Thomas Ruyant (LinkedOut) : le nordiste au grand coeur

Plus que jamais, Thomas Ruyant avance à pas comptés et mesurés dans une carrière de navigateur pourtant souvent faite de creux et de bosses. A l’enthousiasme et à l’inépuisable débauche d’énergie de ses premières navigations, le skipper de Dunkerque a allié la réflexion, l’astuce et le discernement, pour construire en une démarche toute personnelle un projet en capacité de jouer la victoire dans la plus belle, la plus majuscule des courses à la voile, le Vendée Globe. Souvenons-nous, le 21 décembre 2016 lors du précédent Vendée Globe, il mettait un terme, contraint et forcé, à sa première expérience sur ce tour du monde en solitaire, sans escale ni assistance, amarrant en Nouvelle Zélande son « Souffle du Nord » démantibulé, fracassé par un OFNI, mais héroïquement sauvé et ramené à bon port.
Une victoire plus tard, dans la transat en double AG2R La Mondiale aux côtés d’Adrien Hardy, Thomas posait avec un bel entêtement les jalons du seul projet tangible à ses yeux, celui de la construction d’une machine capable de l’aider à revenir sur cette épreuve majuscule avec des prétentions crédibles à la victoire. "Un pari culotté car je n’ai pas de plan B" affirmait le skipper de 39 ans. De ses belles victoires (Mini Transat, Route du Rhum en Class 40 notamment), nombreuses, de ses échecs, plus rares, il s’est forgé une méthode, basée sur l’exigence du résultat, fruit d’un pragmatisme bien nordique qui ne laisse aucune place à l’esbroufe. "Ruyant ne joue pas, Ruyant ne transige pas. Son rêve de Vendée Globe, c’est en survivant au Pacifique, à bord de son Imoca disloqué qu’il l’a imaginé voici quatre années déjà. Place à l’excellence, à la rigueur. L’ère nouvelle des bateaux qui volent ne laisse aucune place aux compromis et aux à peu près" explique son entourage dans un communiqué.
Pour sa seconde participation à l'Everest des mers, Thomas Ruyant dit qu'il "n’envisage plus son métier de marin qu’en terme de perfection". Avec le soutien indéfectible de la société d'Advens qui a gommé le "naming" du bateau au profit d'une noble cause, le skipper nordiste a l’ambition de gagner et de changer les comportements en matière d'inclusion avec son IMOCA baptisé "LinkedOut". Objectif avoué : retrouver un emploi à 80 personnes précaires.
Et côté sportif, l'ambition est tout aussi noble. Un stage d’entrainement organisé mi septembre au large de Port La Forêt en Bretagne a été, pour Thomas Ruyant et son équipe de TR Racing, l'occasion de tester dans des conditions de vent et de mer variées, la version 2 des foils destinés à équiper LinkedOut durant le Vendée Globe. "Le voilier démarre plus tôt son mode aérien, le conserve plus longtemps et ceci, dans les ranges de vent majoritairement attendu autour de la planète" confirme son équipe. "Nos nouveaux foils dénommés V.2 sont plus longs, plus épais mais aussi plus simples à construire que la première version" explique Antoine Koch, ingénieur naval, navigateur, impliqué au sein de TR Racing dans le développement des voiles et des appendices. "Ce deuxième jeu de foils était programmé dès le départ, car l’importance de ces appendices porteurs sur les Imoca dernière génération est telle, qu’il est inconcevable de ne pas disposer d’un jeu de rechange. Et quitte à construire un second jeu, autant l’optimiser en gommant les faiblesses de la version 1. Cette première version était performante à certains moments, mais « décrochait » beaucoup, c’est à dire que le bateau devenait instable, sujet à des arrêts buffets dans les vagues, créant un niveau d’exigence et d’inconfort difficile à supporter dans la durée. Notre seconde version nous fait incontestablement gagner en stabilité." Un bateau "foiler" de dernière génération qui permettra à Thomas Ruyant de rivaliser avec les meilleurs et oublier vite sa terrible déconvenue de l'édition 2016 du Vendée Globe !