IMOCA : des cockpits de plus en plus fermés

Par Figaronautisme.com / La Route du Rhum

Au niveau de l’ergonomie, chaque cockpit est unique, adapté aux envies et à la façon de naviguer des marins. En arpentant l’impressionnant ponton des IMOCA sur le village de la Route du Rhum – Destination Guadeloupe, qui réunit 38 unités mises à l’eau entre 2004 et 2022, on observe toutefois une tendance globale : les cockpits sont de plus en plus protégés. Certains sont même totalement fermés. « La notion de limite de l’être humain par rapport à la technique s’est renforcée, parce qu’avec du vent medium tu atteins des vitesses énormes, explique Louis Burton (Bureau Vallée). Cela veut dire que les paquets de mer arrivent sur le pont avec beaucoup de puissance. On peut faire de la veille visuelle depuis l’intérieur de nos cockpits car nous avons en plus des appareils pointus pour éviter les collisions, comme OSCAR et l’AIS. On a moins besoin d’être en veille dehors et de toutes façons tu ne peux plus. » Sam Davies (Initiatives-Cœur) apprécie plus ou moins cette évolution irréversible sur des foilers rapides et inconfortables. « Avant, on était trempés, on avait froid. C’est génial d’être si bien protégé mais j’ai un petit regret car on voit beaucoup moins de choses passer, les baleines par exemple. »

L’antre de Roura

Alan Roura (Hublot) navigue à bord de l’ex-Hugo Boss d’Alex Thomson, un bateau qui avait fait couler beaucoup d’encre au moment de sa mise à l’eau, en 2019, avec un cockpit très avancé et totalement fermé. « Je suis un adepte de ce concept, nous explique Alan Roura, dans son antre. On a perdu trop de temps, on aurait dû fermer les cockpits bien avant. Je n’aime pas être mouillé, je trouve qu’on navigue mieux quand on est à l’intérieur. On ne sent pas le vent, on tient de la toile plus tard, on bourrine plus. En termes de sécurité, tu dépasses les 30 nœuds de vitesse en claquant des doigts. Quand ça bastonne vraiment, je ferme toutes les trappes et je reste en short et t-shirt à l’intérieur. » Le navigateur suisse poursuit : « Contrairement à ce qu’on imagine, j’ai une bonne visibilité à l’intérieur. J’ai toujours un capot ouvert, sous le vent. Ça aère, j’ai besoin d’un peu d’air. Quand je ne manœuvre pas, je passe mon temps la tête dehors. Je vois le sillage du bateau, je vois les voiles. »

La cabane d'Herrmann

Boris Herrmann (Malizia – Seaexplorer) peut lui aussi totalement s’enfermer. « La partie avant du cockpit est inspirée d’Hublot. Mais je trouvais ce bateau un peu trop fermé, notamment au niveau de la vision sur l’arrière. L’espace de vie, bien que fermé, est spacieux et lumineux. C’est bon pour la vie à bord. Ce bateau a été conçu pour les tours du monde (The Ocean Race et le Vendée Globe, NDR), explique le skipper allemand. Nous avons une cabane qui ne prend pas toute la largeur du bateau, pour garder deux axes de vision vers l’arrière. » Kevin Escoffier (Holcim – PRB) a de son côté choisi une option intermédiaire avec un cockpit quasiment fermé avec deux petites ouvertures à l’arrière. Même logique globale du côté de Yannick Bestaven (Maître CoQ V), le vainqueur du Vendée Globe 2020-2021.

Des cockpits pour « rester connecté à l’océan »

Louis Burton fait partie des marins ayant besoin de « prendre l’air » un peu plus facilement. « Par rapport à ces bateaux fermés comme celui d’Alan Roura ou Kevin Escoffier, j’avais besoin d’un IMOCA où je peux facilement aller dehors, me mettre sur le côté pour contempler, profiter de la mer, souligne le Malouin d’adoption. Je peux complètement m’enfermer grâce à des bâches mais aussi très facilement sortir. La surface de la casquette est vitrée donc j'ai une bonne visibilité, et on y a ajouté une bulle thermoformée de chaque côté avec un siège baquet pour voir les voiles et surtout l'avant du bateau. Quand je suis à mon poste de veille j'ai tout sous la main. »

Plusieurs marins interrogés évoquent également cette volonté de ne pas s’enfermer, de rester en contact avec les éléments. C’est par exemple le cas de Damien Seguin (Groupe Apicil) qui navigue sur l’ex-Maître CoQ de Yannick Bestaven. « Mon cockpit reste un peu ouvert sur l’arrière et les côtés. J’aime bien ce côté protégé mais tout de même ouvert sur l’extérieur. Je fais partie de cette catégorie de marins qui ne veulent pas vivre enfermés dans un bateau, dit-il. Je ne veux pas passer mon temps à regarder des caméras pour voir comment les voiles sont réglées. J’ai besoin de sentir le vent, d’avoir cette sensation du vent sur le visage. C’est un bon compromis. Je ne dis pas que ceux qui ont totalement fermé leur cockpit font une erreur, cela leur convient certainement. »

Paul Meilhat (Biotherm) partage l’avis de Damien Seguin. « J’ai fait le choix de garder un cockpit ouvert à l’arrière pour voir mieux voir la mer. Je n’ai pas envie de naviguer dans un espace fermé, sauf quand il fait très mauvais. J’utilise alors un tissu souple pour m’abriter des éléments. Mais ma philosophie est de me connecter à l’océan, à l’environnement. Les caméras, ce n’est pas trop mon truc.» Sam Davies est en accord avec cette philosophie, elle qui dispose d’un cockpit offrant une belle visibilité vers l’avant et l’arrière. « Je suis peut-être un peu “old fashion” mais je ne pourrais pas naviguer dans un cockpit totalement fermé. C’est un choix individuel, peut-être que je le regretterai. »

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Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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METEO CONSULT est un bureau d'études météorologiques opérationnel, qui assiste ses clients depuis plus de 30 ans. Les services de METEO CONSULT reposent sur une équipe scientifique de haut niveau et des moyens techniques de pointe. Son expertise en météo marine est reconnue et ses prévisionnistes accompagnent les plaisanciers, les capitaines de port et les organisateurs de courses au large depuis ses origines : Route du Rhum, Transat en double, Solitaire du Figaro…