
Selon l’Institut de recherche de l’Aquarium de Monterey, près de 90 % des animaux vivant dans les grandes profondeurs marines sont capables de produire leur propre lumière. Ce phénomène, appelé bioluminescence, fascine les chercheurs depuis des décennies. Il s'agit d'une émission de lumière visible générée par une réaction chimique interne, sans chaleur, généralement grâce à une enzyme appelée luciférase et à un substrat, la luciférine.
Dans les abysses, là où la lumière du soleil ne pénètre plus, l’obscurité est quasi totale. Produire de la lumière devient alors une stratégie précieuse pour survivre. Méduses, poissons, calmars ou crevettes ont ainsi développé cette capacité à « s’illuminer », souvent de manière brève et ciblée, selon leurs besoins. Mais pourquoi précisément ?
Une lumière aux multiples usages
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la lumière ne sert pas à « voir » au sens classique du terme, mais plutôt à communiquer, se défendre, chasser ou se reproduire.
L’un des usages les plus fréquents de la bioluminescence est la défense. Lorsqu’un animal se sent menacé, il peut émettre un flash lumineux soudain. Cette lumière soudaine, dans un environnement par ailleurs parfaitement noir, peut désorienter ou effrayer un prédateur. Dans certains cas, elle agit comme un leurre ou un leurre inversé : en émettant un signal, l’animal détourne l’attention de son corps pour prendre la fuite. D’autres espèces libèrent carrément des nuages lumineux dans l’eau, comme une sorte d’encre phosphorescente.

Paradoxalement, cette lumière peut aussi avoir un effet dissuasif. Certains chercheurs avancent l’hypothèse que, dans les abysses, être lumineux peut envoyer un signal de danger : l’animal pourrait paraître toxique, urticant ou armé, même s’il ne l’est pas. Une forme de bluff naturel, en somme.
La bioluminescence est également un outil de chasse redoutable. Des poissons comme le célèbre poisson-lanterne possèdent un appendice lumineux au-dessus de la tête qui attire les proies, séduites par cette lueur mystérieuse au milieu des ténèbres. Dès que la proie s’approche, elle est happée.
Enfin, la lumière est aussi un moyen de communication entre individus d’une même espèce, notamment lors de la reproduction. Dans l’immensité noire des fonds marins, où il est difficile de repérer un congénère, produire une lumière distinctive permet d’attirer un partenaire ou de se faire reconnaître.
Une fonction encore pleine de mystères
Malgré les nombreuses études menées, les scientifiques n'ont pas encore percé tous les secrets de la bioluminescence. Pourquoi certaines espèces l'utilisent-elles dans certaines situations et pas dans d'autres ? Pourquoi certains animaux brillent en permanence alors que d'autres déclenchent la lumière uniquement sous la contrainte ? Les hypothèses sont nombreuses, mais les comportements observés varient d’une espèce à l’autre, et ne sont pas toujours prévisibles.

La bioluminescence est-elle dangereuse pour l’être humain ?
La lumière en elle-même n’est pas un signe de dangerosité. Certaines espèces bioluminescentes sont parfaitement inoffensives, voire comestibles. C’est le cas de nombreuses crevettes qui, une fois pêchées, continuent parfois à briller après cuisson si les bactéries responsables de cette luminescence ont survécu à la chaleur.
À l’inverse, certaines des méduses les plus dangereuses pour l’homme ne présentent aucune bioluminescence. Il n’existe donc aucune corrélation directe entre le fait de briller et celui d’être toxique ou venimeux. La bioluminescence est avant tout un outil d’adaptation à un environnement extrême, pas un indicateur de nocivité.