North Sentinel : cette île où vous n'irez jamais

Nichée dans le golfe du Bengale, au cœur des îles Andaman, au large des côtes indiennes, cette île de 72 km2 semble tout droit sortie d’une carte postale. Pourtant, il y a peu de chance qu’elle devienne un jour la nouvelle destination touristique à la mode. Pourquoi ? Tout simplement parce que l’île est l’un des endroits les plus dangereux au monde. Ce n’est pas tant l’île en elle-même qui est dangereuse, ce sont ses habitants : la tribu des Sentinelles. Si vous voulez y pénétrer, vous recevrez en guise de comité d’accueil une volée de flèches meurtrières.
L’île, officiellement administrée par l’Inde depuis 1947, qui a pourtant déclinée toute responsabilité politique sur celle-ci, a un statut juridique pas vraiment défini par le droit international. Le peuple des Sentinelles refuse tout contact avec la civilisation et toute ingérence sur le territoire. Mais il n’a jamais vraiment clamé la souveraineté sur l’île, ni même vraiment abandonné celle-ci à l’Inde par un traité officiel. C’est donc un territoire avec un statut ambigu. Un territoire souverain, mais sous protection indienne.
Le peuple dénombrant environ 250 individus, vit isolé sur l’île depuis près de 60 000 ans et n’a pas changé de mode de vie depuis 15 000 ans. Cette tribu de chasseurs-cueilleurs, qui n’est pas cannibale comme le voudrait la rumeur, vit comme le faisait les hommes du prénéolithique. Parlant leur propre dialecte et vivant presque nus, ils rejettent toute forme de modernité et seuls quelques hommes « du monde moderne » ont eu l’opportunité de les approcher.
La plus grande source d’informations que nous disposons sur cette tribu provient de l’explorateur Trilokinath Pandit, qui a commencé à entrer en contact avec eux dans les années 60. Il est l’un des seuls à avoir pu les approcher et à les filmer afin de réaliser un documentaire sur leur vie. Pour les amadouer, le réalisateur a multiplié les tentatives de rapprochements et les offrandes. Mais le processus a été long et compliqué. Dans certaines images filmées, on peut ainsi voir les Sentinelles, accepter les noix de coco, mais enterrer, en signe d'inimitié, le cochon offert par l'explorateur et son équipe.
Ce n’est qu’en 1991, soit près de 30 ans plus tard, que l’aventurier est enfin autorisé à pénétrer sur l’île, même si celui-ci n’explique pas ce qui a poussé la tribu à soudainement accepter sa demande.
Depuis cette date, toute tentative d’approche est impossible. Ainsi, après le tsunami de 2004 qui a secoué l’Océan Indien, des hélicoptères, pourtant venus leur apporter de l’aide, ont été accueillis par une volée de lances et de flèches. De même, en 2006, deux pêcheurs, probablement ivres, ayant amarré sur l’île sont morts tués par les flèches des Sentinelles.
Le peuple est récemment revenu dans l’actualité avec la disparition de l’avion MH370 Malaysia Airlines. Une photo satellite de l’île, localisée dans la zone de disparition de l’avion, prise par des avions de recherche, a engendré les spéculations les plus folles, rapidement démenties. Croyant y discerner des volutes de fumées, certains individus et médias ont rapidement fait le lien entre la mystérieuse disparition et l’île : l’avion se serait crashé sur North Sentinel.
Aujourd’hui le peuple est menacé et les autorités demandent la cessation de tout contact avec le peuple et la fin du braconnage autour de l’île. Vivant isolé depuis des milliers d’années, l’organisme des Sentinelles est fragile, ce qui les rend particulièrement vulnérables aux microbes, virus et bactéries venant du continent. Le but est d’éviter que la population soit décimée par une épidémie comme ce fut le cas pour les amérindiens après la découverte de l’Amérique...