
Le champion Alain Gautier, skipper de Generali, est sur le point de terminer sa première étape de La Solitaire du Figaro - Eric Bompard Cachemire, de Deauville à Plymouth. Récit d'un retour très remarqué.
Il fut par cinq fois le benjamin de la Solitaire du Figaro, ayant même eu une dérogation en 1980 pour sa première qualification alors qu'il n'était pas majeur. À 52 ans, Alain Gautier, vainqueur de l'édition de 1989 et du Vendée Globe 2003, est ravi de participer pour la 15e fois à la course de son coeur. Celle ayant lancé sa carrière de marin du large. «Drôle d'idée? Mais non, quand on aime, on ne compte pas et on ne réfléchit pas. J'ai toujours su que je reviendrais un jour. J'ai décidé en 2004 d'arrêter de courir sur des gros bateaux, j'ai failli être présent sur la Solitaire en 2008 avec mon sponsor de l'époque, mais j'ai été embauché par Alinghi pour la Coupe de l'America.» Son savoir-faire en matière de multicoques ayant bien évidemment fait le tour de la planète lorsqu'il naviguait en trimaran 60 pieds Orma et ainsi aimanté l'appétit du challenger suisse. «J'ai donc laissé ma place à Nicolas Lunven pour deux saisons et il gagne en 2009. J'ai toujours suivi l'épreuve assidûment dans les journaux et sur Internet et, l'an dernier, je suis passé au départ de l'étape de Roscoff. J'y ai croisé Nicolas et je pense qu'il a eu un petit déclic. Il avait envie de faire une pause sur le circuit et m'a proposé en septembre dernier de prendre la barre de son Generali», explique le Vannetais. Un riche concours de circonstances: «C'était le plan parfait pour moi, et une belle histoire avec un de mes anciens partenaires avec qui je me suis toujours bien entendu. À l'époque, c'était avec une de ses filiales qui s'appelait Concorde. Le retour d'ascenseur est donc sympa. C'est une belle histoire humaine.»
"Je sais que je m'expose à une 25e place possible"
Generali célèbre bientôt ses 40 ans de sponsoring dans la voile. Le groupe d'assurances sait très bien qu'il ne va pas gagner la Solitaire du Figaro cette année, selon Alain Gautier: «En tout cas, les chances sont très faibles. C'est une Solitaire plutôt ardue. Je sais que je m'expose à une 25e place possible, le niveau étant très homogène. Sortir du lot est assez dur.» La chance a toujours été une muse pour lui sur la Solitaire. Avec envoûtement ou mauvais oeil: «2003 reste un bon souvenir parce que j'ai fait un très bon résultat. D'accord, je perds de 13 secondes derrière Armel Le Cléac'h, mais je ne m'attendais pas à être à pareille fête car je ne m'étais pratiquement pas entraîné. On naît tous avec un capital chance. J'ai eu la mienne en 1996 quand Nicolas Bérenger m'a récupéré en mer d'Irlande alors que j'étais tombé à l'eau une heure plus tôt. Mais en 1988, alors que je viens de gagner les trois premières étapes, je suis battu par Yvan Bourgnon sur un coup de mistoufle à l'arrivée à Quiberon.»
Cette 45e édition de la compétition reine des solitaires sera une fois de plus stimulante: «Il faut donc compter sur son talent, sa pêche, son envie. Avec pourquoi pas pour moi une 10e victoire d'étape (record détenu par Jean Le Cam, NDLR). Je connais la valeur sportive d'un tel résultat. Je me rappelle surtout d'une, en 1997, où je gagne celle de Kinsale après avoir passé le Fastnet avec deux secondes d'avance sur Franck Cammas et trois minutes sur Michel Desjoyeaux. Avec ainsi, sur les 50 derniers milles, un jeu de contrôle et de marquage sur ces deux lascars. Je souhaite donc pouvoir rendre de la même façon des copies propres», résume avec le sourire le fringuant cinquantenaire, surveillé de près par ses adversaires. Ses fulgurances sur l'eau les ayant souvent fait rêver.