Philippines : les tortues olivâtres plus que jamais en danger

Culture nautique
Par Figaronautisme.com

Menacées par la consommation humaine, le commerce illégal, le tourisme mal encadré et la destruction de leur habitat, les tortues olivâtres aux Philippines demeurent dans une situation fragile. Pourtant, ces dernières années, plusieurs initiatives locales ont vu le jour pour inverser la tendance. Un équilibre difficile à maintenir, entre traditions locales, pressions économiques et impératifs écologiques.

©AdobeStock
Menacées par la consommation humaine, le commerce illégal, le tourisme mal encadré et la destruction de leur habitat, les tortues olivâtres aux Philippines demeurent dans une situation fragile. Pourtant, ces dernières années, plusieurs initiatives locales ont vu le jour pour inverser la tendance. Un équilibre difficile à maintenir, entre traditions locales, pressions économiques et impératifs écologiques.

Une espèce encore vulnérable
Présente dans l’ensemble de l’océan Pacifique et de l’océan Indien, la tortue olivâtre (Lepidochelys olivacea) figure sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) en tant qu’espèce « vulnérable ». Aux Philippines, elle est l’une des cinq espèces de tortues marines recensées, et l’une des plus menacées.
Comme de nombreuses espèces marines, elle subit de multiples pressions : la pêche industrielle, qui provoque des captures accidentelles ; la collecte illégale d’oeufs ; la consommation de sa chair ou de ses organes, encore valorisés dans certaines pratiques médicinales ou rituelles ; et enfin, le développement du tourisme sur les côtes, souvent peu régulé, qui dérange les sites de ponte ou perturbe le comportement naturel des jeunes tortues.
Malgré l’adhésion des Philippines à plusieurs conventions internationales interdisant le commerce de tortues de mer, ces pratiques perdurent. Dans certaines régions, leur chair reste une source de protéines pour les populations locales, et les oeufs sont vendus au marché noir. D’autres spécimens sont exportés illégalement, notamment vers la Chine, où la demande reste forte.

Des trafics toujours actifs et difficiles à contrôler
Selon les observateurs sur le terrain, les réseaux de contrebande restent actifs, notamment dans les régions reculées du pays. Des bateaux étrangers s’approcheraient des côtes pour acheter directement des tortues capturées par des pêcheurs locaux. Cette pression externe, conjuguée à la pauvreté persistante de certaines communautés côtières, rend l’application des lois très difficile. Le territoire maritime philippin est vaste - plus de 7 000 îles, avec une immense zone côtière - et les moyens de surveillance restent limités.
À cela s’ajoutent les effets du changement climatique. L’érosion des plages et la montée du niveau de la mer réduisent les sites de ponte accessibles aux femelles. Les températures plus élevées peuvent aussi perturber le sex-ratio des naissances, qui dépend de la température du sable lors de l’incubation.

Des initiatives locales qui changent la donne
Face à cette situation, des programmes communautaires se sont structurés, avec le soutien d’ONG locales et d’institutions gouvernementales. Plusieurs initiatives récentes ont montré des résultats encourageants.
Dans la province d’Occidental Mindoro, plus de 1 600 bébés tortues ont été relâchés entre novembre 2024 et mars 2025, un chiffre record pour la région. À Bagac (Bataan), 1 800 tortues ont retrouvé la mer en février 2025, dans le cadre d’un programme coordonné avec des écoles, des pêcheurs et des bénévoles. Des actions similaires ont eu lieu à Surigao City, Sarangani Bay et sur l’île de Biliran, où un sanctuaire marin a été créé à Higatangan pour protéger les sites de nidification.
Ces efforts s’accompagnent souvent de campagnes d’éducation auprès des communautés, pour sensibiliser les habitants à l’importance de la conservation, mais aussi proposer des alternatives économiques. L’écotourisme responsable en fait partie, à condition qu’il soit encadré.

Nautisme Article
© AdobeStock


Vers un tourisme plus éthique
Le tourisme représente à la fois une menace et une opportunité. Dans des endroits comme Morong, où des tortues viennent pondre entre octobre et février, les jeunes tortues sont parfois utilisées pour attirer les visiteurs. Des oeufs sont placés en captivité jusqu’à l’éclosion, afin de permettre aux touristes de manipuler les bébés et de les relâcher en pleine lumière, souvent au mépris de leur cycle naturel.
Certaines organisations, comme le Large Marine Vertebrates Research Institute Philippines (LAMAVE), travaillent avec les communautés pour développer des pratiques plus éthiques : observation à distance, formation de guides locaux, limitation des interactions humaines. L’objectif est de préserver l’expérience touristique sans nuire à l’animal.

La préservation des tortues olivâtres passe par un engagement de long terme, à l’échelle locale comme nationale. Cela implique une meilleure application des lois existantes, des moyens accrus pour surveiller les zones à risque, mais aussi une mobilisation continue des populations riveraines, premières gardiennes de ces plages devenues si précieuses.
Car malgré les relâchers réussis et les campagnes de sensibilisation, la pression reste forte. Sans une implication durable de tous les acteurs - autorités, ONG, chercheurs, touristes et habitants - les avancées pourraient rester fragiles. La tortue olivâtre continue de tracer sa route entre les vagues et les filets, entre l’admiration qu’elle suscite et les dangers qu’elle affronte.


L'équipe
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
Jean-Christophe Guillaumin
Jean-Christophe Guillaumin
Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
Charlotte Lacroix
Charlotte Lacroix
Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
Max Billac
Max Billac
Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
Denis Chabassière
Denis Chabassière
Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
Michel Ulrich
Michel Ulrich
Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
METEO CONSULT
METEO CONSULT
METEO CONSULT
METEO CONSULT est un bureau d'études météorologiques opérationnel, qui assiste ses clients depuis plus de 30 ans. Les services de METEO CONSULT reposent sur une équipe scientifique de haut niveau et des moyens techniques de pointe. Son expertise en météo marine est reconnue et ses prévisionnistes accompagnent les plaisanciers, les capitaines de port et les organisateurs de courses au large depuis ses origines : Route du Rhum, Transat en double, Solitaire du Figaro…
Cyrille Duchesne
Cyrille Duchesne
Cyrille Duchesne
Titulaire d'un doctorat en Climatologie-Environnement, Cyrille est notre expert METEO CONSULT. Après avoir enseigné la climatologie et la géographie à l'université, il devient l'un des météorologues historiques de La Chaîne Météo en intégrant l'équipe en 2000. Spécialiste de la météo marine, il intervient également en tant qu'expert météo marine pour des courses de renommée mondiale, comme la Route du Rhum, la Solitaire du Figaro, la Transat Paprec...