Que restera-t-il de l’île Amsterdam ?

Depuis le 15 janvier 2025, un incendie d’une ampleur sans précédent a ravagé l’île, située dans les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF). Plus de 2 578 hectares ont été consumés, soit 55 % de la surface totale de ce petit confetti volcanique de 58 km². Aujourd’hui, le feu est officiellement éteint, mais des points chauds subsistent et sont activement surveillés, notamment dans les zones de tourbières où une réactivation reste possible malgré le passage de deux tempêtes.Si les installations principales de la base scientifique Martin-de-Viviés ont été relativement épargnées, les pertes matérielles restent lourdes : bâtiments secondaires détruits, réseau électrique endommagé, denrées alimentaires perdues. Les opérations de sécurisation menées par les sapeurs-pompiers du SDIS de La Réunion et les équipes techniques des TAAF ont permis de remettre en service les systèmes vitaux : circulation de l’eau, ventilation, communications internes.Mais l’inquiétude majeure concerne l’environnement. L’incendie a touché l’essentiel des boisements de Phylica arborea, arbre endémique qui façonne les paysages uniques de l’île. L’impact sur la faune, en particulier les oiseaux emblématiques comme l’albatros d’Amsterdam, semble pour l’heure limité. Les falaises d’Entrecasteaux, sanctuaire de nidification, ont été épargnées. Mais pour combien de temps ?
Une histoire qui se répèteCe n’est pas la première fois que l’île Amsterdam est en proie aux flammes. En février 2021, un incendie s’était déclaré près des falaises d’Entrecasteaux. Jugé mineur, il avait été contenu naturellement, faute d’accessibilité. Bien plus tôt, en 1974, des feux de tourbe s’étaient propagés sur les zones côtières. Cette récurrence interroge : les conditions climatiques, toujours plus sèches en été austral, et les végétations inflammables rendent le territoire particulièrement vulnérable.Ajoutons à cela l’isolement extrême de l’île, qui complique l’envoi de secours, et l’on obtient une équation désastreuse pour la biodiversité. Inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2019, l’île Amsterdam est l’un des joyaux des TAAF, protégée par une réserve naturelle nationale. Elle abrite une faune et une flore uniques au monde, souvent endémiques.
Que restera-t-il ?La question n’a rien de rhétorique. Le redéploiement de personnels sur l’île reste suspendu à quatre conditions :1. la disparition des foyers actifs menaçant la base,2. le retour d’un dispositif opérationnel de lutte contre l’incendie,3. l’accès à une eau potable sûre,4. la mise en place de coupe-feux efficaces.La prochaine rotation du Marion Dufresne, navire logistique emblématique des TAAF, sera cruciale. Elle devra acheminer les équipes et matériels nécessaires à la poursuite des interventions, mais aussi à l’évaluation scientifique des dégâts.La reconstruction sera longue, l’impact écologique peut-être durable. Et face à une nature fragilisée par le changement climatique, la vigilance devient vitale. L’île Amsterdam survivra sans doute à cet épisode. Mais son équilibre, lui, pourrait ne jamais retrouver sa forme originelle.