Leif Erikson, le viking qui toucha l’Amérique avant Colomb

Culture nautique
Par Figaronautisme.com

Nous poursuivons notre traversée dans le sillage des grands navigateurs, ceux qui ont façonné les routes maritimes bien avant les cartes et les chroniques officielles. Après avoir levé le voile sur la vie tumultueuse d’Erik le Rouge et sa conquête du Groenland, cap désormais sur son fils, Leif Erikson. Héritier du sang viking et du goût de l’inconnu, il aurait, selon de nombreuses sources, été le premier Européen à poser le pied sur le continent américain, cinq siècles avant Christophe Colomb. Qui était cet homme, et qu’est-ce qui a réellement motivé son voyage vers l’ouest ?

©AdobeStock
Nous poursuivons notre traversée dans le sillage des grands navigateurs, ceux qui ont façonné les routes maritimes bien avant les cartes et les chroniques officielles. Après avoir levé le voile sur la vie tumultueuse d’Erik le Rouge et sa conquête du Groenland, cap désormais sur son fils, Leif Erikson. Héritier du sang viking et du goût de l’inconnu, il aurait, selon de nombreuses sources, été le premier Européen à poser le pied sur le continent américain, cinq siècles avant Christophe Colomb. Qui était cet homme, et qu’est-ce qui a réellement motivé son voyage vers l’ouest ?

À l’aube de l’an 1000, alors que l’Europe médiévale s’enlise dans ses guerres féodales, une voile se dessine au large de l’Atlantique Nord. Elle n’est ni espagnole ni portugaise, mais scandinave. À son bord, un homme droit, élevé dans les tempêtes du Groenland et forgé par l’héritage d’un père en exil : Leif Erikson, fils d’Erik le Rouge. Ce nom évoque aujourd’hui une légende, celle du premier Européen à avoir foulé les rivages de l’Amérique du Nord, bien avant Christophe Colomb. Mais derrière cette figure semi-mythique se cache un navigateur rigoureux, un explorateur déterminé et un acteur stratégique de l’expansion viking.

L'héritage du Rouge
Leif naît vers 970, probablement en Islande, alors que son père Erik le Rouge s’apprête à fonder la première colonie européenne au Groenland. Il grandit dans un monde de fjords glacés, de récits d’exploration et de batailles. Loin de se contenter de ce que son père a bâti, Leif regarde déjà plus loin. Car chez les Erikson, l’aventure n’est pas une échappatoire, c’est un héritage.
À la fin du Xe siècle, le Groenland, bien que récemment colonisé, commence à se structurer autour de petites communautés. Mais le territoire, austère et peu fertile, reste un point de passage. Les rumeurs vont bon train chez les marins : plus à l’ouest, au-delà des glaces et des brouillards, un autre pays existerait. Un marchand islandais, Bjarni Herjólfsson, aurait même aperçu une terre inconnue en dérivant à l’ouest lors d’une tempête, sans jamais y accoster.
Leif reprend ce fil. Il écoute, questionne, et, selon la Saga des Groenlandais, achète le navire de Bjarni. Un geste pragmatique, mais aussi ambitieux : s’équiper du même vaisseau ayant frôlé l’inconnu, pour aller jusqu’au bout de cette route inachevée.

Nautisme Article
Parcours supposé de Leif Erikson

Cap vers Vinland
Vers l’an 1000, Leif Erikson lève l’ancre depuis le Groenland avec un équipage d’environ 35 hommes. L’expédition suit une logique méthodique : longer la côte, cartographier les découvertes, évaluer les ressources. D’après les sagas, la première terre abordée serait Helluland, une région plate et couverte de pierres — aujourd’hui souvent identifiée à l’île de Baffin. Puis vient Markland, « la terre des forêts », correspondant vraisemblablement au Labrador. Enfin, plus au sud, ils atteignent une région au climat doux, où la vigne sauvage abonde : Vinland.
Ce Vinland, dont le nom évoque la fertilité et les promesses agricoles, pourrait se situer au niveau de l’actuel Newfoundland, au Canada. Sur le site archéologique de L’Anse aux Meadows, les vestiges d’un campement viking, daté de l’an 1021 grâce à la datation au carbone 14, viennent confirmer l’hypothèse. Il s’agit à ce jour de la seule preuve tangible d’une présence nordique en Amérique du Nord avant Colomb.
Leif et ses hommes y passent probablement l’hiver. Ils y construisent des habitations, explorent les environs, cataloguent les ressources : bois, poisson, fruits, gibier. Rien ne laisse penser à une installation durable, mais tout indique une mission d’observation, peut-être préparatoire à une colonisation future. Ce n’est pas la fièvre de la conquête qui guide Leif, mais une démarche commerciale, structurée, presque cartographique.

Entre foi chrétienne et mémoire païenne
À son retour au Groenland, Leif ramène non seulement des récits fascinants mais aussi une nouvelle foi. Converti au christianisme lors d’un séjour en Norvège auprès du roi Olaf Tryggvason, il devient missionnaire malgré lui. Il tente d’introduire la nouvelle religion sur les terres de son père, ce qui ne manque pas de créer des tensions, notamment avec Erik le Rouge, resté fidèle aux dieux nordiques.
Mais cette dualité – exploration et foi, tradition et renouveau – façonne Leif. Son rôle dépasse alors la simple découverte géographique. Il devient un trait d’union entre deux mondes : celui des anciens dieux et celui des nouvelles croyances ; celui des terres connues et celui de l’horizon à déchiffrer.

Nautisme Article
© AdobeStock

Une mémoire effacée, puis redécouverte
Le destin de Leif Erikson après son expédition demeure flou. Les sources islandaises, compilées plusieurs siècles plus tard dans les Sagas islandaises, s’arrêtent sur son retour au Groenland et sa tentative d’évangélisation. Il serait mort autour de l’an 1025. Pendant des siècles, son histoire disparaît presque totalement de la mémoire européenne. Ce n’est qu’à partir du XIXe siècle, dans un contexte de nationalismes naissants et de redécouverte des textes médiévaux, que Leif redevient une figure majeure.
Aux États-Unis, il incarne même une alternative à Christophe Colomb. En 1964, le Congrès américain reconnaît officiellement Leif Erikson Day, célébré le 9 octobre, en hommage à son arrivée en Amérique du Nord. Cette reconnaissance, bien que symbolique, souligne combien la figure du Viking explorateur a su s’ancrer dans une autre lecture de l’histoire transatlantique.


Le navigateur avant la lettre
Leif Erikson ne fut ni un conquérant, ni un colonisateur au sens classique. Il incarne plutôt un prototype de navigateur moderne : capable de lire les signes naturels, de planifier un voyage au long cours, de documenter une terre et de rapporter des informations utiles à son peuple. Sa traversée précède l’âge des grandes découvertes, mais en épouse déjà la méthode.
Dans son sillage, d’autres expéditions tenteront de revenir au Vinland, sans jamais réussir à établir une présence durable. Les raisons sont multiples : conflits avec les autochtones, isolement géographique, priorités politiques changeantes. Pourtant, la trace de Leif subsiste. Elle est inscrite dans la pierre de L’Anse aux Meadows, dans les sagas, mais surtout dans cette capacité qu’ont certains hommes, à certains moments de l’histoire, à regarder au-delà de la carte, à défier les lignes de l’horizon.
Leif Erikson ne découvrit pas l’Amérique « par erreur » comme Colomb. Il s’y rendit volontairement, mû par une intuition, une rigueur et un désir d’expansion. Il ne cherchait pas l’or, mais la terre. Non pour la posséder, mais pour l’explorer. C’est peut-être cela, finalement, qui fait de lui un navigateur d’exception.

L'équipe
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
Jean-Christophe Guillaumin
Jean-Christophe Guillaumin
Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
Charlotte Lacroix
Charlotte Lacroix
Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
Max Billac
Max Billac
Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
Denis Chabassière
Denis Chabassière
Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
Michel Ulrich
Michel Ulrich
Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
METEO CONSULT
METEO CONSULT
METEO CONSULT
METEO CONSULT est un bureau d'études météorologiques opérationnel, qui assiste ses clients depuis plus de 30 ans. Les services de METEO CONSULT reposent sur une équipe scientifique de haut niveau et des moyens techniques de pointe. Son expertise en météo marine est reconnue et ses prévisionnistes accompagnent les plaisanciers, les capitaines de port et les organisateurs de courses au large depuis ses origines : Route du Rhum, Transat en double, Solitaire du Figaro…