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Bernard Stamm attend la décision définitive du jury sur sa disqualification pour assistance extérieure. Le concurrent s’était amarré à un navire scientifique russe, alors qu’il partait à la dérive pendant les réparations de ses hydrogénérateurs. Un marin était monté à bord, de son propre chef, pour l’aider à relever l’ancre. Dans l’attente du retour du jury après la réouverture du dossier demandée par Bernard Stamm, une partie de la communauté maritime s’interroge sur les modalités de jugement.
Marc Guillemot
Le concurrent malheureux du Vendée Globe, ne souhaite pas accabler le jury, « les personnes qui le composent sont intègres et indépendantes » mais questionne : « Est-ce qu'un règlement, aussi carré et rigide soit-il, ne peut laisser un peu de souplesse compte tenu des éléments connus ? On connaît l'intégrité de Bernard, on a pu le vérifier une nouvelle fois dans ses commentaires. J'ai vraiment le sentiment qu'il a subi les événements avec une priorité, celle de préserver son bateau et l'obstacle qui s'est invité derrière lui dans l'axe du vent. La décision a été annoncée brutalement, est ce qu'un temps de réflexion complémentaire aurait été superflu? Je pense que non. Cela aurait peut-être permis d'écouter ceux qui, dans des conditions similaires, ont dû faire escale sur le Vendée. Le retour d'expérience des uns ou des autres aurait pu enrichir la réflexion du comité, du jury. » Marc Guillemot ajoute : « Lors d'une telle annonce, il faut penser à celui qui est encore en mer au milieu du Pacifique. Quel est son état d'esprit, sa fatigue? Le cas à juger a certainement été un vrai casse-tête pour le jury, j'aurais souhaité qu'intervienne dans ce comité, pour ce cas précis, l'avis de marins expérimentés. La décision est si lourde de conséquences pour le skipper visé, si lourde à porter pour ceux qui la prennent, qu'il me parait justifié de la partager. »
Jean-Luc Van Den Heede
Le navigateur (Vendée Globe 89/90 et 92/93) ajoute : « A l'heure des téléphones satellites, je m'étonne que le jury n'ai pas conversé (comme habituellement dans les compétitions de voile) en direct avec Bernard et ne se base que sur un rapport écrit dans l'urgence et dans des conditions pas faciles. »
Kito de Pavant
Victime d’une avarie sur ce Vendée Globe, le skipper de Groupe Bel s’interroge : « Je constate que, le même jury (à quelques têtes près) avait, 4 ans auparavant, classé un concurrent qui n'est jamais arrivé aux Sables ou d'autres, arrivés sans quille, donc pas forcement conformes aux règles de la jauge IMOCA. »
Thomas Coville
La première réflexion qui me vient est : l'arbitre a toujours raison ! Cependant, je pense que le jury n'avait pas forcément besoin de se précipiter pour prendre sa décision. Tout le contexte de l'histoire est suffisamment flou pour prendre le temps de la réflexion. Quitte à infliger une pénalité à l'arrivée, en laissant le marin finir son tour du monde en course. (...)
On essaie de garder cette fumée pour le grand public, de faire croire qu'il n'y a pas d'assistance. Effectivement, il n'y a pas le droit de se faire aider pour la météo. En revanche, le coaching et l'assistance mentale existent, ne serait-ce que quand vos proches vous encouragent à ne rien lâcher, à vous battre. Elle n'est pas négative, elle fait partie intégrante de cette course et de sa magie. On peut définir l'aide de plein de façons et en l'espèce, je pense que Bernard n'en a pas reçu. Mais l'arbitre a toujours raison..."
Jacques Caraës (navigateur et directeur de course)
Les deux protagonistes ont agi avec le sens marin, le marin du caboteur russe et Bernard Stamm.
Comment le marin russe aurait-il pu imaginer qu'un texte interdise d'aider à la sauvegarde du bateau de Bernard alors que la solidarité et l'assistance à personne en danger sont les premiers principes maritimes (Ripam) ? Dans l'urgence, comment Bernard aurait-il pu expliquer un article interne au règlement du Vendée Globe à un marin qui ne parle pas sa langue ?
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