
Les films nous montrent toujours des scènes de noyades impressionnantes dans d’immenses gerbes d’eau. Mais la réalité est beaucoup plus silencieuse.
La réalité des CRS ou des nageurs-sauveteurs de la SNSM installés sur les plages ressemble à la série Alerte à Malibu si on se réfère au grand nombre d’interventions. L’été dernier, les nageurs sauveteurs de la SNSM, installés sur 1/3 du littoral, ont effectué 2.070 interventions pour 2.087 personnes sauvées. Pour les coups de sifflets aussi, nécessaires pour rappeler le danger lorsque les drapeaux orange et rouges sont levés. Mais en revanche, les saisonniers rappellent qu’ils ne voient pas souvent les gerbes d’eau dégagées par les personnes en difficulté que nous avons l’habitude de voir sur nos petits-écrans.
La noyade, cette grande silencieuse
Les cris et les gestes des baigneurs qui s’épuisent, ou vont au-delà de leurs capacités techniques, ne durent pas longtemps. « Quand on repère un baigneur qui lève les bras pour appeler à l’aide, il est très urgent d’y aller, explique Michel Desmot, responsable des 19 nageurs-sauveteurs saisonniers des Sables d’Olonne. En effet, aussitôt après avoir levé les bras, la personne va commencer à bouchonner, c’est-à-dire à perdre ses appuis, car les membres émergés pèsent beaucoup plus lourd que le corps immergé. » Les bras vont jouer le rôle de poids et entraîner le nageur vers le fond. « Là, le baigneur va très rapidement boire la tasse, surtout si la surface est agitée par des vagues », alerte le sauveteur expérimenté. La plupart du temps, le baigneur en situation de noyade utilisera donc ses bras sous l’eau pour essayer de faire levier, comme l’a remarqué Mario Vittone, un ancien garde côte américain, dans un billet traduit par le médecin Guillaume Barucq.
Et les cris sont incompatibles avec la noyade car « le système respiratoire a été conçu pour la respiration, rappelle le sauveteur américain. La respiration doit être accomplie avant que la parole puisse se produire. » Il recommande donc d’être attentif à plusieurs signes comme par exemple le fait que le baigneur n’utilise pas ses jambes et se trouve à la verticale, essayant de monter une échelle invisible. Enfin, la grande majorité des noyades sur le littoral se produisent à la suite d’un malaise. « Il s’agit souvent de malaises bénins comme pour une hypoglycémie, explique Laurent Sagnimorte, en charge de 15 kilomètres de plage face à Montpellier. Mais la baignade aggrave tout de suite le tableau. »
Les 1.437 nageurs-sauveteurs de la SNSM, formés bénévolement chaque hiver et postés chaque été sur les littoraux, surveillent donc attentivement les effets aggravants comme les courants, baïnes ou les fortes houles. Sur les plages, ils alertent également les vacanciers sur le profil type du baigneur en difficulté: les cas de noyades concernent à 54% des nageurs de 45 ans et plus et majoritairement des hommes (67%). « Je n’ai eu qu’un seul cas de noyade enfantine en 43 ans de surveillance », assure Michel Desmot, encore marqué par le sort de cette petite fille.
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