alors que l’hiver est désormais en place, ils accomplissent jour après jour un exploit jamais mené en progressant à bord d’un catamaran / char à glace en autonomie totale.
Au cœur d’une nature faite de grands sommets, de glaces gelées, d’icebergs, ils progressent vers leur but souvent dans une brume épaisse et une lumière qui décroit jour après jour. Pour avancer, ils naviguent quand cela est possible grâce à la formation de cracs (voies d’eau libre au milieu de la glace ou le long de la côte) sinon, ils tirent et poussent leur embarcation pour franchir des terrains instables. Sébastien et ses équipiers doivent puiser dans leurs ressources et s’adapter constamment à un environnement extrême. Rien n’est prévisible… Il faut trouver le meilleur chemin souvent caché derrière des crêtes et par le brouillard. La progression est lente et difficile. Un message de Sébastien reçu ce matin décrit une partie du quotidien des trois hommes : « Nous avons décidé de quitter un peu la côte pour chercher des conditions de glace moins dures en sachant bien que le début n’allait pas être facile. Mais on n’avance pas trop mal : 8 km en 6 heures ».
Les visages usés du trio après ces deux mois d‘expédition témoignent de l’intensité de ce qu’ils sont en train de vivre. Malgré les difficultés, ils restent subjugués par le paysage qui les entoure et se réfugient dans les plaisirs extrêmes que leur procure leur avancée. Ainsi, ils viennent d’atteindre la terre la plus nord de leur parcours : Cap Columbia. Le point le plus septentrional du Canada situé sur l’île d’Ellesmere est déjà un premier exploit dans leur expédition. Le chemin qu’ils ont parcouru depuis l’île de Banks n’ayant jamais été tenté par un bateau à voile.
« Nous aurons foulé du pied le Cap Columbia » écrit encore Sébastien. Le cap a été gagné après 12 heures de travail enchainé et 10 kilomètres parcourus. Le trio a alors choisi de prendre le temps d’observer les vestiges des expéditions terrestres passées. « Nous avons découvert des cairns laissés là depuis des décennies. Quelques planches, des inscriptions et des messages d’anciens voyageurs venus ici. Une boîte militaire métallique d’un escadron d’hélicoptère avec plusieurs noms et messages à l’intérieur » décrit par message Sébastien. Un moment suspendu pour les trois hommes qui ont profité de leur montée sur la colline pour observer l’état des glaces à venir.
La prochaine étape de l’expédition se situe vers la base canadienne scientifique et militaire d’Alert. Direction le détroit de Nares, avant de pouvoir rallier l’un des villages de la côte ouest où prendra fin l’expédition. En autarcie complète, Sébastien Roubinet, Eric André et Jimmy Hery n’ont croisé aucune présence humaine depuis deux mois. « Nous profitons le long des côtes de la base des glaciers. Parfois, quelques lacs gelés nous permettent d’avancer plus facilement. Notre force est la seule énergie qui nous permette d’avancer quand le vent de nous aide pas. Nous en faisons l’économie quand le terrain qui s’annonce devant nous paraît être le mieux. Choisir le chemin le plus court mais le plus hasardeux ou le plus long mais le plus facile… C’est le choix auquel nous devons constamment faire face. Le paysage devant nous nous promet encore quelques efforts à fournir pour retrouver un peu d’eau libre et filer au vent » commente encore Sébastien.