L'Anglaise Dee Caffari, première femme à faire le tour du monde à la voile dans les deux sens, entraîne pour les deux années à venir de jeunes Omanaises qu'elle materne autant qu'elle les forme à la navigation.
Cette ancienne professeur de sports de 40 ans, titulaire d'un brevet de moniteur de voile, a mené son équipage amateur la semaine dernière sur la Mauritius Regatta, étape d'un défi qu'elle s'est lancée à Noël à Mascate.
"Mes filles ont entre 19 et 25 ans. Elles ont surtout navigué en solo sur des catégories notamment olympiques. Du coup, elles connaissent peu de choses. A bord, elles m'appellent 'coach'. Mais je suis aussi un peu leur maman parce qu'elles ont une expérience de vie comme si elles étaient âgées d'une quinzaine d'années", souligne Dee Caffari, sixième du Vendée Globe en 2009.
Membre de l'ordre de l'Empire Britannique, elle guide en anglais ses six fidèles aux cinq prières par jour, habillées de longues manches et de pantalons, fuyant les regards masculins, suant en silence sous leur voile durant toutes les manoeuvres et les sorties.
"Celles qui vivent à Mascate parlent bien l'anglais et acceptent parfois d'échanger leur voile contre une casquette", note Dee Caffari. "Les autres, venant de villages de pêcheurs et ne le parlant pas, me disent 'Yes, yes, yes' tout le temps et restent tout le temps voilées, parfois jusqu'au nez."
Il n'en va pas de même lorsqu'elles mettent pied à terre. Quand la nuit tombe, les voiles dévoilent de jolies jeunes femmes. Alors, les conversations se lient entre "nouvelles amies" venues de deux mondes.
A bord, ses jeunes navigatrices se montrent "volontaires, motivées, enthousiastes et disciplinées" mais doivent tout apprendre : se lever à la bonne heure, manger le bon repas à la bonne heure, délaisser leur traditionnel riz et poulet, impossibles à manger quand la coque gîte, pour un bon sandwich calant un peu mieux des ventres peu marins. Et dormir quand il le faut.
"Et puis surtout, il a fallu et il faut que j'explique régulièrement à leur père et à leurs frères ce que nous faisons, pourquoi nous le faisons", souligne Dee Caffari. "Sans leur compréhension et leur consentement, elles ne seraient pas restées", ajoute l'Anglaise lancée dans un des volets du vaste programme "Oman Sail" qui concerne au total 150 femmes de 18 à 35 ans.
Initié par le sultan, ce programme envoie les enfants d'Oman, jeunes ou adultes, découvrir les océans sur des bateaux de tout profil, aux proues plus ou moins conquérantes.
Après avoir récemment découvert le large sur un Farr 30 lors de la "Sailing Arabia The Tour" au milieu de huit équipages masculins, Dee Caffari avance "marche après marche dans tous les domaines" pour nouer la relation de confiance "avec elles et leur famille".
Après avoir participé au Spi Ouest France et au Grand Prix de l'Ecole Navale, Rajaa, Rajia, Ibtisam, Asrar, Tahira et Intesar prendront, du 03 au 09 juin, le départ de la Normandy Sailing Week au Havre.
Sur leur J80 baptisé Al Thuraya Bank Muscat et skippé par Rajaa Al Uwisi, elles seront pour l'occasion coachées par l'Anglaise Liz Rushall. Elle participeront ensuite, en juillet, aux championnats du monde des J80 à Marseille