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Lors de sa conception, rien ne prédisposait le HMS Beagle, à devenir un navire mythique. Navire de la classe cherokee, appartenant à la Royal Navy, il est mis à l’eau pour la première fois en mai 1820 sur la Tamise. En juillet, il prend part au couronnement du roi Georges V et devient le premier navire à passer sous le London Bridge. Ensuite, plus rien : pendant près de 5 ans, il est laissé à l’abandon. Le Beagle est plus un navire d’apparat et la Royal Navy peine à lui trouver une utilité.
Pourtant en 1825, le Beagle est réhabilité. L’artillerie est réduite, un mât est ajouté et voilà le Beagle transformé en navire de recherche ! Ses débuts en tant que navire d’exploration scientifique sont difficiles. En 1826, le bateau part pour son premier voyage, direction la Patagonie et la Terre de feu, avec à sa tête le commandant Pringle Stocks. Mais le voyage tourne court. Le commandant, victime de la solitude, tombe en dépression et tente même de suicider !
En 1831, un nouveau commandant le remplace, un jeune aristocrate Robert FitzRoy, qui deviendra l’un des premiers météorologues du monde. Pour éviter qu’un drame comme celui de Pringle Stocks se produise, le commandant choisit de partir en compagnie d’un jeune homme, tout juste diplôme de théologie à l’Université de Cambridge : Charles Darwin, qui devient le naturaliste du groupe. Le Beagle part pour son second voyage, qui durera 5 ans du 21 décembre 1831 au 2 octobre 1836. Ce voyage va permettre à Darwin, alors âgé de 22 ans, de développer et de confirmer les théories qu’il avait probablement commencé à esquisser quelques années auparavant. Pourtant élevé dans une tradition créationniste, comme les gens de son époque, et aspirant initialement à devenir pasteur, ce voyage va changer sa vision de l’origine du monde et celles des futures générations.
L'expédition prévue initialement pour deux ans en dura finalement presque cinq. Le bateau les conduira un peu partout dans le monde : au Brésil, au Chili, à Tahiti, en Australie….
De décembre 1831 à février 1832 , le bateau fait le voyage de Plymouth (Angleterre) jusqu’à Bahia (Brésil) où Darwin est choqué par l’esclavage « On avait amené cet homme à une dégradation plus grande que celle du plus infime de nos animaux domestiques.» écrit-il. De février 1832 à octobre 1835 , le bateau explore l’Amérique du Sud.
A partir d’octobre 1835, l’équipage part explorer les îles Galápagos. C’est sur ces îles que Darwin va développer l’une de ses théories les plus intéressantes, celle de la "sélection naturelle", de la survie des mieux adaptés en observant comment chacune des îles a engendré des espèces de pinsons génétiquement différentes et adaptées à leurs environnements spécifiques. En octobre 1836, le Beagle et son équipage rentre en Angleterre. Darwin ramène un journal de voyage de près de 770 pages et des milliers d’échantillons récoltés durant les expéditions. Vingt-trois ans plus tard, en 1859, son livre L’origine des espèces au moyen de la sélection naturelle, ou la Préservation des races favorisées dans la lutte pour la vie est publié, avec l’impact que l’on connait sur la science.
Pendant ce temps-là, le Beagle continue sa route. En 1837, le Beagle réalise son troisième voyage afin d’étudier la côte australienne sous les ordres du commandant John Clements Wickham.
En 1845, le navire continue sa carrière mais en tant que garde-côte sur la rivière Roach pour la Royal Navy ! Il réalise notamment des opérations de surveillance de contrebande. Il est renommé W.V-7. En 1870 , c’est la fin du Beagle. Il est vendu à afin d’être démantelé. Son bois est utilisé pour construire une ferme…
Par la suite, le nom de Beagle fut donné à de nombreux navires anglais qui ne connurent malheureusement pas la même renommée. Aujourd’hui, une seconde vie est en quelque sorte donnée au bateau puisqu'une réplique à l’identique de celui-ci est en train d’être construite par le musée de Nao Victoria Museum au Chili.
"J'ai toujours senti que je devais à ce voyage la première formation ou éducation de mon esprit. Je fus conduit à m'occuper de diverses branches de l'histoire naturelle, et ainsi s'accrut ma puissance d'observation, bien qu'elle ait toujours été assez développée.» Charles Darwin