Transat Jacques Vabre 2023 : une course en deux étapes pour les Class40

Par Figaronautisme.com

Au briefing ce matin, Francis Le Goff, directeur de course, a précisé toutes les modalités techniques du départ, un départ confirmé pour demain dimanche aux 95 équipages des quatre classes de la Transat Jacques Vabre Normandie Le Havre. Cependant, compte-tenu de la violence de la dépression attendue sur le golfe de Gascogne mardi et mercredi prochain, il a été décidé que les Class40 disputeront la course vers Fort-de-France en deux étapes avec une escale à Lorient.

Le grand amphithéâtre des docks du Havre était baigné de lumière ce matin, mais le briefing avait la solennité des éditions corsées de la Route du café. Le millésime 2023 aura manifestement cette teneur si l’on en croit les fichiers météo détaillés par Christian Dumard. Les modèles divergent encore un peu quant à la force des rafales et le timing de passage des fronts, mais le scénario global est le suivant :

- Le départ dimanche sera donné dans des conditions toniques mais maniables, avec 20 à 25 noeuds de sud-ouest, des conditions qui restent assez stables pour la nuit et la journée du lundi sur l’entame de cette Transat Jacques Vabre Normandie Le Havre,.

- La mer est encore forte avec 4 mètres de vagues au passage de Ouessant pour les ULTIM dans la nuit de dimanche à lundi mais elle décroît progressivement au passage des premiers Ocean Fifty et IMOCA dans la nuit et lundi matin.

- L’arrivée d’une seconde dépression très creuse balaye l’Atlantique à partir de mardi 31 octobre, avec un centre à moins de 980 hPa. S’il n’y a pas plus de 4 mètres prévues sur la journée de lundi, les conditions deviennent dantesques à la latitude du cap Finisterre la journée du 2 novembre « avec 8 mètres de vague, des vents de plus de 40 noeuds, auxquels s’ajoute la compression du cap Finisterre qui provoque toujours une accélération », détaille Christian Dumard.

Pour les classes les plus rapides, il faudra être dans le bon tempo mais l’évitement du phénomène est possible. « La diminution du parcours côtier annoncée hier a été pensée dans ce sens précise Francis Le Goff, mais chaque concurrent aura à arbitrer en fonction de sa vitesse et du timing d’arrivée de la dépression. Il ne manque pas de ports sur la route pour temporiser …»

Escale à Lorient La Base pour les Class40

En revanche, les Class40 se retrouvent dans une situation de blocage sans échappatoire possible. Et lorsque le directeur de course annonçait en deuxième partie de briefing aux 44 équipages retenus dans l’amphithéâtre des Docks qu’ils disputeraient la Transat Jacques Vabre Normandie Le Havre en deux étapes, la salve d’applaudissements ne laissait aucun doute sur le fait que chacun avait anticipé le phénomène. « Une ligne d’arrivée sera mise en place à Lorient et nous organiserons un second départ lorsque la situation météo permettra de naviguer en sécurité vers Fort-de-France, précisait le directeur de course. Le départ de cette deuxième étape sera donnée en flotte et le classement établi l’arrivée en Martinique à la somme des temps des deux étapes ».

Sécurité mais équité sportive, cette sage décision a néanmoins nécessité de réagir très rapidement pour l’organisateur de la Route du café comme l’expliquait en sortie de briefing Gildas Gautier, co-directeur général de l’évènement : « Lorsque nous avons évoqué cette hypothèse avec la SELLOR (ports de Lorient NDR), ce matin, elle nous a répondu immédiatement qu’elle mettrait tout en oeuvre pour accueillir l’ensemble des 44 Class40 en toute sécurité. Cet accord était un pré-requis pour repenser le parcours des Class 40. Tous les concurrents auront une place réservée à Lorient La Base et nous tenons à remercier chaleureusement les ports de Lorient pour leur accompagnement ».

Les mots des marins à la sortie du briefing :

Erwan Le Roux (Koesio), Ocean Fifty

« On ne part jamais dans ces conditions la fleur au fusil, et sans appréhensions. On part quand même à la guerre, sans préchauffage, direct à 1800 tours. Il va falloir gérer l’énergie, la fatigue, le mal de mer. La première problématique sera de ne pas abîmer le bateau pour sortir du port. Ensuite à nous de bien naviguer pour garder le bateau dans son intégrité, pour pouvoir jouer jusqu’au bout.La première nuit sera un peu dictée par la dépression, et le vent de nord-ouest qui arrive. On aura un virement au niveau des Scilly, globalement assez ouest. Ce qui va être déterminant, c’est le passage de la deuxième dépression où là il faudra potentiellement descendre plus sud avant de virer pour s’éloigner, du cœur de la mer et du vent, au niveau du cap Finisterre. Vivement mercredi quand on aura entamé la descente ! »

Ambrogio Beccaria (Alla Grande Pirelli), Class40 : «  Je ne ressens ni soulagement, ni sentiment de frustration. On était prêt pour y aller, même si c’est une décision très sage pour l’ensemble de la flotte, qui évite de mettre en danger les bateaux le plus lents des Class40. C’est une façon assez intelligente de garder la course intacte. On va donc débuter par un grand warm-up, on est chauds ! »

Nicolas Andrieu (Alla Grande Pirelli), Class40 : «  Cela change pas mal de choses, à commencer par le parcours qui va être beaucoup plus côtier, ainsi que l’intensité qu’on va y mettre. Il va falloir tout donner sur 36 heures. »

Vincent Riou (Crosscall), Class40 : «  J’ai disputé la Transat Jacques Vabre en solo, en double et maintenant elle prend la forme d’une course à étapes, soyons fous ! Ce qui est sûr, c’est que partir en direct sur le parcours initial, cela ne passait pas. Cette décision originale est très acceptable. L’important, c’est qu’on fasse une course, j’espère à 44 bateaux au départ de la deuxième étape, et qu’on prenne du plaisir. Maintenant, on attend les règles. De notre côté, on avait fait des impasses sur les voiles parce qu’on partait sur un parcours typé. Est-ce qu’on va avoir le droit de changer, ou de jouer avec un handicap ? On ne le sait pas encore. On part pour un premier sprint dans du vent assez fort, avec différentes allures et beaucoup plus de manœuvres. Psychologiquement, on s’était préparé à un certain déroulé, à présent il faut appréhender les choses différemment, et retourner derrière l’ordinateur. »

Clément Giraud (Coup de Pouce - Giffard Manutention), IMOCA : « On ne devrait pas avoir de problèmes pour sortir de la Manche. Mais la deuxième dépression va nous poser une toute autre problématique, ce sera une question de timing. On aura une décision à prendre - de s’arrêter ou pas -, quand on s’échappera de la pointe Bretagne. Cela dépendra de notre état d’avancement par rapport à ce qui arrive. En bon marin, si on peut passer, on passe. Mais si ça se dégrade, ne serait-ce qu’un tout petit peu, avec le risque d’avoir 60 nœuds en rafales, avec 6-8 mètres de mer, peut-être 10. Les fichiers aujourd’hui sont un peu effrayants. Je suis sous la responsabilité de mon co-skipper et on prendra ensemble une décision avec l’objectif de prendre le moins de risques possibles. »

Anthony Marchand (Actual Ultim 3), ULTIM : « C’est bien d’avoir un bateau rapide dans ces conditions, c’est souvent le cas parce que tu as plus de choix par rapport à la météo. Après ce sera quand même des conditions musclées pour nous. Mais si nous n’avons pas de pépin technique, il y a de grandes chances qu’on évite la grosse dépression, car nous serons déjà à la latitude de Gibraltar à son arrivée. On sera plutôt en approche de dorsale, à trouver du soleil, à panser nos petites blessures et faire sécher nos vêtements. Une autre course pourra commencer. »

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Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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