Essai Lagoon 55 : le passé revisité

Voiliers
Par François Tregouet

Pour présenter le tout nouveau Lagoon 55, Thomas Gailly, directeur de la marque, convoque l’historique Lagoon 55, premier modèle de la marque en 1987, celui qui lui donnera son nom et son emblème. Si la philosophie reste la même, « traverser les océans avec confort et sérénité », les moyens mis en œuvre et le résultat final sont de toute autre dimension. À la frontière entre plaisance et yachting, le Lagoon 55 fait tout pour briller. Nous avons passé quelques heures à bord du côté de Barcelone au début de l'été, sous le charme de ce petit palace vélique.

©Nicolas Claris
Pour présenter le tout nouveau Lagoon 55, Thomas Gailly, directeur de la marque, convoque l’historique Lagoon 55, premier modèle de la marque en 1987, celui qui lui donnera son nom et son emblème. Si la philosophie reste la même, « traverser les océans avec confort et sérénité », les moyens mis en œuvre et le résultat final sont de toute autre dimension. À la frontière entre plaisance et yachting, le Lagoon 55 fait tout pour briller. Nous avons passé quelques heures à bord du côté de Barcelone au début de l'été, sous le charme de ce petit palace vélique.

En trois décennies, le multicoque s’est imposé comme le support idéal des plus belles croisières. Il a aussi beaucoup changé et ce nouveau Lagoon 55 en est l’ultime évolution. En 1997, Marc Van Peteghem se souvient avoir dû s’employer à ce que le passage du cockpit au carré se fasse sans contorsions, malgré des contraintes de structure limitant la hauteur sous barrot de la porte. En 2021, cette frontière entre l’intérieur et l’extérieur est depuis longtemps abolie. Alors, c’est plus en arrière que les architectes ont innové, avec un cockpit complètement ouvert sur les jupes, véritable terrasse sur la mer. Seulement séparé de la plateforme hydraulique par des balcons inox. La sensation peut être surprenante par mer formée, elle est totalement séduisante par beau temps et bien sûr au mouillage. La circulation depuis ou vers les jupes, est facilitée par l’orientation à 45° des deux marches sur chaque bord. Cela pourrait paraître un détail par rapport à la traditionnelle montée axiale, c’est en réalité une vraie évolution ergonomique, rendant beaucoup plus naturel l’accès à bord. L’espace rendu disponible par cette petite révolution est utilisée sur bâbord pour accueillir une plancha et sur tribord un siège amovible. Aujourd’hui simple strapontin depuis lequel on s’imagine surveiller la ligne de pêche ou méditer sur un sillage éphémère, il ne serait pas surprenant qu’il gagne en confort sur de prochains modèles.

Une terrasse sur la mer

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Car ce numéro 1 que nous avons pu essayer dans les eaux barcelonaises, n’est en réalité que le premier de trois prototypes du Lagoon 55 avant la réelle production en série. Si, comme nous le confie Thomas Gailly, « 25 unités ont déjà été commandées, le premier bateau véritablement de série ne sera livré qu’en avril 2022 ». Ce mode opératoire est un investissement important que consent le constructeur bordelais, significatif de sa volonté à monter en gamme. Ce Lagoon 55 nouvelle génération, se positionne en effet comme le trait d’union entre la gamme que l’on pourrait qualifier de « classique » et celle des yachts, puisqu’il s’intercale entre les Lagoon 50 et SIXTY 5. L’annonce d’une nouveauté autour de 60 pieds dans les prochains mois ne surprendrait d’ailleurs personne. D’ici là, le plus grand des « petits » assume son rôle de leader et montre la voie. À la conception, le triumvirat VPLP - Le Quément - Nauta Design réuni par Lagoon ne change pas, mais il redouble d’efforts et de coopération pour offrir le maximum de confort, d’élégance et de performance. Les architectes navals se sont appliqués à ce que ce beau bébé de 27 tonnes lège, contre 13 pour son illustre prédécesseur, procure malgré tout des vitesses décentes sous voiles.

De la puissance disponible

Pour cela, le « moteur » ne manque pas de chevaux,  avec 186 m² de voilure au près et 263 m² sous code zéro. Plus abattu – les 272 m² du très beau spi asymétrique bleu marine constellé d’étoiles sortis de leur chaussette –, le Lagoon 55 fait la preuve qu’il ne lui en faut pas beaucoup plus pour allonger la foulée. Alors que le vent oscille autour de 9 nœuds, les volumineuses étraves, savamment sculptées par Patrick Le Quément, fendent les eaux méditerranéennes à 6,6 nœuds. À 115-120° du vent réel. Au près, face à la houle typique des côtes catalanes, nous aurions envie que le triangle avant soit plus grand. Mais sans que le vent ait monté, le Lagoon 55 avance malgré tout à près de 5 nœuds à 40° du vent apparent, ce qui est fort honorable dans ces conditions. Alors que son tour d’Europe de démonstration est déjà bien lancé, l’équipage confirme : si au-dessous de 5 ou 6 nœuds de vent, les deux moteurs de 115 CV sont de parfaits alliés pour respecter le planning serré de cette tournée d’été, dès 10 nœuds de vent, le Lagoon 55 allonge la foulée et peut vite assurer des moyennes au-dessus de 8 nœuds sous voile.

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Le flybridge, centre névralgique

Qui plus est, toutes les manœuvres sont centralisées au niveau du flybridge, y compris les écoutes des voiles de portant, ce qui est assez rare pour être souligné. C’est parfois au prix de multiples renvois comme pour la bosse d’enrouleur de génois, mais ainsi tout est à portée de main. Trois winches Harken entourent le pied de mât, à proximité du poste de barre situé à tribord, avec sa confortable banquette double. Si ce niveau supérieur ne paraît pas immense au premier abord, il est bon de rappeler que nous ne sommes à bord « que » d’un 55 pieds. Qu’en plus de la partie manœuvre/barre, il accueille également une très belle banquette en U face à la route, une cuisine d’extérieur derrière la barre, et de grands bains de soleil sur l’avant et à l’arrière ! Le seul accès bâbord donnant sur le cockpit peut être doublé sur tribord, vers le passavant cette fois, ce qui facilitera beaucoup les mouvements de l’équipage, notamment vers l’avant. Finalement il est immense ce flybridge ! Et on y est tellement bien, qu’on ose suggérer l’adoption d’un saute-vent élégamment intégré, au moins devant le poste de barre, pour pouvoir y rester plus longtemps quand le vent monte.

Intérieur pullman

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À défaut, cela restera toujours un immense plaisir de rejoindre l’intérieur. Hormis les quelques nuisances sonores inévitables sur un prototype (winch d’enrouleur de génois et grincements liés à des ajustements à parfaire)  solutionnées sous peu, tout n’est que luxe et volupté. Les assises du carré sont dignes du lobby d’un grand hôtel et une véritable invitation à l’oisiveté. La cuisine en L à l’entrée sur tribord se prolonge d’un meuble bar des plus chics. Trois plans d’aménagement des cabines sont disponibles dont le quatre cabines avec Master Suite à l’arrière-tribord tel que proposé sur notre bateau d’essai. Des versions cinq et six cabines, avec autant de salles d’eau, sont également proposées afin de répondre à tous les usages, y compris les plus récents en plein développement comme la propriété partagée. Il faut souligner les nombreux rangements disponibles partout, la qualité des matériaux de vaigrage et le soin apporté à l’éclairage. Texture des cadres de lits, poignées de porte d’équipets et fargues de bibliothèque en inox, tout comme les ouïes de climatisation, Lagoon a soigné les finitions sur ce bateau forcément emblématique. Chaque détail compte et participe à donner une impression d’ensemble très haut de gamme. Les hublots de bordé ne sont pas les plus grands que nous ayons vus, mais ils sont à hauteur parfaite pour offrir une vue imprenable sur la mer.

Un cockpit avant... naturellement

De retour en nacelle, deux nouveautés nous avaient échappé. Deux vitrages zénithaux de roof offrent un nouveau point de vue sur les voiles et le firmament. S’ils sont occultables pour éviter un excès de chaleur, ils sont surtout masqués par les bains de soleil avant du flybridge, ce qui explique notre oubli. Tout aussi discret mais tellement utile au mouillage, le vitrage central avant s’escamote vers le bas pour ventiler l’espace. Il ouvre sur un cockpit avant dont l’intégration a été si bien soignée qu’il mériterait lui aussi, comme l’arrière, l’appellation « terrasse sur la mer ». Qui plus est, deux options permettent de le protéger des rayons du soleil : soit un cabriolet repliable, soit une voile d’ombrage tendue entre le haut du roof et deux tubes carbone du plus bel effet. Si un doute subsistait encore sur l’évolution extraordinaire qu’a connu le monde du multicoque ces trente dernières années, le Lagoon 55 est le témoin de ce changement de dimension. Le soin apporté au design extérieur permet de faire passer le plus élégamment possible l’hyper-croissance des volumes. Ceux-ci permettent de proposer des aménagements intérieurs impossibles à imaginer sur un 17 mètres à la fin du siècle dernier. Traités, de plus, dans un esprit superyacht, ils permettent au Lagoon 55 d’établir un nouveau degré de référence en termes de qualité perçue dans sa catégorie.

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Les +

- Qualité de finition

- Facilité de manœuvre à deux

- Espaces disponibles

Les -

- L’accès unique au flybridge (hors option)

- Bruit des winches électriques dans le carré

- Poste de barre et manœuvre exposé

Fiche technique

Longueur hors-tout : 16,56 m

Largeur hors-tout : 9,00 m

Tirant d’eau : 1,55 m

Déplacement lège (CE) : 27 036 t

Surface de voile au près : 186 m²

Motorisation – standard : 2 x 80 CV

Capacité carburant : 1100 l

Capacité eau : 960 l

Nombre de cabines : 4 / 5 / 6

Homologation CE : A - 14 pax.

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Prix standard (4 cabines) : 1 139 300 euros H.T.

Prix version essayée : 1 719 120 euros H.T.

PRINCIPALES OPTIONS

- Code 0 avec bout dehors et emmagasineur : 8 820 euros H.T.

- Plateforme hydraulique arrière : 48 850 euros H.T.

- Revêtement teck du flybridge : 7 100 euros H.T.

Retrouvez cet essai et bien d'autres dans notre dernier hors-série Yachting 2021 à lire en ligne par ici !

L'équipe
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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