
Blanc, évidemment... mais pas n’importe lequelIl faut le dire : le vin blanc reste le compagnon naturel des produits de la mer. Mais derrière cette évidence se cache une incroyable diversité. Entre un bar rôti, une sole meunière, des coquillages en persillade ou un ceviche au citron vert, les profils aromatiques explosent, et les blancs doivent s’adapter.Les huîtres, iodées et parfois tranchantes, appellent des vins acides, secs, vifs. Le muscadet, fidèle allié de l’Atlantique, joue ce rôle à merveille, avec ses arômes de pierre à fusil et sa minéralité salivante. On pense aussi à un petit sancerre bien tranchant ou à un chablis tendu et droit, parfaits pour répondre au côté salin du produit.À l’inverse, lorsqu’on passe sur des chairs plus grasses, cuites au beurre ou à la crème, il faut du volume, de la rondeur. Un meursault ou un saint-aubin en Bourgogne, un viognier des Côtes-du-Rhône ou un blanc de Provence élevé sur lies offrent cette texture enveloppante qui fait fondre le palais.Et attention à la cuisson : un poisson vapeur n’exige pas le même vin qu’un pavé saisi à la plancha. La sauce, elle aussi, joue le rôle d’arbitre. Un vin peut être idéal pour le poisson… jusqu’à ce que la crème ou le citron fasse basculer l’équilibre.
Et les blancs un peu différents ?Quand on parle de poissons et de fruits de mer, on pense spontanément à des blancs secs. Mais certains blancs plus aromatiques méritent une place à part. Les rieslings allemands (en version trocken), les grillo de Sicile ou même certains vins grecs comme l’assyrtiko offrent une intensité surprenante, idéale pour des plats plus épicés ou des ceviches bien relevés.On peut même oser un vin orange – blanc vinifié comme un rouge, avec macération des peaux – pour accompagner une cuisine fusion, des sashimis ou des plats thaï. La légère astringence du vin vient alors répondre à la complexité du plat, sans jamais l’écraser.
Et le rouge dans tout ça ?Longtemps banni des tables de la mer, le rouge revient doucement dans la course. Mais pas question de sortir un grand Bordeaux tannique sur des moules marinières. Ce qu’on cherche ici, c’est de la finesse, de la légèreté, de la fraîcheur.Certains rouges peu extraits, aux tanins fondus, fonctionnent très bien. Un pinot noir d’Alsace ou de Bourgogne, légèrement rafraîchi, peut accompagner un filet de thon snacké ou une daube de poulpe. Le gamay, en version nature ou sur le fruit, s’invite sans gêne sur une bouillabaisse légère ou des sardines grillées. Et quand on sort des sentiers battus, on découvre des pépites : un frappato de Sicile ou un cinsault du Languedoc viennent même souligner les épices d’un plat de crevettes au curry.Il suffit parfois de décanter les préjugés autant que la bouteille.

Les bulles, ces grandes alliées sous-estiméesLes vins effervescents, souvent relégués à l’apéritif, ont bien plus à dire. Leur acidité naturelle, leurs fines bulles, leur fraîcheur tranchante les rendent parfaits pour escorter une grande variété de plats de la mer.Un bon crémant (d’Alsace, de Bourgogne ou de Loire), une blanquette de Limoux, un champagne extra-brut : tous ces vins jouent sur la vivacité. Leur attaque franche nettoie le palais entre chaque bouchée, révèle les chairs tendres des coquilles Saint-Jacques, allège le beurre d’un homard, rafraîchit les épices d’un plat asiatique. L’accord fonctionne aussi bien sur un simple plateau de fruits de mer que sur des bouchées plus élaborées.Et entre nous, quoi de mieux qu’un verre de bulles fraîches pour ouvrir un déjeuner face à la mer ?
Le rosé, mal-aimé mais pertinentSouvent rangé dans la catégorie "vin de terrasse", le rosé souffre encore d’un déficit d’image. Et pourtant, il a toute sa place à table, notamment sur les plats estivaux à base de poissons grillés, de salades de calamars ou de brochettes de gambas.Bien choisi – ni trop sucré, ni trop fluet –, un rosé de Provence ou de Corse peut parfaitement relever une soupe de poissons, un loup farci aux herbes ou une bouillabaisse légère. Il faut simplement éviter les rosés trop aromatisés ou très commerciaux, qui saturent vite le palais.
L’accord parfait ? Celui qui respecte le plat… et le momentLes règles sont utiles, les traditions rassurantes, mais les accords réussis sont souvent ceux qui surprennent. Le vin idéal est celui qui respecte l’assiette, bien sûr, mais aussi l’instant : un déjeuner en terrasse, une assiette improvisée entre amis, un dîner un peu festif.Il ne s’agit pas seulement de choisir le "bon" vin, mais d’éviter le mauvais accord. Un vin trop tannique avec un poisson, c’est l’effet métallique assuré. Un vin trop aromatique avec un crustacé délicat, et c’est toute la finesse du plat qui disparaît.À l’inverse, un accord bien pensé sublime les deux. Il donne envie de resservir, de prolonger la conversation, de refaire le plat… et de racheter la bouteille.En somme, accorder un vin avec un poisson ou un fruit de mer, c’est un peu comme une danse. Il faut du rythme, de l’écoute, un brin d’audace… et beaucoup de plaisir.