Cantilène Cantabrique : Viveiro, Ortegal, Cedeira et traînera
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Les constructions qui bordent le quai Est imitent une station de sport d’hiver : pas terrible ! Qu’importe, l’accueil est aimable, le port offre toutes les commodités. Le Wifi ? On oublie ! Fernando Medrano le capitaine de port est affable, serviable, et francophone. A notre demande il nous indique trois adresses de restaurants et tapas dignes de confiance. On quitte donc l’ambiance moderne de ce quartier, passons devant L’hyper marché Gadis à notre droite, puis le petit marché au poison à notre gauche, empruntons sur quelques dizaines de mètres l’Avenue Cervantès en passant devant la première adresse recommandée par Monsieur Medrano. Sur une petite place en pente se pressent les tables de O’Muro, restaurant et tapas. Nous nous engouffrons à notre droite dans l’étroite rue qui longe, en contre quai, la ria.
O’ Recuncho: rua Pastor Diaz, 55. Tapas
O’ Asador: rua Meliton Cortinas, 15. Restaurant
O’ Muro : rua Margarita Pardo de Cela. Tapas et Restaurant.
Nous revenons par le quai, le pont de la Miséricorde enjambe nonchalamment de ses neuf arches l’ensanada du Rio Landro. Construit dès 1225, rebâti, il a été achevé sous le règne de Carlos V en 1544. Il mène majestueusement à l’entrée principale de l’ancienne ville fortifiée : la Porte Carlos Quinto ou Castillo del Puente, édifiée en 1548 dans une pierre rustique. Quand on considère ce que dessinait Palladio à la même époque ou l’achèvement du château de Chambord la même année, on peut légitimement convenir que cette porte a des allures bien médiévales. Au fait l’avez-vous reconnu ? Carlos V, Carlos Quinto : c’est Charles Quint ! Bienfaiteur de la ville. Lors des fêtes Renaissance, Charles débarque à Cheval sur la Plage de Covas, emprunte le pont et passe sous la porte qui lui doit son nom. A propos de nom pour éviter toute confusion prononcez Vivero à l’espagnole :« BiBeyro ».
Viveiro est une étape charmante qui mérite qu’on s’y attarde. La ville, les plages, les mouillages, de nombreuses marches aux alentours offrant des points de vue magnifiques sur la ria et la côte. On peut y passer plusieurs jours en attendant une météo favorable pour retourner sur les côtes françaises, et, à cette occasion, c’est du bon côté du Cap Ortegal et de Estaca de Barres…
Le Cap Ortegal et ses « Aguillons », rochers déchiquetés, voient les routes de Patriot Games et PretAixte se séparer. Il faut donner du tour au Cap Ortegal, le mont Faroleiro, dont il signale la ligne de crête se jetant à la mer, s’élève à 340 mètres. Les à-pics, même vus du large, apparaissent vertigineux. Ortegal avec Estaca de Barres, situé à 8 milles plus à L’Est, constituent une sorte de barrière météorologique. Au retour nous devrons rebrousser chemin en tentant de les passer au pré dans des rafales à 30 nœuds et une mer peu conciliante. Heureusement pas très loin dans l’Ouest du Cap Ortegal se niche Cedeira.
La Ria de Cedeira, est classée B par le guide Imray « Entrée en fonction du vent quel que soit la marée », tout comme Viveiro d’ailleurs. On peut le comprendre, la ria est ouverte au Noroit. On s’engage dans la ria au-delà de Piedra de Mar, danger isolé à un mille de l’entrée. Face à nous la pointe Promontorio divise la ria : à l’Ouest la plage de Loira où se jette le petit Rio de Loira, et à l’Est la plage de Cedeira avec la rivière et le bourg éponymes. On tourne à gauche à l’abri du môle qui protège la flotte de pêche de Cedeira. PretAixte mouille alors en toute tranquillité dans des fonds de sable vasard de 3 à 4 mètres. Ideal ! Nous subirons dans ce mouillage des rafales de vent d’Est à 35 nœuds sans être vraiment inquiet tant l’endroit est sécurisant.
Sécurisant et très reposant, le paysage de Cedeira est enchanteur. C’est celui des rias altas bien sûr, mais dans la version intimiste. Les forêts d’Eucalyptus et de pin descendent jusqu’à la mer. L’eucalyptus, australien d’origine, a trouvé ici de quoi assoiffer sa voracité d’eau… Son tronc grêle que surmonte une petite houppe supporte les grands vents, ses racines plongent à plus de dix mètres et assèchent les nappes phréatiques des régions peu arrosées, aucun risque pour les réserves aqueuses de Galice ! Les deux grandes plages apaisent le paysage, en particulier celle de Loira au sud-ouest, vierge de toute habitation.
Au nord du port de pêche un petit fortin se planque dans la verdure. Tout et calme, paisible, au loin se font entendre les tronçonneuses, l’eucalyptus toujours.
Ils vont à plus de six nœuds, encouragés d’une voix puissante par le pilote du semi rigide qui les accompagne. Fin de journée à Cedeira, le Trainera de Cedeira est à l’entrainement dans la ria. Ces traineras, embarcations de plus de 10 mètres, sont propulsées vivement par des avirons. Six rameurs d’un côté, six rameurs de l’autre plus un de poupe, et un barreur aviron en main debout à l’arrière. Sur toute la côte cantabrique et basque, les traineras s’affrontent en des régates musclées. Qu’importe la météo et l’état de la mer, c’est une activité de marin, de vrai. Magnifique de les voir débouler à pleine allure, changer de rythme, virer une bouée. Mais il faudra quitter ce mouillage enchanteur pour retrouver demain Patriot Games à La Corogne, ultime but de notre croisière cantabrique.