
L’origine d’un nom insolite
Contrairement à ce que leur nom pourrait laisser croire, les bateaux-mouches n’ont rien à voir avec les insectes. Le terme vient en réalité du quartier de la Mouche, à Lyon, où ces bateaux étaient fabriqués au XIXe siècle. À l’époque, ces embarcations à vapeur servaient avant tout au transport de passagers et de marchandises sur le Rhône et la Saône. Elles étaient robustes, maniables et peu coûteuses, idéales pour les liaisons fluviales.
C’est lors de l’Exposition universelle de 1867 à Paris que ces bateaux connaissent leur premier grand coup de projecteur. Pour l’occasion, une ligne est créée pour faire visiter la Seine aux visiteurs du monde entier. Le succès est immédiat. Ces drôles de bateaux, appelés « mouches » en clin d'œil à leur origine lyonnaise, fascinent par leur modernité.
De l’oubli au renouveau touristique
Après l’engouement des expositions universelles, les bateaux-mouches sombrent peu à peu dans l’oubli au début du XXe siècle. La concurrence des tramways et du métro à Paris met un coup d'arrêt à ces balades fluviales. Il faudra attendre la fin de la Seconde Guerre mondiale pour voir renaître l’intérêt pour ces croisières, cette fois sous un tout autre angle.
En 1949, Jean Bruel, un entrepreneur visionnaire, décide de relancer l’idée des promenades sur la Seine. Il récupère un vieux bateau désaffecté, le remet à neuf, et fonde la « Compagnie des Bateaux-Mouches ». La formule est simple : un circuit commenté, une vue imprenable sur les monuments de Paris et une petite dose de charme rétro. Le succès est fulgurant.

Un symbole qui s’exporte
Symbole parisien par excellence, le bateau-mouche a aussi conquis d’autres horizons. À Montréal, l’idée a séduit dès 1992, année du 350e anniversaire de la ville. Un bateau-mouche y a été construit directement dans le Vieux-Port. Avec ses deux ponts et sa verrière amovible, il embarque jusqu’à 190 passagers pour cinq croisières par jour, de jour comme de nuit, sur le fleuve Saint-Laurent. Grâce à son faible tirant d’eau, il navigue dans des zones inaccessibles aux bateaux classiques, offrant une vue spectaculaire sur le canal Lachine, Habitat 67 ou encore le pont Jacques-Cartier. Plus d’un million de visiteurs y ont déjà embarqué, et plus de 400 000 repas ont été servis lors des soupers-croisières.
L’histoire fut plus mouvementée à Rio de Janeiro. Dans les années 1980, une ligne de bateaux-mouches opérait dans la baie de Guanabara. Mais le 31 décembre 1988, le naufrage du bateau-mouche IV fit 55 victimes et provoqua la disparition définitive de l’entreprise, laissant un souvenir tragique.
Un symbole à part entière de Paris
Malgré ses détours internationaux, le bateau-mouche reste avant tout une icône parisienne. Sa silhouette fait désormais partie du paysage, et il n’est plus seulement un attrait touristique, mais aussi un élément du patrimoine vivant de la capitale.
Lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024, certains bateaux-mouches ont d’ailleurs été mis à l’honneur. Parmi eux, L’Espoir, qui transportait la délégation américaine, a participé à la grande parade sur la Seine, confirmant encore un peu plus son rôle de symbole parisien.
Au fil du temps, ces bateaux sont devenus bien plus qu’un moyen de transport ou une attraction : ils incarnent un art de vivre à la parisienne, mêlant histoire, élégance et romantisme sur les flots. Un véritable emblème flottant qui continue, génération après génération, à faire voguer les rêves sur la Seine.