
Ce mardi 3 décembre à la mi-journée, Louis Burton a doublé le Cap de Bonne Espérance, premier des trois grands caps qui jalonnent le parcours de 24 000 milles du tour du monde en solitaire. Le skipper de Bureau Vallée s’engage désormais pour un mois de navigation dans les eaux tumultueuses des océans Indien et Pacifique Sud, avec la confiance en son bateau et la volonté farouche de grappiller des places au classement. « Physiquement, je suis en pleine forme, j’ai juste une petite charge mentale en plus, celle de rentrer dans le Grand Sud avec un bateau réparé. Mais j’observe plusieurs fois par jour la solidité des réparations, même quand ça bastonne. A priori, rien à dire, on y va confiant ! » confiait Louis tôt ce matin. Actuellement en 16eme position, Louis bataille ferme avec ses concurrents les plus proches et s’attend, dans les heures à venir, à des conditions de navigation énergivores en termes de manœuvres et de changements de voiles…
Le bruit est strident. On perçoit le choc des vagues contre la coque. Par 42 degrés Sud, Bureau Vallée glisse à plus de 18 nœuds de moyenne depuis 24 heures, cap à l’Est vers les mers australes. « En ce moment j’ai 22 nœuds de vent d’ouest avec des rafales à 30, sur une mer très hachée et des creux de 3,50 mètres. Il faut doser entre la vitesse et la prudence… » racontait Louis Burton quelques heures avant de doubler la longitude du Cap de Bonne Espérance. Adieu l’Atlantique Sud, bonjour l’Indien et son caractère impétueux ! « Je suis content de rentrer dans les mers du Sud, et à la fois, j’ai eu un petit moment de déprime au moment d’y rentrer. Cela fait toujours un peu bizarre de quitter les océans à peu près civilisés pour rentrer dans ce superbe océan austral mais qui peut être violent et difficile à vivre. Il faut s’habituer à rentrer en mode Grand Sud. On sort le matos, il fait froid là ! » poursuivait le skipper de Bureau Vallée.
Entre compétition et auscultations
Depuis l’avarie conséquente survenue le 16 novembre dernier, l’incroyable réparation des fissures sur le bordé et le plat-bord bâbord de Bureau Vallée effectuée seul, avec les moyens du bord, a tenu. Cela fait maintenant plus de 15 jours que Louis Burton est retourné dans le match, passant de la 25e à la 16e place au classement provisoire du Vendée Globe, ce mardi 3 décembre. « Je suis content d’avoir réussi à rattraper mon petit groupe, je suis là pour faire de la compétition, de la vitesse et de la stratégie, donc avoir des concurrents avec qui se tirer la bourre est essentiel pour la motivation. Ça pousse vers l’avant. » se réjouit Louis Burton, qui plusieurs fois par jour fait un état des lieux des réparations. Plus encore, avant d’attaquer le gros morceau du Vendée Globe dans ces contrées sauvages, le skipper de Bureau Vallée a réalisé un contrôle drastique : « L’idée, c’est de faire un check complet du bateau, ce que j’ai fait hier, c’est-à-dire ausculter le moindre centimètre carré de la coque ».
Paré à esquiver les flèches de l’Indien
Le Grand Sud, c’est un train permanent de dépressions filant d’Ouest en Est sur une mer forte car jamais freinée par la terre. Après deux tours du monde, Louis connaît ces parages à la fois grandioses et violents. Les jours à venir promettent des conditions toniques voire brutales certes, mais à la fois très stratégiques : « Avec Damien (Seguin), Pip (Hare), Benjamin (Dutreux) et Romain (Attanasio), nous sommes entre deux systèmes dépressionnaires importants. On est en train de sortir d’une petite dépression secondaire et on peut observer qu’il y en a une très grosse devant la tête de flotte et une balèze derrière nous. Ce qui est assez rare dans l’océan Indien, c’est que nous allons devoir gérer des phases de transition avec moins de vent et du près, comme si on était en bordure anticyclonique. L’avantage, c’est que normalement, on ne devrait pas subir de grosse tempête, mais l’inconvénient est que nous allons devoir rester au taquet sur les changements de voiles et les manœuvres pour rester rapides malgré les transitions et ne pas se faire rattraper trop vite par les dépressions. » confie le skipper de Bureau Vallée visiblement bien décidé à réduire l’écart, autant que possible, avec ses camarades de jeu aux avant-postes : « La route est longue, nous avons encore des milliers de milles nautiques à parcourir, rien n’est jamais joué. Tout va super bien sur Bureau Vallée, je suis vigilant par rapport au bateau, mais à 100% ! ».
Les mots de la mer de Louis Burton
« Le fait d’être décroché du peloton de tête, je le prends avec philosophie. J’ai un peu changé de mode à la seconde où j’ai été contraint de réparer mon bateau. Vu le rythme que j’imprimais alors que j’étais aux avant-postes, je savais que ça allait vite partir par devant, d’autant qu’ils ont eu des conditions super pour traverser l’Atlantique Sud. Ils étaient dans le bon timing. J’étais certain que mes 400 milles de retard allaient se transformer en 3 fois plus. Avec Pip (Hare), nous nous sommes parlés à la VHF : c’est sympa, elle a racheté mon ancien bateau, on a fait le tour de l’Europe ensemble il y a 4 ans. Avec son équipe, Pip a fait un super boulot pour remettre le bateau au goût du jour. Elle sait aller vite notamment dans le Grand Sud. En ce moment, je suis entouré par des dizaines de Fous de Bassan qui doivent bien se demander ce que je fous là ! Ils s’amusent avec mon oiseau noir ! Ils sont rapides, je n’arrive pas à les dépasser. »
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