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La décision surprend : le champion de France bizuth de la course au large en solitaire décide d’arrêter la compétition. Le jeune figariste assume cette décision mûrement réfléchie.
Thomas Normand navigue depuis l’âge de 9 ans. « J'ai passé 17 ans à naviguer entre 150 à 180 jours par an », observe-t-il. Ces deux dernières années, il a enchaîné les très bons résultats, fruits de ces années de sacrifice : en 2011, il remporte le classement général en mini avant de passer en Figaro pour arriver en tête du classement bizuth de la Solitaire du Figaro 2012. C’est justement avant le départ de cette course que Thomas Normand a commencé à réfléchir à une nouvelle carrière. « La Financière de l’Echiquier m’a annoncé qu’elle souhaitait mettre un terme à notre partenariat, se rappelle le jeune skipper. Je suis donc parti en mer avec ce vide pour l’année à venir et en mer on cogite beaucoup. Comme la nature n’aime pas le vide, j’ai décidé de le combler. » Thomas Normand souhaite s’appuyer sur son expérience et sur ses études en management pour continuer à travailler dans l’univers de la course au large, à terre. Il admet que le retrait de son sponsor a joué un rôle dans sa décision, ainsi que le contexte économique difficile. « Mais j’imagine que cette situation est temporaire, l’intérêt pour la voile est toujours là, ajoute-t-il. Au niveau financier, j’aurais aussi pu m’appuyer sur la dizaine de partenaires qui complétaient mon sponsoring mais j’ai choisi de tourner la page de la course au large. »
Trop de sacrifices
« Quelque part, j’aurais bien continué, concède Thomas Normand. L’exemple de Yann Elies qui décroche la victoire en Solitaire du Figaro lors de sa treizième participation donne envie de travailler pour, mais je ne me voyais pas consacrer 10 à 15 ans de vie à un même support. Et, à part quelques exceptions, c’est ce qu’il faut pour gagner. Et c’est aussi ce qui rend encore plus belle la victoire de Yann Elies. » Thomas Normand répète que cette décision a été dure à prendre : « C’est un virage à 90°C mais c’est un virage mûrement réfléchi, je le ressens au plus profond de moi et il faut aussi savoir s’écouter », insiste-t-il. Le navigateur, jeune marié, n’a pas souhaité impliquer ses proches dans sa décision. « Je voulais que cette décision vienne de moi pour ne pas regretter dans dix ans en me disant que j’avais toutes les billes en main pour réussir, précise-t-il. Quand j’ai annoncé la nouvelle à mes proches, ils ont tout de suite bien réagi car ils connaissent les concessions que j’ai dû faire jusque-là. »
Aujourd’hui, Thomas Normand prépare son année 2013 au sein de l’écurie de course Absolute Dreamer qui porte le projet de Jean-Pierre Dick sur le Vendée Globe. Est-ce que le suivi de cette course lui a donné des regrets ? « Au contraire !, lance-t-il aussitôt. Je suis assez rassuré de ne pas être à leur place. Quand on a Jean-Pierre au téléphone le matin, le bruit derrière-lui est hallucinant. En Figaro, au bout de trois fois trois jours de course, nous avons les jambes en coton. Eux, sur le Vendée, ce sont des surhommes. » Thomas Normand est admiratif des coureurs du Vendée Globe mais il connaît aussi les sacrifices qu’ils ont accepté pendant des années pour prendre le départ et réussir cette course. « Ces moment-là sont magiques mais ils ont un prix. Ils demandent beaucoup de concessions dans la vie personnelle, des sacrifices physiques et des prises de risque. » Thomas Normand ressent d’autant plus ces sacrifices pendant les fêtes de fin d’année, alors que les concurrents sont seuls à lutter sur les mers du sud et que lui peut profiter de sa famille. Un retour en course au large dans quelques années n’est pas non plus au programme : « Il ne faut jamais dire jamais mais j’ai pris cette décision en me préparant à ne plus jamais recourir. » A la fin du mois de janvier, Thomas Normand sera en mesure d’annoncer ses prochains projets de terrien.
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