Mer totale : ce que cache vraiment ce chiffre dans les bulletins météo marine

Culture nautique
Par Figaronautisme.com

Parmi les données que l’on consulte systématiquement avant de prendre la mer, la "mer totale" fait figure de repère. Elle rassure ou inquiète, selon la valeur annoncée. Mais que mesure-t-elle vraiment ? Pourquoi ne faut-il pas s’arrêter à ce seul chiffre ? Décryptage d’un indicateur fondamental.

Parmi les données que l’on consulte systématiquement avant de prendre la mer, la "mer totale" fait figure de repère. Elle rassure ou inquiète, selon la valeur annoncée. Mais que mesure-t-elle vraiment ? Pourquoi ne faut-il pas s’arrêter à ce seul chiffre ? Décryptage d’un indicateur fondamental.

Mer totale : un paramètre composite
La mer totale correspond à la hauteur significative des vagues combinées, c’est-à-dire la hauteur moyenne du tiers des vagues les plus hautes observées à un moment donné, toutes origines confondues. En météo marine, on considère que c’est ce paramètre qui reflète le plus fidèlement le "ressenti" de l’état de la mer.
Mais il faut comprendre ce que cette hauteur inclut : la mer du vent, formée localement par l’action du vent sur l’eau, et la houle, qui résulte d’un système de vagues plus lointain, souvent issu d’une ancienne perturbation. Ces deux composantes, bien distinctes dans leur origine comme dans leur comportement, se superposent pour former la mer réelle que rencontre le navigateur.
Le chiffre de la mer totale n’est pas une simple addition des hauteurs de houle et de mer du vent. C’est le résultat d’un calcul complexe basé sur l’énergie des vagues, leurs directions et leurs périodes. Deux systèmes de vagues qui se croisent n’auront pas le même effet que deux systèmes alignés : l’interférence entre les trains de vagues modifie la hauteur effective et la forme de la mer.

Mer croisée : quand le chiffre ne dit pas tout
Prenons un exemple concret : une mer totale annoncée à 2 mètres. Elle peut paraître modérée, surtout si vous êtes sur un voilier de 40 pieds. Mais si ces 2 mètres résultent d’une houle longue d’ouest (1,4 m) croisée avec une mer du vent de sud (1,2 m), le plan d’eau devient rapidement inconfortable et difficile à lire. Le bateau sera soumis à un roulis irrégulier, parfois accompagné de coups de raquette par l’avant.
Dans ce type de configuration, ce n’est pas tant la hauteur qui est en cause, mais la géométrie de la mer. Deux composantes croisées peuvent générer des vagues courtes, désordonnées, imprévisibles. On parle alors de mer croisée, très redoutée par les plaisanciers car elle rend la navigation technique, fatigante, voire dangereuse, surtout pour les plus petits bateaux.

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L’importance de lire les composantes
C’est pourquoi il est indispensable de ne pas s’arrêter au chiffre de la mer totale. Les bulletins météo marins les plus complets permettent généralement de consulter séparément :
o la houle : hauteur, direction, et période (le temps, en secondes, séparant deux crêtes successives de vagues dans une série régulière (cela dit période et longueur d’onde sont liées par une relation).
o la mer du vent : généralement plus courte, agitée, orientée dans l’axe du vent local.
En croisant ces informations, le plaisancier peut anticiper non seulement la hauteur des vagues, mais aussi leur comportement dynamique : fréquence, régularité, direction par rapport à sa route. Une houle de 10 secondes de période est bien plus énergétique qu’une mer courte, et son effet sur le bateau, surtout au portant, peut être bénéfique ou piégeux selon la carène et l’expérience de l’équipage.

La mer totale, oui... mais pas seule
La mer totale reste un excellent indicateur d’alerte. À partir de 2,5 mètres, la navigation devient sérieusement engagée pour la plupart des unités de plaisance. Mais c’est la nature des composantes, et leur orientation relative, qui fait la différence entre une mer maniable et une mer difficile.
Il est également important de garder à l’esprit que la "hauteur significative" reste une valeur statistique. Cela signifie que certaines vagues dépasseront cette hauteur de 40 à 60 %. Autrement dit, si la mer totale est annoncée à 2 mètres, il faut s’attendre à rencontrer ponctuellement des vagues de 3 à 3,5 mètres, ce que confirment les observations en mer.

En pratique : ce que doit regarder le plaisancier
Avant chaque sortie, il convient donc de consulter :
o la hauteur de mer totale,
o les hauteurs, directions et périodes de la houle et de la mer du vent,
o et leur orientation par rapport à la route prévue.
Un même chiffre peut correspondre à des réalités radicalement différentes : une mer rangée, confortable au portant, ou une mer courte et difficile au près. Pour préparer son équipage, choisir son moment de départ ou décider de différer, ce niveau de lecture est indispensable.

La mer totale est un indicateur utile, mais jamais suffisant à lui seul. Pour naviguer en sécurité et dans de bonnes conditions, il faut apprendre à en décrypter les composantes. Ce travail d’analyse devient rapidement une habitude pour les plaisanciers aguerris : il transforme la consultation météo en un véritable outil de décision stratégique.

Et avant de partir en mer, ayez les bons réflexes en consultant la météo sur METEO CONSULT Marine et en téléchargeant l'application mobile gratuite Bloc Marine.

L'équipe
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Jean-Christophe Guillaumin
Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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METEO CONSULT est un bureau d'études météorologiques opérationnel, qui assiste ses clients depuis plus de 30 ans. Les services de METEO CONSULT reposent sur une équipe scientifique de haut niveau et des moyens techniques de pointe. Son expertise en météo marine est reconnue et ses prévisionnistes accompagnent les plaisanciers, les capitaines de port et les organisateurs de courses au large depuis ses origines : Route du Rhum, Transat en double, Solitaire du Figaro…
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Titulaire d'un doctorat en Climatologie-Environnement, Cyrille est notre expert METEO CONSULT. Après avoir enseigné la climatologie et la géographie à l'université, il devient l'un des météorologues historiques de La Chaîne Météo en intégrant l'équipe en 2000. Spécialiste de la météo marine, il intervient également en tant qu'expert météo marine pour des courses de renommée mondiale, comme la Route du Rhum, la Solitaire du Figaro, la Transat Paprec...