Les déferlantes glissent, plongent ou gonflent

Par Eric Mas

 A chaque annonce de tempête ou d’arrivée de fortes houles, les spectateurs sont nombreux à se précipiter pour admirer le déchaînement des paquets de mer qui explosent sur les rivages. Il y a de la fascination à ressentir la puissance de ces vagues qui viennent se suicider sur nos côtes. D’autres sont mortes au large, loin des regards, mais celles-ci sont héroïques, celles qui viennent après une secrète épopée mourir à nos pieds.

Une vague a deux manières de terminer sa vie, soit d’épuisement, soit par accident.


D’épuisement bien sûr parce que le voyage fatigue et consomme son énergie. Si le vent vient à manquer pour l’alimenter, ou pire si elle rencontre un vent contraire qui la freine, la vague s’amortie jusqu’à disparaître.
L’accident c’est le déferlement.


Au large
, quand le vent est assez fort pour décapiter la crête d‘une vague, celle-ci, alors en pleine force de l’âge, s’en sort, généralement mutilée, diminuée, mais toujours alimentée et pouvant continuer sa route. En fait, la cambrure d’une vague, le rapport de sa hauteur sur sa longueur, devient précaire lorsque sa hauteur dépasse le 1/7ème de sa longueur. Ainsi une vague dont la hauteur atteint 3 m alors que  sa longueur n'est que de 20m s’écroule rapidement.


A la côte, par contre, la vague termine sa course à l’issue d’un long voyage en s’écrasant sur elle-même et c’est irrémédiablement la fin de vie. Quel que soit sa façon de percuter le dur, elle ne s’en relèvera pas.


Le déferlement est d’autant plus impressionnant que la vague est grande quand elle arrive. Mais la pente du plateau continental joue son rôle aussi. Plus cette pente est forte, plus le déferlement est puissant. Une vague n’est pas seulement une onde qui se propage à l'horizontale sur la surface de l’eau, elle est aussi construite à la verticale sur des oscillations. Les plongeurs qui sont parfois méchamment ballotés à 20 mètres sous la surface connaissent bien cette dimension de la houle. Et lorsque ces oscillations, qui se propagent d’autant plus en profondeur que la vague est grande, lorsque ces oscillations touchent le fond, c’est comme si la vague subissait un croche-pied et après avoir trébuché sur quelques longueurs, finissait par s’écrouler de tout son poids.


Il y a plusieurs façons de tomber, plus ou moins élégantes. Et l’on nomme ces figures de style en qualifiant le déferlement de glissant, plongeant, gonflant.
Il est glissant quand la crête va plus vite que la vague elle-même. On voit alors beaucoup d’écume au sommet. C’est le déferlement typique d’un rivage à faible pente.
Il est plongeant quand il forme, pour le plus grand plaisir des surfeurs, une arche ou même un tube formé par le jet d’eau qui se retourne. Typique des plages à pente moyenne, on comprend que cette déferlante est dépendante de la nature du sol à l’origine du croche-pied (vase, sable, rocher) et de la hauteur d’eau, donc de l’heure de la marée. Chaque spot a ainsi ses propres caractéristiques et offre ses plus beaux déferlements dans des conditions très spécifiques que le surfeur connaît sur le bout des doigts.
Il est gonflant quand la pente du sol est forte et que la vague rencontre le ressac qui s’éloigne de la plage en emportant l’eau des vagues précédentes. Très brutal, c’est un mur qui se présente face à vous, et quand il s’écroule, tout tombe d’un bloc.

 

Je comprends donc la perplexité des observateurs qui assistent à l’anéantissement des vagues à leurs pieds. On peut deviner le caractère de chacune. Avant d’en arriver là, elles pouvaient être plus ou moins longues, hautes, rapides. Toutes ces caractéristiques qui laissent imaginer le creux de la vague.

Et chacun pourra apprécier qu’être au creux de la vague ne veut pas forcément dire être dans une mauvaise situation psychologique. Si au large ce peut-être effectivement un coup de mou pour le skipper qui perd son vent quand il est dans un creux si profond que son mat ne dépasse plus les crêtes, à la côte le surfeur aura plutôt un coup d’adrénaline en regardant au-dessus de lui déferler la vague qu’il est venu chercher pour la dévaler.


Dans tous les cas on ne reste pas au creux de la vague.

L'équipe
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
Jean-Christophe Guillaumin
Jean-Christophe Guillaumin
Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
Charlotte Lacroix
Charlotte Lacroix
Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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METEO CONSULT est un bureau d'études météorologiques opérationnel, qui assiste ses clients depuis plus de 30 ans. Les services de METEO CONSULT reposent sur une équipe scientifique de haut niveau et des moyens techniques de pointe. Son expertise en météo marine est reconnue et ses prévisionnistes accompagnent les plaisanciers, les capitaines de port et les organisateurs de courses au large depuis ses origines : Route du Rhum, Transat en double, Solitaire du Figaro…