Sous la menace de l'anticyclone

Par Figaronautisme / Vendée Globe

Confrontés à l’anticyclone qui s’assoupit sur la zone des glaces, ou parés à gérer une dépression qui vient couper la route 800 milles plus loin, le top 15 de ce Vendée Globe travaille à exploiter les moins mauvaises options qui lui sont proposées.

Sous la menace de l’anticyclone qui paraît bien motivé par l’idée de venir, pile dans la trajectoire de la flotte, adosser son gros ventre mou sur la ligne virtuelle de la zone des glaces, la tête de la course cherche la moins mauvaise des solutions. Depuis sa position de leader, 93 milles devant Charlie Dalin ce matin, Yannick Bestaven (Maître CoQ IV) semble résolu à cheminer le long de la limite des glaces, avec la conscience qu’il lui faudra accepter de ralentir sévèrement jeudi ou vendredi. Les hautes pressions lui fondent dessus, par le Nord-Ouest. S’il parvient à s’immiscer dans le tout petit couloir qui lui est accordé dans la bordure de l’anticyclone jusqu’à vendredi, l’Arcachonnais se sera alors offert un bien joli cadeau.

En ce mardi matin, bien malin qui pourrait dire ce que projettent de faire Charlie Dalin et Thomas Ruyant. Respectivement à 93 et 175 milles du leader, les skippers d’Apivia et de LinkedOut devraient renoncer à l’option Sud pour, contre leur gré sans doute, reprendre du Nord pour éviter l’œil de l’anticyclone. On imagine que ni la perspective de voir les chasseurs de tête Boris Herrmann, Jean le Cam et Benjamin Dutreux venir coller leur tableau arrière ni celle de voir Yannick Bestaven s’échapper par l’avant les mettra à la fête, Il leur faudra la jouer fine pour, probablement, couper au mieux dans le gras de cet anticyclone qui a décidé de ralentir encore un tempo loin d’être haletant.

Haletant, ce Vendée Globe, l’est, pourtant, à tous les étages. Il faut savoir goûter l’ironie que met la météo à confronter les IMOCA les plus rapides jamais construits aux conditions les plus impropres à la vitesse. Il faut apprécier en gourmets que des bateaux de dernière génération, faits pour la glisse, soient challengés par des unités plus anciennes taillées pour le tout-terrain. Il faut se réjouir qu’un skipper qui s’entraîne dans son coin - et dont l’autre métier est d’équiper d’hydrogénérateurs une bonne partie des IMOCA - mène la danse devant des marins des plus grandes écoles de navigation de France ; qu’un supporter du Stade Rochelais né à Arcachon soit leader de la ligue du Tour du Monde devant un Normand, un Nordiste et un Allemand.

Il faut surtout jubiler à l’idée que, samedi prochain, il puisse n’y avoir que 100 milles d’écart entre le premier et le huitième. Les huit éditions qui ont précédé ce Vendée Globe ont souvent fait de la remontée de l’Atlantique Sud le temps faible de la course. On est rassuré : cette année, personne ne va s’ennuyer une minute.

Le Père Noël est une bordure

Pendant que la tête de la course cherche à se dépêtrer de cet anticyclone, Louis Burton (Bureau Vallée 2) et Clarisse Crémer (Banque Populaire X) ont affaire à une dépression qui dévale de l’Est de la Nouvelle-Zélande et qui va recéler une bonne trentaine de nœuds de vent de Nord en son sein. Les 120 milles d’écart entre ces deux bateaux indexent les attitudes de chacun. Louis Burton va tenter le tout droit le long de la zone d’exclusion antarctique. C’était en tout cas son plan ce matin, à la condition qu’il ait réussi à renvoyer sa grand-voile haute, ce qu'il s'apprêtait à faire avant que sonne son iridium. « Les réparations (en tête de mât) ont l’air solides, j’ai réussi à empanner plusieurs fois, je me lance, expliquait le Malouin ce matin en vacation. Si j’y parviens, je naviguerai grand-voile haute pour la première fois depuis un mois ! »

12e à 831 milles de la tête, le voltigeur de Macquarie n’a pas dit son dernier mot : s’il parvient à passer sous la dépression sans trop se faire secouer, il pourrait revenir dans le peloton de chasse. Son goût pour les options engagées pourrait lui permettre alors de rendre dingues quelques bookmakers.

Avec bon sens, Clarisse Crémer a transigé autrement face aux scénarios que lui suggèrent la même dépression. « C’est désagréable de devoir s’arrêter, surtout quand tu as bien avancé, comme je l’ai fait des dernières heures. Mais c’est encore plus désagréable d’abîmer un bateau ».

Armel Tripon (L'Occitane en Provence) a été le plus rapide de la nuit, avec une moyenne à 17,4 noeuds depuis le classement de 21 heures, pour 128 milles engloutis. Le Nantais pourrait aller plus vite encore dans les heures à venir s'il parvient à rester à l'avant du front dépressionnaire qui vient du Nord-Nord Ouest en le nourrissant d'un vent à 20 noeuds minimum. De quoi lui permettre de faire voler son plan Manuard. De quoi recoller à Clarisse Crémer, avant de marquer le pas, lui aussi, face au mur dépressionnaire qui s'annonce devant.

15e, Alan Roura va vite, lui aussi. Le jeune Suisse vient d'en terminer avec le plateau AMSA de la zone d'exclusion antarctique, et il va pouvoir descendre en latitude, mais il va peut-être attendre quelques heures pour plonger : dans son Sud, une dépression venue de l'Ouest devrait l'inciter à rester dans des vents plus calmes. Cette session devrait cependant lui permettre de creuser un différentiel supplémentaire avec Arnaud Boissières (La Mie Câline - Artisans Artipôle) qui a franchi cette nuit le cap Leeuwin. Les prochains à franchir le cap australien seront Pip Hare (Medallia), Stéphane le Diraison (Time for Oceans) et Didac Costa (One Planet One Ocean). Tout ce petit groupe, a profité de vents soutenus pour maintenir des moyennes à 15 noeuds durant la nuit.

Derrière, Alexia Barrier a connu une mésaventure. Hier, la skipper de TSE - 4myPlanet a voulu envoyer un vieux gennaker et, ce faisant, elle y a découvert un trou, "Une fenêtre d'environ un mètre carré. Je vais avoir 20 noeuds de vent d'ici la fin de journée, je vais empanner, mais est-ce que j'envoie mon autre gennaker ? Je ne sais pas si c'est le moment de prendre des risques, je sais qu'il me servira plus dans les semaines à venir. Mais comme je n'ai pas envie de me faire larguer par Miranda (Merron) et Clément (Giraud)..."

Pour finir, Ari Huusela (Stark) a franchi les Kerguelen, Sébastien Destremau (Merci) est toujours sur une route conservatrice au Nord. Il devrait voir passer dans son Sud Sam Davies (Initiatives-Coeur), hors course, mais résolue à terminer sa boucle autour du monde. Sans traîner.

L'équipe
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Jean-Christophe Guillaumin
Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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