Cantilène Cantabrique : Santander, super ! - première partie
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On peut être accueilli par un navire de la Britanny Ferry qui sort. On est salué au passage par le Grand Hôtel de Santander qui, à tribord, annonce fièrement que nous arrivons dans une station balnéaire de la belle époque, celle du XIXème siècle. L’embouchure de la rivière est suffisamment vaste et franche pour permettre, en cas de problème, de mouiller à l’Ouest sous la protection de la péninsule de la Magdanela, et à l’Est sous celle de Isla Santa marina. Fond de sable.
Le chenal est vaste, bien balisé. C’est une nécessité, il doit accueillir sur les vastes quais à tribord le Juan Sebastiano de Elcano, le quatre-mât barque de la « Reale » espagnole. On fête en cette année 2022 les cinq cent ans de l’équipée de Magellan accomplie par son lieutenant Sebastiano d’Elcano. A Getaria, sa ville de naissance en pays basque, un émouvant monument recense les noms de la vingtaine de marins européens, l’équipage est très hétéroclite, qui a le premier tourné autour du monde. Le premier ? Pas vraiment. Le premier homme à réaliser un tour du monde n’est pas européen, il s’appelle Enrique. Enrique ou Henrique était l’exotique serviteur de Magellan. Quand la flotte a fait escale aux Philippines, Enrique parlait avec facilité la langue indigène, il était né à Sumatra ou bien à Malacca… A bâbord se dévoilent la longue étroite langue de sable : l’Arena del Puntal et de vastes étendues découvertes à marée basse.
N’espérez pas être reçu au RCMS, le Real Club Maritimo de Santander, c’est de nouveau à tribord, il n’y a pas de place ni au ponton à Moneldo ni sur les corps morts. On laisse donc à tribord le quai d’arrivée des croisiéristes et du Juan Sebastiano de Elcano. On range, toujours à tribord, les vastes darses Maliano et Raos, pour, entre la bouée 15 et la 17 prendre, barre à droite, l’alignement au 235 qui mène à la Marina Cantabrico. Nous sommes à plus de 3 milles de l’entrée de la rade. Les sondes sont précises : 2,2 mètres au plus bas des vives eaux. Le sondeur l’a confirmé. Il n’y avait pas de courant quand nous avons embouqué le chenal, il peut dépasser les 3 nœuds à mi jusant.
Oubliez Camaret, La Trinité, Le Palais, Port-Joinville, Saint-Martin-de-Ré : le port est vide et aussi le transit de bateau ! Ça change. La Marina Cantabrico est l’escale de Santander. Tout temps et tout tirant d’eau, du moins jusque 2,5 mètres au plus bas des vives eaux… On s’annonce en VHF sur canal 9 en fin d’après- midi. L’accueil est aimable et courtois. Les commodités sont-elles habituelles, on oublie la Wi-Fi. Au matin nous avons la visite de la douane, elle aussi courtoise.
Cette aménité des habitants sera une constante. Notre voisin de ponton, propriétaire d’un Rodman 12,50 taillé pour aller chasser le thon au large, nous offrira une bouteille de Rioja 1998, comme ça, parce qu’il nous trouvait sympathiques .N’étant pas hispanophones, et eux ne maitrisant pas ou peu le français ou l’anglais, chacun fera des efforts pour nous comprendre, nous aider, nous informer. En fait il n’y a pas ou très peu de touristes hors les locaux, et en tout cas pas de tourisme de masse, c’est agréable la politesse.
Peu après la dogana débarque la Guardia civile. L’officier né à Paris a grandi en Normandie, il nous salue par un «Vous nous avez emmené le beau temps ! » « ???... !!! » « Ici à Santander, en été, il pleut tous les jours, c’est exceptionnel que vous arriviez avec ce beau temps et cette température ». En fait le temps n’est pas vraiment beau, il est asiatique : lourd, couvert et orageux. En France c’est la canicule, on se console ici avec 30°. Il a raison notre parisien cantabrique, si vous aimez les ciels immaculés et détestez une bonne averse revigorante que suit un soleil triomphant choisissez plutôt Palavas-les-Flots que la côte Cantabrique à la Saint-Jean. Certes il y a des palmiers et des bougainvillées, nous sommes à la latitude d’Antibes, 43°N, il fait chaud. Mais fleurissent aussi des agapanthes et des hortensias : ça aime l’eau ces plantes-là ! L’eau de mer, plus chaude qu’en Bretagne, 20°, fait la différence, le fond de l’air est moins frais.
Donc la Marino Cantabrico est un peu déserte sur l’eau et sur terre. Les terres pleins n’ont pas vu la tondeuse depuis plusieurs saisons, la rangée de petits immeubles sur la presqu’ile au nord ne s’éclaire pas la nuit, l’activité sur le terre-plein de manutention est limitée, les restaurants du voisinage calmes, les oiseaux chantent en permanence. On est à la campagne. On en oublierait presque l’Aéroport international qui borde la marina au sud, l’activité là aussi confidentielle est concentrée le soir et le matin.
Pour se rendre en ville, le bus nous attend toutes les heures. Il est à un peu plus de 20 minutes à pied, longeant la vaste rivière, et passant sous l’extrémité Est du terrain d’atterrissage. Cette balade permet d’apprécier ce site remarquable qui n’est pas sans rappeler les paysages de Bretagne : belles collines ondulantes, couvertes de bois et de prés, maisons au bord de l’eau. Le trajet en bus dure 20 minutes, mi campagne mi ville On apprécie l’architecture vernaculaire : briques, bow window, et chien assis. Ça monte, ça descend, ça tourne, ça s’autoroute. On débarque au cœur d’une ville de presque 200 000 habitants qui circule comme il y a vingt ans : la bagnole est reine. Ça change là aussi.
Avant de partir, pensez à consulter les prévisions sur METEO CONSULT Marine.