Abandon de Tom Laperche : interview exclusive de Cécile Andrieu, team manager SVR-Lazartigue

Figaro Nautisme : Pouvez-vous nous en dire plus sur les dégâts subis ?
Cécile Andrieu : "Lors d’une collision, la dérive a reculé très fortement dans le puit de dérive et a ouvert entièrement le puit de dérive dans lequel elle était encastrée. En reculant, cette collision a ouvert sur quasiment 2 mètres le fond de coque. Il s'agit du trou que l'on peut observer sur les photos. Tout le carbone alentour est fortement endommagé et structurellement cela a aussi endommagé la capacité du bateau a pouvoir se tenir entre les deux demis coques. Pour expliquer, deux demi-coques sont collées les unes contres les autres donc ce grand trou sous la coque centrale met en péril la façon dont les deux demi-coques forment la coque centrale. Il faut refermer cette boite dans laquelle 9 tonnes d’eau sont rentrées par ce trou. A la suite, il faut reconstituer tout le puit de dérive ainsi que la dérive en elle-même qui est trop endommagée pour être redémarrée."
Le trimaran n'était pas réparable ou bien les réparations auraient été trop longues pour espérer reprendre la course dans un délai raisonnable ?
"Pour repartir en course il aurait fallu des réparations très longues et qui ne sont pas envisageables localement car elles nécessitent un outillage dont on ne dispose qu’à Concarneau, dans le chantier de MerConcept et avec les partenaires avec lesquels on travaille et qui ont conçu le bateau. Pour partir dans de bonnes conditions nous aurions eu besoin d'un puit de dérive, une dérive et un fond de coque renforcé et une structure saine."
Comment vous sentez-vous suite à cette décision ainsi que le reste de l'équipe ?
"La décision d’abandonner est forcement difficile à prendre. On a décidé de prendre les quelques jours de la semaine dernière pour bien y réflechir et poser le pour et le contre. Ce n’est pas une décision manichéenne : ce n'est pas tout blanc ou tout noir. On a pris ce temps avec Tom et avec toute l’équipe pour mesurer ce qu’on était capable de faire localement ou pas. L’ampleur des dégâts est telle que la sortie d’eau a confirmé cette lucidité qu’on doit avoir quand on envoie un skipper en solitaire autour du monde. C'est une épreuve extrêmement difficile, il faut donc avoir la lucidité de constater que les dégâts sont trop importants pour pouvoir continuer. On est forcément déçu, mais on a aussi le sentiment qu’on n'a pas vraiment le choix au vu de la situation."
Quel est votre planning pour les jours à venir ? Et quels sont vos prochains objectifs ?
"Pour les jours à venir le bateau est désormais hors de l’eau à Cape Town. On termine tous les check, notamment structurels pour délimiter jusqu’où la coque centrale est endommagée et pour pouvoir envisager le type de réparation sur le long terme qu’il faudrait mettre en place une fois rentré à Concarneau. Pour déterminer comment on va ramener le bateau, il y a deux options naturelles qui se dessinent : une réparation ici, très complexe, et un retour sur un cargo.
Quelle que soit l’option retenue, le retour à Concarneau est envisagé à la mi-mars, fin-mars. L’idée est de profiter des prochaines semaines pour préparer au mieux le retour du bateau à Concarneau chez MerConcept pour pouvoir commencer à ce moment là le vrai chantier de réparation. Il nous permettra de remettre à l’eau l'Ultim au courant de l’été et de pouvoir participer aux courses de la Classe Ultim qui commencent dès le mois de septembre et surtout le Trophée Jules Verne qui est un tour du monde en équipage dont le début pour le record commencera, à priori, à la mi-octobre."