À Bali, les habitants sont exaspérés par le surtourisme

Par Figaronautisme.com

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Fatigués du tourisme de masse dont ils sont pourtant dépendants, les habitants de l'île indonésienne de Bali aspirent à plus de calme et de sérénité avec une pause des projets touristiques.

Avant d'être découvert par des surfeurs étrangers, Canggu, dans le sud de Bali, était un village vert et paisible au bord de la mer, entouré de rizières.

A présent, cette localité est remplie d'hôtels et ses rues sont constamment embouteillées par les voitures, les scooters et les camions. Les autorités ont annoncé un projet de gel pendant deux ans des constructions d'hôtels, villas et discothèques, qui devrait restaurer un peu de tranquillité sur l'île hindouiste. A condition qu'il soit appliqué. "Canggu est plus animé à présent... sa tranquillité et sa verdure disparaissent progressivement", se désole Kadek Candrawati, 23 ans.

Comme d'autres résidents, elle pense que des mesures sont nécessaires au vu des changements drastiques connus par Canggu. "Le gouvernement et la communauté doivent travailler ensemble pour s'assurer que Bali reste verte, ait un avenir durable, et que la culture locale soit préservée", poursuit la jeune femme, propriétaire d'un magasin de location de moto qui lui rapporte sept millions de roupies (418 euros) par mois.

"La future Singapour"
Avec sa végétation luxuriante, ses rizières et ses plages prisées des surfeurs, Bali, qui offre des complexes hôteliers de luxe comme des repaires de routards, voit un nombre croissant de touristes.

L'île a attiré près de trois millions de visiteurs étrangers pendant la première moitié de l'année, la plupart venant d'Australie, de Chine et d'Inde, selon les statistiques officielles. Les touristes étrangers ont dépensé en moyenne 1.516 euros par visite l'année dernière, contre 1.068 euros en 2019 avant la pandémie de Covid-19, selon l'agence indonésienne des statistiques.

Après la pandémie qui a fait s'effondrer le nombre de touristes, le gouvernement a d'abord tenté de ramener rapidement les étrangers à Bali en offrant des visas spécifiques aux "nomades" numériques (travailleurs à distance) et des "visas dorés" aux gros investisseurs.

Mais l'île veut rétropédaler. Sandiaga Uno, ministre du Tourisme jusqu'au mois dernier, avait indiqué que le plan de gel, dont l'objectif est d'empêcher le développement de nouvelles infrastructures massives dans les zones touristiques, serait mis en place pendant le mandat du nouveau président Prabowo Subianto, sans définir de date. Un système de métro léger est aussi en projet afin de faciliter le trafic dans l'île.

Pourtant, les déclarations de Prabowo Subianto font douter de sa volonté de stopper le développement accéléré de Bali. Lors d'une rencontre avec des dirigeants locaux, il a promis un deuxième aéroport international, afin de faire de Bali "la future Singapour, la future Hong Kong... un centre économique".

Pour le groupe de défense de l'environnement indonésien Walhi, il est déjà trop tard. "Bali est désormais bien trop construite, les espaces verts deviennent urbanisés", déclare son directeur exécutif, Made Krisna Dinata. "Le moratoire proposé devrait être une législation devant non seulement arrêter le développement mais aussi protéger les terres", ajoute-t-il.

Les dégâts infligés à la beauté naturelle de Bali sont déjà visibles. Une marée de déchets plastiques submerge régulièrement ses plages, tandis que la surexploitation des eaux souterraines a asséché plus de la moitié de ses rivières. Le tourisme de masse menace également son système d'irrigation traditionnel, classé au patrimoine mondial par l'Unesco, qui alimente les rizières, à mesure que les zones vertes qui recueillent l'eau sont recouvertes de constructions.

Saleté de l'eau
Récemment, des vidéos devenues virales ont montré des blocs de calcaire chutant dans la mer, en conséquence de l'excavation de falaises pour bâtir des villas dans le sud de Bali.

"De nombreux moniteurs de surf ont perdu leurs revenus, les clients ne veulent plus surfer en raison de la saleté de l'eau", déplore Piter Panjaitan, un surfeur de 42 ans. Les mauvais comportements des touristes sont un autre facteur d'exaspération pour les locaux, notamment des incidents lors desquels des étrangers ont posé nus dans des sites sacrés au mépris des traditions et des interdits. "Il y a plein de problèmes avec ceux qui viennent ici", poursuit Piter Panjaitan.

Les autorités assurent que le gel des constructions vise à trouver un équilibre entre l'apport de revenus touristiques et la préservation de l'île. Le moratoire devrait aussi aider à développer des infrastructures au-delà du sud de Bali, où les touristes se concentrent actuellement, selon Tjok Bagus Pemayun, directeur du bureau du tourisme de Bali.

Pourtant, tout le monde n'est pas en faveur d'une pause. I Gusti Ngurah Rai Suryawijaya, vice-président de l'association des hôtels et restaurants de Bali, appelle à une enquête plus approfondie avant de prendre des mesures pouvant nuire aux Balinais qui dépendent du tourisme. "Quand il y a trop d'offre, un moratoire est acceptable afin de diminuer la concurrence, mais en ce moment, la demande augmente". "Notre taux d'occupation atteint les 80 à 90%", note-t-il.

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Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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