
La Fédération française de voile a sondé sa communauté. Voici en exclusivité les résultats de cette étude et les premières solutions envisagées pour répondre à cette formidable envie de mer.
Au cours de l'été dernier, 3 500 français de 16 à 79 ans ont été interrogés sur leur appétence pour la voile, des licenciés tirés au sort dans la base de données de la fédération, mais aussi 2 500 anonymes. «Les chiffres des industries nautiques laissaient penser que de nombreux Français souhaitaient apprendre la voile sans forcément franchir les portes de nos écoles, mais nous n'avions pas de données précises à ce sujet», explique le président de la fédération, Jean-Pierre Champion. Le résultat de l'étude surprend: 12 millions de Français aimeraient bien grimper à bord d'un voilier pour apprendre à choquer les écoutes.
«Bien sûr, nous savons que toutes ces personnes ne débarqueront pas demain dans nos écoles, réagit Jean-Pierre Champion. Mais nous devons faire évoluer nos pratiques pour les séduire.» L'étude montre que d'anciens stagiaires en voile craignent de larguer les amarres seuls. La FFV envisage donc, dans ses premières réflexions, de proposer des offres individuelles, appelées «coaching», et non plus seulement des cours collectifs.
«Nous pensons aux propriétaires, qui veulent faire progresser leur pratique sans forcément retourner dans une école de voile, mais aussi aux locataires qui craignent un peu de s'éloigner des côtes», explique le président. Un objectif qui répond aussi aux observations de la Fédération des industries nautiques, qui regroupe les loueurs de bateau. Celle-ci s'inquiétait à la rentrée de la hausse du nombre d'incidents en mer, liée à la baisse du niveau des plaisanciers.
Mais ce changement de système ne se fera pas en un jour. Il nécessite une refonte en profondeur des écoles de voile, qui emploient 2 000 temps pleins et 4 000 saisonniers chaque année. «Les écoles sont en majorité tournées vers des cours collectifs d'une durée de cinq jours en moyenne, précise Jean-Pierre Champion. Nous devons libérer un certain nombre de nos moniteurs.» La FFV sait aussi que ce public potentiel ne frappe pas de lui-même à la porte des écoles de voile. «Il faudra donc aller vers eux pour leur proposer nos offres et pour qu'ils n'aient plus qu'à dire oui», explique le président. Enfin, pour ne pas laisser s'éloigner les anciens élèves, qui pratiquaient la compétition à l'adolescence mais ne disposent pas de leur propre bateau, la fédération envisage de nouvelles formules. Il s'agirait de mettre à leur disposition un voilier pendant deux ou trois jours, juste le temps de participer à une régate. «Ces jeunes de 25-35 ans ont souvent d'autres priorités dans la vie que de s'occuper de l'entretien d'un bateau», ajoute Jean-Pierre Champion.
L'étude réalisée en partenariat avec Repucom permet également à la Fédération française de voile de proposer des données fiables aux potentiels sponsors. «Pas juste les rêves du président», complète Jean-Pierre Champion. Un avantage non négligeable en cette période de crise économique. «Je ne dirais pas que les sponsors sont plus rares, mais ils ne peuvent plus se décider sur un simple coup de coeur, précise-t-il. Nous devons leur apporter un bénéfice financier et leur présenter une zone de chalandise.»
Le président de la fédération sait qu'il peut compter sur un sport avec des valeurs fortes. «Nous n'avons pas connu de scandale financier et nos sportifs véhiculent une image intellectuelle - avec souvent un CV d'ingénieur - une solidarité forte et une dimension de transmission très intéressante pour les entreprises. Et c'est un sport beau à regarder! Il suffit de penser aux régates de voiliers classiques à Cannes ou Saint-Tropez par exemple.» Le coeur de la communauté de la voile, les pratiquants, est composé sans surprise d'un public plutôt masculin et CSP +. Mais la communauté voile s'élargit considérablement lorsque l'on pense au public de la course au large. La FFV sait désormais que 26 millions de Français consomment la voile dans les médias avec un comportement de surconsommation et une appétence pour le digital très supérieure à la moyenne des Français. Onze millions de Français se déplacent régulièrement aux départs des courses. Les deux événements les plus suivis restent le Vendée Globe et la Route du rhum, qui partira de Saint-Malo le 2 novembre 2014 pour sa 10e édition.
Portrait de la communauté voile avec Repucom
L'étude menée par Repucom pour la FFV a permis à la fédération de se réapproprier son offre marketing. "Ce qui est intéressant c'est qu'il s'agit d'une étude orientée solution", insiste Bruno Lalande, directeur de la stratégie pour Répucom. L'étude permet de dresser le portrait des licenciés mais aussi de la communauté voile au sens large, qui se masse sur les quais aux départs des courses ou qui suit François Gabart sur Twitter. Le sport qui est le plus éloigné des préoccupations des amateurs de voile est le football tandis que ceux qui sont le plus appréciés sont l'équitation, le golf, le ski ou la boxe. "Des sports dits historiques", précise Bruno Lalande. "La voile resssemble au ski ou au golf mais elle a l'avantage d'avoir une élasticité plus forte avec un large public". 32 millions des Français âgés de 16 ans et plus s'intéressent à la voile. 62% des Français déclarent de l'intérêt pour 20 grands événements français avec deux courses loin devant, le Vendée Globe et la Route du rhum, et la Route des Princes, beaucoup plus récente, en queue de peloton. "Pour les sponsors, la FFV est un point d'entrée pour pouvoir être en contact avec un public masculin et CSP +, quand on pense aux licenciés, mais avec une élasticité forte pour toucher l'ensemble des Français", précise Bruno Lalande. Les amateurs de voile se distinguent également par leur appétence pour le digital. "Nous l'avons remarqué lors de la mise en place de la déclaration en ligne des accidents, remarque Jean-Pierre Champion, président de la FFV. Une société d'assurances nous avait prévenu: "vous pouvez mettre en place la télédéclaration mais nous avons rarement plus de 10% du public qui profite de cet outil. " Pourtant, au bout de trois ans, 80% des déclarations étaient réalisées en ligne !" Sur Twitter, les passionnés de voile ont ainsi créé leur propre nom: Twailor. Enfin, l'étude réalisée avec Repucom montre que la communauté voile entretient des liens forts avec le cinéma. Une bonne nouvelle pour En Solitaire de Christophe Offenstein, actuellement en salle.
La voile olympique cherche son public
L’étude réalisée avec Repucom montre que la course au large domine fortement les épreuves de voile légère. « Lorsque j’ai participé à la Solitaire, j’ai connu un soutien du public impressionnant, nous confiait ainsi Claire Pruvot à l’issue de sa première saison en Figaro. Je n’avais rien connu de tel au moment des jeux olympiques de Londres ! » Jean-Pierre Champion espère que l’étude permettra de faire évoluer le rapport au public lors des épreuves de voile olympique. « Si la course au large fonctionne si bien, explique-t-il. C’est parce que les bateaux et les skippers sont très accessibles. » Le président de la FFV aimerait donc développer les présentations de bateaux en voile légère. « Nous pourrions aussi rapprocher les épreuves des côtes, placer des caméras à bord et présenter les trajectoires au public », explique-t-il.