L'incroyable odyssée de la Calypso, mythique bateau de Cousteau
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Qu’il soit adulé ou détesté, Jacques-Yves Cousteau, « le commandant Cousteau », a marqué l’histoire océanographique française. Il est devenu une figure emblématique du paysage audiovisuel français avec sa pipe et son bonnet rouge. Mais c’est surtout Calypso, son célèbre navire, la véritable héroïne de son aventure qui a débuté en 1951… Nautisme.com vous propose de revenir sur l’histoire de ce bateau mythique.
Calypso a eu une vie avant Cousteau. Conçu en 1942 comme dragueur de mines de la Royal Navy, le navire est mis en service un an plus tard sous le nom beaucoup moins cinématographique de « J-826 ». L’Histoire de la Calypso débute mal. Destinée à la mer Méditerranée, elle est rapidement délocalisée à Malte en 1941, avant d’être définitivement supprimée du registre naval en 1947.
Reconvertie en ferry-boat afin d’assurer la liaison entre Malte et l’île de Gozo, elle prend enfin le nom qu’elle gardera tout sa vie : Calypso, comme la nymphe de la mythologie qui retint prisonnier Ulysse sur l’ile de Gozo pendant dix ans.
Cependant, cette Calypso ne va pas ravir le cœur d’Ulysse mais de Jacques-Yves Cousteau surnommée« le commandant Cousteau », ancien officier de la Marine nationale française et explorateur océanographique…
En 1950, le milliardaire et ancien député Thomas Loel Guinness rachète l’infortuné navire afin de le transformer en yacht de luxe. Il le loue finalement au commandant qui voit déjà dans Calypso, le bateau idéal pour ses expéditions. Quelques transformations sont tout de même nécessaires pour faire de la Calypso un navire d’observation océanographique de premier plan. Il faut notamment y faire construire « un faux nez », c’est-à-dire une chambre d’observation avec 8 hublots permettant d’étudier la vie sous-marine.
Son port d’attache devient la ville de Toulon et un an plus tard, en 1951, le bateau fait ses premiers essais dans les eaux corses. L’équipe d’explorateurs maritimes constituée initialement est très familiale puisque les enfants Cousteau en font même partie !
L’équipe de la Calypso va ainsi multiplier les aventures : chasseur de trésors à quarante mètres de profondeur dans une épave datant du IIIe siècle avant JC, prospection pétrolière au sein du golfe persique… Face aux réussites de leurs explorations, la Calypso se dote d’un nouveau matériel de pointe : caméras, nouveaux outils d’observation scientifique, appareils photos sous-marins, et surtout un petit sous-marin jaune, surnommé Denise. Au fur et à mesure l’équipe s’agrandit et se spécialise. De nouveaux scientifiques prennent leur place dans l’aventure et le célèbre plongeur Albert Falco les rejoint.
Ainsi équipée, Calypso écumera les eaux pendant 40 ans, de l’Océan Indien jusqu’à l’Antarctique, en passant par le fleuve Amazone. Mais ce matériel va surtout permettre au bateau et à tout l’équipage d’être mondialement connus. En filmant ces explorations, le Commandant Cousteau fait de la Calypso un véritable « studio de cinéma ». En 1955, est tourné Le Monde su silence qui reçoit la Palme d’or au festival de Cannes. De 1968 à 1975, la série télévisée L’Odyssée sous-marine de l’équipe Cousteau fait découvrir les richesses de l’océan au grand public. Traduite en anglais, elle est diffusée dans de nombreux pays et remporte un vrai succès populaire.
Aujourd’hui souvent critiquées, pour la manière dont étaient traitées la faune et la flore par l’équipe, les expéditions filmées du commandant Cousteau demeurent de véritables sources d’informations sur la vie sous-marine. Elles sont le reflet des débuts de la recherche sous-marine encore peu développée à l’époque et parfois détachée de certaines préoccupations écologiques et réalités environnementales. Elles illustrent ainsi également ses tâtonnements, avec ses réussites mais aussi ses erreurs.
En 1996, c’est la fin de l’aventure pour la Calypso et son commandant. Le bateau fait naufrage à Singapour, heurté par une barge, un an avant la mort de Cousteau, le 25 juin 1997. Il faut 17 jours pour la sortir de l’eau. Renfloué à Marseille, puis remorqué à la Rochelle, le navire semble prêt à prendre sa retraite. D’autant plus qu’une bataille judicaire se joue en parallèle pour déterminer le propriétaire du bateau mythique. En effet, en 1951, le bateau avait été loué par la famille Cousteau aux milliardaire Guinness et non acheté. En 2007, la propriété de la famille du commandant est finalement reconnue. Les travaux de rénovation peuvent commencer. Cependant, amarrée, au port de Concarneau (Finistère) depuis 2007, les travaux de rénovation s’éternisent. Les relations sont plus que compliquées entre l’équipe du chantier et les Cousteau.
Mais encore une fois, Calypso n’a pas dit son dernier mot ! Cette année, elle a ainsi pris la route de la Turquie pour être enfin restaurée ! Les travaux vont durer deux ans et devraient coûter 10 millions d’euros. Conformément aux vœux de la famille, les travaux viseront seulement à la restaurer afin de lui faire conserver son cachet et non à la transformer. Calypso gardera ainsi sa belle ossature de bois.
Le navire, labellisé « Bateau d’Intérêt Patrimonial » par la Fondation du Patrimoine Maritime et Fluvial (FPMF) en 2012, devrait ensuite pouvoir repartir en mer, afin de continuer à inspirer la jeune génération à défendre les océans, comme l'aurait voulu le commandant Cousteau.
Bon voyage Calypso !