Les frissons de l'Arctique à la rame

Par Figaro Nautisme

Après 50 jours d'expédition, Charles Hedrich a passé la frontière entre l'Alaska et le Canada. Il souhaite devenir le premier rameur à franchir le passage du Nord-Ouest et doit pour cela arriver au Groenland avant le retour des glaces à l'automne

Difficile de passer à côté du moral d'acier de Charles Hedrich, toujours enthousiaste et souriant lorsqu'il raconte ses aventures. Mais au détour d'une phrase, il concède ses difficultés sur une côte inhospitalière à la météo imprévisible. Il l'assure, son été dans les glaces lui a réservé de belles surprises, mais pas sans frissons.

 

Chair de poule en Arctique

 

L'avantage de la rame, c'est que l'embarcation silencieuse n'effraie pas les habitants sauvages des lieux. Charles Hedrich a déjà croisé des troupeaux de rennes, des orques, des bélougas... "C'est hallucinant tout ce qu'on peut voir ! se réjouit le rameur. En voilier, on est davantage pris par le fonctionnement du navire." Le rameur offre également l'opportunité d'effleurer l'eau, à hauteur des mammifères en baignade."Je me souviens d'une rencontre marquante, un jour où la mer était d'huile, nous confie-t-il. Tout était paisible lorsque soudain, une baleine est sortie de l'eau, la tête en l'air, à toucher le bateau. Etait-ce de la curiosité ?" Charles Hedrich se rappelle qu'il pouvait sentir le souffle de ces géantes qui l'entouraient de si près. "Les animaux viennent vers moi, explique-t-il. J'ai ainsi croisé deux énormes morses sur leur bout de glace. Ils me regardaient passer, tranquillement." Un peu plus loin, dans les lagunes, le rameur a également fait face à l'une de ses rares peurs: l'ours blanc. "J'évoluais dans une passe de 80 kilomètres de long avec quelques centimètres de chaque côté du rameur, une seule entrée et une seule sortie, sans beaucoup de visibilité" explique-t-il. Mais à l'unique sortie, une quinzaine d'ours blancs faisaient le guet de chaque côté de la passe. "Je crois qu'il y a beaucoup de phoques qui passent par là ! " Heureusement, les immenses prédateurs ont préféré attendre leurs proies habituelles.   

 

Météo capricieuse et sueurs froides

 

"On s'arrache les cheveux avec Michel Meulnet, mon routeur, avoue Charles Hedrich par téléphone satellite. La météo est totalement ingérable. Je pense qu'il y a énormément de vents thermiques, liés à la banquise et donc aux variations de température." Après son premier mois de glace, l'aventurier nous confiait qu'il avait l'impression que la météo devenait plus fiable en arrivant dans une zone moins chargée en glace ." Alors quand il y a un coup de vent qu'on a pas vu venir... Je fais avec !" Mais Charles Hedrich sait qu'un gros coup de vent dans une zone chargée en glaces est un danger absolu. "C'est comme des blocs de ciment qui se percutent les uns les autres", précise-t-il en expliquant se sentir donc plus à l'abri dans la lagune. " Je suis toujours étonné de la vitesse à laquelle la glace évolue en mer, poursuit-il. Lors d'un stand-by sur une plage, j'ai vu de la glace partout à minuit. Je me souviens de l'heure car je passais un coup de fil à ce moment-là. Pourtant, quand je suis parti à 10 heures, le passage était relativement dégagé." L'Arctique est une terre de surprises.

 

L'horloge tourne

 

Charles Hedrich doit terminer son périple avant le retour des glaces de l'automne. "On regarde les dates limites pour la fin de l'expédition avec mon routeur Michel Meulnet, explique-t-il. La débâcle était tardive en début d'été donc peut-être que le retour de la banquise arrivera plus tard également. Elle peut se reformer le 20 septembre comme le 15 octobre, c'est très aléatoire. Au pire, je ferai un hivernage... Enfin, je veux dire que mon bateau restera seul en hivernage." Aventurier jusqu'au bout, Charles Hedrich précise toutefois qu'il pourrait rester en Arctique pour passer l'hiver. "C'est faisable, tout est possible. Mais cela tournerait au délire ! " Il reste donc concentré pour avancer le plus possible à l'est et peut déjà se réjouir d'avoir été le premier rameur solo à rallier Wales, Detroit de Béring, à Kaktovik en mer de Beaufort, soit toute la côte du North Slope Borough.

 

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Nathalie Moreau
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Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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