Class40 – Victoire et quelle démonstration de Yoann Richomme !
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En 14 jours 03 heures et 08 minutes et 40 secondes (avant jury), Yoann Richomme remporte une victoire éclatante et établit un nouveau temps de référence en Class40. Mais au-delà du résultat le skipper de Paprec-Arkéa a semblé littéralement marcher sur l’eau, que dis-je, voler sur l’eau plutôt, traversant la flotte du dernier au premier après un départ catastrophique.
Car qui aurait parié sur la victoire du grand Yoann au niveau du Cap Fréhel ? Pas grand monde et même pas lui peut-être. A la tombée de cette première nuit en course, le skipper de Paprec Arkéa décide en effet de réparer immédiatement la faute commise lors d’un départ qu’il a anticipé de quelques secondes, trop empressé de devancer ses 54 concurrents sur la route de la Guadeloupe. La pénalité consiste en un arrêt de 4 heures que la stratège choisit d’opérer alors que le courant contraire et le vent faiblissant ralentissent la flotte des Class40. Néanmoins, lorsque peu avant 22 heures, et donc après seulement 8 heures de course, il reprend sa route, il est 52ème et compte 26 milles de retard sur les leaders. C’est à la fois peu et beaucoup pour celui qui, avant le départ, avouait sans fard vouloir jouer le podium. Son avenir étant assuré avec la construction en cours d’un Imoca pour le prochain Vendée Globe, il n’a pas la pression du lendemain qu’il avait il y a quatre ans. S’il a mis à l’eau tardivement, le 7 juillet seulement, le Class40 construit spécifiquement pour défendre son titre, il sait que ce Lift V2, un plan Lombard, est particulièrement performant. Il est en effet identique au Queguiner-Innoveo de son compère Corentin Douguet avec qui il a partagé la préparation, quelques courses et toutes les informations…jusqu’au coup de canon du départ à partir duquel c’est chacun pour soi !
A la pointe Bretagne il est encore 37ème mais il a réduit l’écart de moitié. Il va alors réaliser une traversée du Golfe de Gascogne express. Sans option extrême, juste en vitesse pure, dur au mal au près dans la brise, son bateau tient le choc et Yoann passe. Derrière le premier front, au large du Cap Finistère, il pointe déjà à la quatrième place et ne compte plus que 10 milles de retard sur l’ami Douguet. Deux jours plus tard, le 14 novembre, il s’empare de la première place à l’approche des Açores et il ne la lâchera plus. Barrant peu, voire pas du tout, faisant toute confiance au pilote automatique dont il aime peaufiner les réglages, Yoann reste le plus souvent à l’intérieur, calé dans ce siège baquet qui l’empêche de voler à travers un bateau transformé en cheval fougueux à haute vitesse dans une mer formée. Là, l’architecte naval de formation, peut se concentrer sur l’analyse météo et la stratégie face à ses concurrents. Le double vainqueur de la Solitaire du Figaro (2016 et 2019) pourrait bien arriver en Guadeloupe aussi pâle qu’il était au départ de Saint-Malo.
Depuis un certain Michel Desjoyeaux sur un Vendée Globe 2008-2009 d’anthologie, on ne se souvient pas avoir vu un coureur remonter toute une flotte aussi relevée pour s’imposer sans débat à l’arrivée. Vitesse, stratégie, fiabilité, Yoann Richomme a coché toutes les cases sur cette Route du Rhum – Destination Guadeloupe 2022, et sa victoire est donc amplement méritée. Ses congénères de la Class40 ne vont pas regretter de le voir partir, même si son bateau bien né est déjà vendu à un coureur de talent, non encore dévoilé. Si l’année 2022 se termine par une victoire historique pour Yoann, le début d’année 2023 s’annonce très bien également avec la mise à l’eau dès janvier de son soixante pieds. Et s’il affiche en Imoca la même insolente facilité qu’en Class40, ce sont ses nouveaux adversaires qui ont du souci à se faire.