Pêcher dans les calanques de Marseille : ce que mai autorise, ce que la mer exige

Pêche en mer
Par Figaronautisme.com

Le matin monte doucement sur Callelongue. À bord de son petit bateau à moteur, Jean-Luc, pêcheur marseillais depuis toujours, lance sa ligne à l’entrée de la calanque de la Mounine. « En mai, la mer s’ouvre, mais pas partout. Faut savoir où on met l’hameçon… et ce qu’on a le droit d’y chercher. » Une phrase simple, mais qui résume bien la situation dans les calanques : zone protégée, fréquentée, convoitée… et surtout encadrée.

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Le matin monte doucement sur Callelongue. À bord de son petit bateau à moteur, Jean-Luc, pêcheur marseillais depuis toujours, lance sa ligne à l’entrée de la calanque de la Mounine. « En mai, la mer s’ouvre, mais pas partout. Faut savoir où on met l’hameçon… et ce qu’on a le droit d’y chercher. » Une phrase simple, mais qui résume bien la situation dans les calanques : zone protégée, fréquentée, convoitée… et surtout encadrée.

Au printemps, entre fraie des poissons, retour des plaisanciers et renforcement des contrôles, il ne suffit plus de savoir où pêcher. Il faut surtout savoir ce que la réglementation permet, et ce que la mer, elle, peut encore offrir.

Les calanques : un espace réglementé, pas un espace libre
Depuis 2012, les calanques de Marseille sont un Parc national - une singularité en Méditerranée occidentale. Avec 43 500 hectares de mer protégée, le Parc encadre strictement les usages, et la pêche de loisir n’y échappe pas.
Ce que beaucoup ignorent encore, c’est que dès le premier lancer de ligne, le plaisancier est considéré comme usager soumis à déclaration. Depuis 2021, l’enregistrement préalable est obligatoire sur le site du Parc national ou via l’application mobile dédiée.
Jean-Luc, lui, a appris à faire avec. « Avant, on partait, on pêchait, on revenait. Maintenant faut prévenir, peser, et parfois relâcher. Mais c’est pas plus mal. »

Le mois de mai est un moment charnière. D’un côté, la météo plus clémente attire les premiers navigateurs. De l’autre, de nombreuses espèces entrent en phase de reproduction : dorades, sars, rascasses ou labres se rapprochent des côtes pour frayer. Cette période est cruciale pour le renouvellement des populations, et les règles s’en ressentent.

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Dans l’ensemble du Parc :
o La pêche sous-marine est interdite dans toute la zone coeur.
o Les zones de non-prélèvement (ZNP) - comme Riou, l'île Plane ou le Mugel - sont fermées à toute forme de pêche, loisir comme professionnelle.
o Seules les lignes à main ou cannes sont autorisées. Les casiers, nasses, ou lignes de fond lourdes sont prohibés pour les plaisanciers.
o Trois hameçons maximum par ligne ; deux lignes par personne autorisées à bord.
o Limite de capture : 5 kg par jour et par pêcheur, tous poissons et céphalopodes confondus (hors espèces soumises à quota spécial comme le thon rouge).
Et surtout, les tailles minimales sont souvent plus élevées que les standards nationaux. En voici quelques exemples spécifiques au Parc :
Dorade royale : 23 cm
Sar : 22 cm
Pagre : 25 cm
Poulpe : 500 g minimum / 2 par jour
Jean-Luc, comme beaucoup d’habitués, garde un mètre ruban à portée de main. « On relâche. On revient demain. »

Des pratiques sous surveillance
À mesure que les beaux jours s’installent, les calanques attirent tous types d’usagers : kayakistes, apnéistes, baigneurs, plongeurs... et pêcheurs. Ce cocktail d’activités fragilise un écosystème déjà sous pression. Le Parc national et l’OFB renforcent donc les contrôles dès le mois de mai.
En 2024, plus de 450 inspections ont été menées en mer entre Marseille et Cassis. Résultat : une centaine de verbalisations pour pêche dans des ZNP, prises non conformes, ou matériel interdit.
Certaines erreurs viennent d’une méconnaissance sincère. D’autres d’une négligence volontaire. Les sanctions sont réelles : jusqu’à 1 500 € d’amende, et la saisie du matériel. Mieux vaut donc connaître sa zone et son droit avant de jeter l’ancre... ou la ligne.
« Le pire, c’est les ancres mal posées », lâche Jean-Luc, en montrant du doigt une zone d’herbier de posidonie déchiqueté. « Tu tires là-dedans, tu bousilles vingt ans de pousse. »
La posidonie - plante marine protégée, essentielle à la reproduction des poissons et au piégeage du carbone - est présente dans presque toutes les calanques. Depuis un arrêté préfectoral de 2021, l’ancrage y est interdit dans les zones couvertes. Le Parc met progressivement en place des bouées écologiques dans certaines criques (Port-Pin, Figuerolles), mais elles ne couvrent qu’une petite partie du territoire.
Le meilleur geste reste la prévention : consulter les cartes (Navionics, Donia, SHOM), éviter les zones d’herbiers, ou préférer des zones sableuses bien identifiées.

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Un équilibre fragile, à défendre
La pêche dans les calanques n’est pas une pratique à interdire, mais à transformer. C’est l’approche que défend le Parc national : plutôt que d’exclure, accompagner les usagers vers une pratique compatible avec la régénération du milieu. En 2025, de nouvelles initiatives verront le jour :
o Une application mobile unifiée, pour repérer en temps réel les ZNP, zones à éviter, et enregistrer ses prises.
o Une campagne de formation en ligne obligatoire envisagée pour 2026 pour tous les plaisanciers déclarés.
o Un programme d’observateurs volontaires à bord des bateaux pour aider au suivi des captures.

La ligne de Jean-Luc tire légèrement. Un sar, de belle taille. Il le mesure, l’observe, et le remet à l’eau. « Pas besoin de le manger pour l’avoir respecté », sourit-il.
Ce geste, anodin en apparence, est peut-être le plus essentiel aujourd’hui. Dans les calanques, pêcher n’est pas un droit illimité, mais un engagement à comprendre et à respecter la mer. Et au mois de mai, plus que jamais, la ligne est fine entre loisir et nuisance. Encore faut-il choisir de la tendre du bon côté.

Et avant de partir en mer, ayez les bons réflexes en consultant la météo sur METEO CONSULT Marine et en téléchargeant l'application mobile gratuite Bloc Marine.

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Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
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