Tortues marines : ces géantes paisibles en danger

Culture nautique
Par Figaronautisme.com

Elles sillonnent les mers depuis des millions d’années. Pourtant, aujourd’hui, toutes les espèces de tortues marines sont menacées. À l’occasion de la Journée mondiale de la tortue, la rédaction fait le point sur ces majestueux reptiles marins, leurs spécificités et les menaces qui pèsent sur eux.

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Elles sillonnent les mers depuis des millions d’années. Pourtant, aujourd’hui, toutes les espèces de tortues marines sont menacées. À l’occasion de la Journée mondiale de la tortue, la rédaction fait le point sur ces majestueux reptiles marins, leurs spécificités et les menaces qui pèsent sur eux.

Sept espèces, une même fragilité
Depuis plus de 100 millions d’années, elles peuplent les océans. Les tortues marines, témoins d’un lointain passé, appartiennent à un club très restreint : seulement sept espèces au monde, toutes aujourd’hui en péril.
La plus imposante, la tortue luth (Dermochelys coriacea), peut atteindre jusqu’à deux mètres et peser près de 700 kilos. Elle est aussi la seule à ne pas avoir de carapace dure, mais un cuir souple et strié qui lui permet de plonger à plus de 1000 mètres de profondeur. À l’inverse, la tortue verte (Chelonia mydas), reconnaissable à sa carapace brun-olive et à son régime strictement herbivore à l’âge adulte, est prisée pour sa chair, ce qui en fait une cible du braconnage dans certaines régions tropicales.
En Méditerranée, c’est la tortue caouanne (Caretta caretta) qui domine. Elle affectionne les côtes grecques, chypriotes, mais aussi turques pour y pondre ses oeufs. Plus discrète mais tragiquement célèbre, la tortue imbriquée (Eretmochelys imbricata) est connue pour ses écailles aux reflets ambrés, prisées pour fabriquer le tristement célèbre "bekko", matière utilisée dans les bijoux et objets décoratifs. Elle est l’une des plus gravement menacées.
Les trois autres espèces - la tortue olivâtre (Lepidochelys olivacea), la tortue de Kemp (Lepidochelys kempii) et la tortue à dos plat (Natator depressus) - ont chacune leurs particularités : la première est la plus abondante mais n’échappe pas aux menaces, la deuxième est la plus rare et en danger critique d’extinction, tandis que la dernière, endémique d’Australie, reste mystérieuse en raison de sa discrète répartition.
Réparties sur tous les océans du globe, ces espèces dépendent d’un équilibre fragile entre mer et terre, chaque femelle retournant sur les plages de sa naissance pour y enfouir ses oeufs, souvent à quelques mètres près. Une carte de leur répartition mondiale dessine un réseau délicat de routes migratoires aujourd’hui semées d’embûches.

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Tortue luth© AdobeStock

Les plus menacées : un classement préoccupant
La liste rouge de l’UICN, référence internationale pour l’évaluation de la biodiversité, est formelle : toutes les espèces de tortues marines figurent sur sa liste, dans des catégories allant de "vulnérable" à "en danger critique".
La tortue imbriquée et la tortue de Kemp, notamment, inquiètent particulièrement les scientifiques. La première a vu ses populations chuter de plus de 80 % en un siècle. La seconde, qui ne pond presque exclusivement qu’au large du golfe du Mexique, est si rare que chaque ponte collective - ou arribada - est surveillée de près par des équipes de conservation. Le braconnage, malgré les interdictions internationales, continue de décimer les effectifs. La carapace devient bijou, la chair se vend au marché noir, les oeufs sont considérés comme aphrodisiaques dans certaines cultures.
Mais ce n’est pas tout. Le plastique, omniprésent dans les océans, est une menace silencieuse. Des sacs flottants, confondus avec des méduses, peuvent boucher l’intestin d’une tortue en quelques jours. Une étude de la Commonwealth Scientific and Industrial Research Organisation (CSIRO) a montré que l’ingestion de seulement 14 morceaux de plastique suffisait à tuer une tortue sur deux.

Des menaces d’origine humaine
Derrière la disparition progressive de ces géantes marines, un coupable unique : l’humain.
La pollution plastique est en tête. Chaque minute, l’équivalent d’un camion poubelle est déversé dans les mers. Les hydrocarbures, eux, intoxiquent les plages de ponte ou contaminent les oeufs. Mais c’est aussi dans les filets de pêche que les tortues rencontrent la mort : chaque année, des milliers d’entre elles se noient après s’être empêtrées dans les engins de pêche non sélectifs.
Le tourisme, s’il n’est pas bien encadré, se transforme lui aussi en menace. Les plages transformées en discothèques estivales perturbent les femelles pendant la ponte. Les flashs, les pas, les parasols plantés n’importe où, tout cela peut suffire à détourner une tortue de sa mission de reproduction. Et que dire des infrastructures en béton qui grignotent les rivages ? L’urbanisation bloque l’accès aux zones de nidification.
À cela s’ajoute le changement climatique. La température du sable détermine le sexe des nouveau-nés : plus le sable est chaud, plus les femelles sont nombreuses. À terme, cela pourrait déséquilibrer les populations. Certaines plages de Floride produisent déjà plus de 90 % de femelles...

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Des actions et de l’espoir
Face à ce constat alarmant, des efforts de conservation existent - et ils portent leurs fruits lorsqu’ils sont soutenus. Des réserves marines, comme celle des Galápagos ou des Seychelles, offrent des zones de répit où les tortues peuvent nager et pondre sans être dérangées. Des programmes de suivi par satellite permettent de mieux comprendre leurs déplacements, essentiels pour adapter les mesures de protection.
En France, plusieurs structures s’impliquent activement. Le Centre d'Études et de Soins pour les Tortues Marines de Guadeloupe recueille les tortues blessées, les soigne, les bague et les relâche. Le programme PELAGIS, basé à La Rochelle, recense les échouages et suit les populations. L’Ifremer, de son côté, participe à la recherche sur les impacts de la pollution marine. Et les citoyens ? Ils ont un rôle crucial. Sur la plage, un comportement respectueux peut faire toute la différence : éviter de marcher sur les nids, ne pas laisser traîner ses déchets, signaler la présence de tortues aux autorités locales. En mer, garder ses distances et réduire sa vitesse limite les collisions.

Car sauver les tortues marines, ce n’est pas seulement préserver des animaux charismatiques. C’est aussi protéger un indicateur de la santé de nos océans. Et il n’est pas trop tard.

L'équipe
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
Jean-Christophe Guillaumin
Jean-Christophe Guillaumin
Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max Billac
Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Denis Chabassière
Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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METEO CONSULT est un bureau d'études météorologiques opérationnel, qui assiste ses clients depuis plus de 30 ans. Les services de METEO CONSULT reposent sur une équipe scientifique de haut niveau et des moyens techniques de pointe. Son expertise en météo marine est reconnue et ses prévisionnistes accompagnent les plaisanciers, les capitaines de port et les organisateurs de courses au large depuis ses origines : Route du Rhum, Transat en double, Solitaire du Figaro…
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Cyrille Duchesne
Titulaire d'un doctorat en Climatologie-Environnement, Cyrille est notre expert METEO CONSULT. Après avoir enseigné la climatologie et la géographie à l'université, il devient l'un des météorologues historiques de La Chaîne Météo en intégrant l'équipe en 2000. Spécialiste de la météo marine, il intervient également en tant qu'expert météo marine pour des courses de renommée mondiale, comme la Route du Rhum, la Solitaire du Figaro, la Transat Paprec...