
De Madère, où navigue Fabrice Amedeo, au Pot au Noir, abordé par la tête de course, la cohorte du Vendée Globe s’étire sur une immense file de 1600 milles (2900 km). Presque toute la flotte est entrée dans la bande d’alizés et profite au portant de vitesses élevées. Presque : ce petit mot qui fait toute la différence… Dans l’Ouest des Canaries, cinq concurrents poursuivent leur épreuve de patience dans les calmes.
Comme des fleurs dans le pot ?
En fin de matinée, l’homme de Gosport – le lieu de résidence d’Alex Thomson, dans le sud de l’Angleterre – a fait le premier son entrée dans la zone de convergence intertropicale, plus communément appelée Pot au Noir. Cette étendue maritime qui sépare les deux hémisphères, est une frontière où entrent en collision les alizés de Nord-Est et ceux de Sud-Est. Une zone hasardeuse parsemée de nuages, de grains et parfois d’orages, où le vent peut varier de 50 degrés en l’espace de quelques minutes. « Ce n’est pas qu’une transition entre deux vents, c’est aussi une transition entre deux mers » précisent Sébastien Josse et Christian Dumard, les consultants météo du Vendée Globe. Le terrain sera donc cabossé. Les vitesses seront plus erratiques et les trajectoires moins lisses. Pour s’en sortir, il y a une recette magique : traverser perpendiculairement cette large bande de 300 milles et… garder son calme. « Chaque mètre gagné vers le Sud est un mètre gagné vers la sortie du tunnel » poursuit Sébastien Josse.
HUGO BOSS, LinkedOut, Yes We Cam ! et Apivia ont commencé à ralentir à la mi-journée et s’apprêtaient à aborder ce no man’s land météorologique. Si tout va bien, ils devraient sortir du marasme demain mercredi, au prix, certainement, de quelques efforts. Toutefois, le Pot au Noir semble montrer cette année un visage conciliant. Les concurrents de tête pourraient donc passer comme des fleurs.
Troussel abattu
Nicolas Troussel aurait bien aimé, lui aussi, partager avec ses camarades ses inquiétudes pour le franchissement du « Pot ». Le sort et la mécanique en ont décidé autrement.
Le visage fatigué, les yeux gonflés après des heures de boulot sur le pont pour dégager le gréement du bateau qui menaçait d’abîmer les foils, Nicolas Troussel s’est exprimé ce matin : « ce n’est pas mon premier abandon sur une course. Mais c’est dur. J’ai surtout des pensées pour les gens qui ont travaillé m’ont soutenu et qui ont fait que ce projet existe. Ce sera long à digérer ». Le double vainqueur de la Solitaire du Figaro fait route au moteur à petite vitesse vers Saint Vincent, au Cap Vert, où son équipe technique l’attend. CORUM L’Epargne est donc le premier bateau à se retirer de la course.
Beyou combattant
Plus chanceux, Jérémie Beyou, a désormais les moyens de repartir pour un challenge qui sera bien différent de ses aspirations de victoire. A 15h15, il quittait les pontons des Sables d’Olonne. Avant de repasser la ligne de départ aux alentours de 16h30 / 17h00 (en passant à tribord la cardinale Nouch Sud), la volonté du skipper et de son équipe était de tester, pendant une heure au moins, la bonne tenue des réparations effectuées ces dernières 48 heures. Charal repart avec un hémisphère de retard sur la tête de course. Du jamais vu sur le Vendée Globe. Les conditions météo qu’il va rencontrer dans sa descente de l’Atlantique Nord seront relativement favorables après la traversée d’un premier front mercredi en milieu de journée.