
Evolution des marins et des bateaux, en dehors de la classe Imoca qui prépare activement la prochaine Transat Jacques Vabre Normandie Le Havre, sur la prochaine Rolex Fastnet Race la majorité des duos se retrouveront en IRC. Parmi les plus grands bateaux de la flotte, le JP54 Notre Méditerranée-Ville de Nice, le plan Guillaume Verdier vainqueur de la dernière Route du Rhum dans sa catégorie, mené par Jean-Pierre Dick et Fabien Biron. Il faut dire que le double réussit au Niçois qui présente un palmarès inégalé dans ce format avec deux victoires dans la Barcelona World Race et quatre sur la Transat Jacques Vabre. Il aimerait bien cette année enrichir sa vitrine du précieux trophée du RORC. « La Rolex Fastnet Race est vraiment une course spéciale », confirme Jean-Pierre. « J'aime le parcours et son histoire. Pour moi, la Fastnet est une course au large légendaire. La côte du sud de l'Angleterre est agréable et le parcours est compliqué avec toujours beaucoup de stratégie. Nous avons les DST où les décisions ne sont pas faciles à prendre et la mer Celtique est souvent difficile ». Jean-Pierre n'a pas encore vécu l’arrivée à Cherbourg-en-Cotentin, mais il connaît bien le port normand. « J'aime bien Cherbourg et les gens sont sympas. J'ai hâte d'y aller ».
Un duel JPK / Jeanneau
Mais c’est dans les catégories IRC 2 et IRC 3, soit au cœur de la flotte en termes de taille, que les duos seront les plus nombreux et la bataille particulièrement intense. Les inscrits sont si nombreux qu’il y aura même plusieurs « matchs dans le match » avec des unités optimisés pour l’IRC, notamment les JPK et les Jeanneau. Au cours de la dernière décennie, JPK a dominé, en partie grâce au talent d’Alexis Loison qui, en 2013, avec son père Pascal sur leur JPK 10.10 Night and Day, est devenu le premier et, à ce jour, le seul duo à avoir emporté le classement général de la Rolex Fastnet Race. Le chantier de Larmor Plage a également cumulé les victoires en équipages (2015, 2021) mais les dernières éditions ont vu les Jeanneau Sun Fast monter en puissance. Dans cette catégorie, réservée aux amateurs les plus éclairés, les Français ont longtemps eu une petite longueur d’avance mais les Britanniques se rapprochent. Lors de la dernière édition, Henry Bomby et Shirley Robertson ont pris la deuxième place à bord du Sun Fast 3300 Swell. L’un des favoris en IRC 2 est d’ailleurs Tim Goodhew qui court à bord de Cora. C’est la quatrième fois que Tim prend le départ en double, accompagné cette fois de Kelvin Matthews. Il a vu le nombre de bateaux courir en double croître régulièrement ces dix dernières années et plus particulièrement depuis l’épidémie de Covid. « C'est vraiment génial parce qu'il y a de très grands marins. La majorité des bateaux se situent dans une fourchette de 30 à 40 points en IRC - ils mesurent tous autour de 10 m de long et sont menés de la même manière. Rien qu'en IRC 3, il y aura environ 70 bateaux. C'est aussi proche que possible d’une course en monotype - tous les bateaux vont à la même vitesse, c'est très tactique et donc très amusant ! »

Une victoire et une pandémie plus tard...
Quel est donc l'intérêt des courir en double ? Ce format est loin d'être nouveau et les premiers à l’adopter étaient certainement ceux qui souhaitaient relever à terme le défi du solitaire. Cependant, sa croissance a suivi l'évolution de la société en général. Certains apprécient notamment de ne pas avoir à gérer les contraintes d’un équipage. Mais deux jalons importants marquent cette évolution : la victoire des Loison en 2013 et la pandémie. En effet, la navigation en double correspondait bien mieux qu’un équipage pléthorique aux contraintes sanitaires ! Nigel de Quervain Colley, importateur Jeanneau en Angleterre, analyse cette évolution : « La plupart des Sun Fast que je vends le sont à des propriétaires de bateaux plus grands qui descendent en taille pour réduire leur budget courses et simplifier leur organisation : moins d'équipage, moins de dépenses, moins de problèmes à gérer. Puis, une fois qu'ils ont essayé, ils adorent parce qu'ils se sentent plus impliqués. Ils deviennent alors vraiment inconditionnels... »
Dans 30 nœuds à deux !
Compte tenu du nombre de concurrents inscrits en double cette année, il est possible que la Rolex Fastnet Race voie pour la deuxième un duo vainqueur au classement général. « C'est tout à fait possible avec un tel niveau», reconnaît Colley. « Le tiers supérieur de cette flotte va aller si vite que les performances seront exceptionnelles. De plus, il est vrai que les bateaux menés en double sont plus légers au portant et partent plus vite au planning ». Les bateaux de dernière génération sont également conçus pour le double. Ils présentent une grande stabilité de forme, avec une étrave semi-scow, et atteignent des vitesses incroyables, en particulier face au vent. « Vous pouvez régater dans 30 nœuds de vent, à deux, c’est tout à fait remarquable », apprécie Colley. « Ils ont une telle stabilité que l'on cherche toujours à porter plus de voilure et, comme pour tout bateau à étrave droite, la ligne de flottaison très symétrique les rend incroyablement bien équilibrés. Nous avons constaté que plus on pousse le bateau, plus il va vite, tout en gardant le contrôle. »