
Sur l’eau tout d’abord, il y a eu ce double départ fin Novembre à l’assaut du solide record (quatre ans déjà) de l’équipage de Francis Joyon sur Idec : 40 jours, 23 heures et 30 minutes. D’un côté Thomas Coville et ses 7 équipiers sur leur soucoupe volante multicolore, de l’autre 6 hommes au taquet sur la machine de référence de ces dernières saisons, le trimaran Gitana drivé par le duo Cammas-Caudrelier. La météo et donc le parcours d’Idec étaient parfaits. Seule l’évolution technologique des bateaux et leur capacité à voler (au moins 50% du temps) peut leur permettre de battre le record. Mais les oiseaux sont fragiles. Gitana est le premier à faire demi-tour. Cela ne fait que trois jours qu’ils sont partis, ils sont déjà à la latitude du Cap-Vert, quand ils heurtent un Ofni. Cet abandon précoce leur donnera au moins le temps de pouvoir repartir cet hiver si une nouvelle bonne fenêtre météo s’ouvre, ce qui semble être le cas ce vendredi 08 Janvier.

L’équipage de Sodebo, plus soudé que jamais en mode mini équipe de Rugby sous l’influence du coach Fabien Galthié, continue sa route. La descente de l’Atlantique à fond met le trimaran en avance à la longitude du Cap de Bonne Espérance. La météo dans l’Indien, comme l’ont vécu les marins du Vendée Globe, est beaucoup plus compliquée alors que Francis Joyon a accroché une dépression qui l’a emmené d’une seule traite en Australie ! Retard surmontable ou pas, le débat sera vite tranché par une avarie de safran. Même réparé, la machine n’est plus fiable à 100% et Thomas Coville, en bon marin, préfère ramener équipiers et bateau en sécurité, via une escale technique à La Réunion. Alors que le Maxi Edmond de Rothschild vient de repartir pour une deuxième tentative, que retenir de ces deux premiers runs ? Tout d’abord que Sodebo dans sa nouvelle version upgradée est au niveau du vainqueur de la dernière Brest Atlantiques, ce qui n’était pas le cas il y a un an lors de cette même course. Qu’il faudra pour battre ce record, en plus d’une météo parfaite et d’une fiabilité à toute épreuve de ces voiliers de haute technologie, un peu de chance pour éviter animaux marins et ofnis, contre lesquels un choc à 35 ou 40 nœuds est souvent fatal à l’appendice qui les rencontre.

Les marins restés à terre n’ont pas chômé non plus malgré cette période de fête. L’assemblage de Banque Populaire XI se poursuit à Lorient. La mise à l’eau est toujours prévue au printemps et il vient de recevoir sa casquette de roof.

A quelques mètres de là, l’équipe Actual Leader, ponce l’ancien Macif dont ils viennent de faire l’acquisition, afin de le mettre à ses nouvelles couleurs. Yves Le Blevec poursuit sa progression dans la classe Ultim avec un troisième bateau encore plus compétitif. Une belle récompense pour un parcours et une démarche intelligente, qui n’a d’égal que la sympathie et la compétence du bonhomme. Son ancien bateau, ex-Sodebo Ultim, est déjà revendu mais le nom de l’acquéreur reste pour l’instant confidentiel. On pense à Pascal Bidegorry dont l’on connaît l’envie d’intégrer cette classe prestigieuse. Mais le bateau a-t-il le niveau de performance suffisant pour intéresser l’exigeant marin basque, ou correspond-t-il plus au projet plus aventure technologique d’un Marc Thiercelin ? Nous devrions avoir la réponse sous peu.

Pendant ce temps-là, à quelques kilomètres plus au Nord, à Concarneau, François Gabart vit une situation cornélienne. Son chantier Mer Concept continue d’assembler le trimaran M101 qui lui était destiné, pour le compte d’un sponsor qui a entre-temps décidé d’abandonner le projet, et cherche donc à le revendre. Bien sûr le jeune prodige-entrepreneur a la priorité pour le racheter, mais trouver un ou des partenaires de l’envergure nécessaire pour un tel projet n’est certainement pas aisé en cette période économiquement très troublée.

Pourtant le calendrier des mois et années à venir est alléchant. La Transat Jacques Vabre-Normandie-Le Have accueillera à nouveau les Ultims en Octobre prochain. La destination finale n’est pas encore connue, et leur parcours sera peut-être rallongé pour regrouper les arrivées et ne pas froisser les autres classes, notamment les Imoca, mais la vitrine s’annonce belle. En 2022 ce sera la mythique Route du Rhum et en 2023 le tour du monde en solitaire lors de la Brest Océans. Une course à l’organisation de laquelle s’attache désormais à plein temps Emmanuel Bachellerie, ayant quitté son rôle au sein de la Classe 32/23 à proprement parler. La classe d’armateurs va donc devoir se trouver une nouvelle gouvernance. Si le différent autour de l’asservissement des foils est aplani et que, notamment, Gitana revient dans le jeu, le plateau présenté pourrait être séduisant dès la fin de cette année, avec pas moins de 7 bateaux sur la ligne de départ au lieu de 3 il y a un an.